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Mon ado et sa sexualité

14 juin 2008, 20:00

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«On ne badine pas avec l?amour », disait Musset. Nos jeunes le savent-ils assez ? C?est ce que se demandent certains parents qui, conscients qu?on vit dans un monde hypersexualisé, craignent que leurs enfants n?aient de relations sexuelles précoces et qu?après, il n?en ressorte que désillusion et souffrance. Parce qu?en gros, que recherchent les parents pour leurs enfants ? Le meilleur avenir possible. Mais que peuvent-ils permettre ? Et que leur faut-il interdire ? C?est là que ça se corse. Le guide du corps féminin et du corps masculin que PILS a sorti récemment a le mérite d?aborder les questions clés. « C?est mal de se caresser ? », « Je crois que je suis attirée par les filles », « Nous avons envie tous les deux, mais elle pourrait tomber enceinte. »? Toutefois, là où ça ne passe pas toujours, c?est dans les réponses qui sont jugées non complètes selon certains (voir réactions). Expliquer comment utiliser le préservatif est-ce une invitation à avoir des relations sexuelles ? Dire que c?est au jeune de décider de ce qu?il veut faire parce que son corps lui appartient, est-ce lui conseiller de ne céder qu?à ses pulsions ? Les écoles de pensée sont différentes à ce sujet. Ce qui est sûr, c?est que les parents sont aujourd?hui plus démocrates ! Ils comprennent que la sexualité est quelque chose d?intime, que les jeunes ont besoin d?un espace secret et que les adultes ne doivent pas trop s?immiscer dans ce monde en construction. Ils savent bien qu?aujourd?hui on n?attend pas le mariage pour passer à l?acte. Est-ce à dire pour autant que tout est permis ? Les parents ont un devoir de vigilance. Discret, sans doute, mais ils ont bel et bien un rôle de « pare-feu ». Car quoi qu?on en dise, les jeunes ont besoin d?encadrement. Ils ne savent pas se situer si leurs parents ne leur fixent pas de limites. Il ne s?agit pas simplement de les abrutir en leur martelant les dangers qui peuvent surgir lors de rapports sexuels. Il faut aussi faire la part des choses, comme de transmettre une image saine de la sexualité. Mais il est surtout nécessaire de leur dire ce qu?implique la sexualité, qu?on ne fait pas l?amour pour épater les amis ou parce qu?on en est capable physiquement. Les parents doivent leur expliquer les valeurs qui devraient accompagner l?acte. En profitant des films, des cas de grossesse, des campagnes sur le VIH, les parents peuvent aborder le sujet de la sexualité. La psychothérapeute Jaya Balgobin s?efforce, dans ce dossier, d?aiguiller les parents face à différents cas de figure.

Puberté : faut-il que je lui parle de sexualité ? Il est important de déconstruire un mythe très courant chez les parents, car certains pensent qu?en parlant de sexualité à leurs enfants, ils encourageront ces derniers à être sexuellement actifs. Or, c?est une croyance erronée, car les études démontrent que les enfants-ados qui arrivent à parler de sexualité à leurs parents sont moins aptes à adopter des comportements à risque que ceux qui n?arrivent pas à en discuter. Les recherches indiquent également que les ados veulent un soutien, des renseignements et des conseils de leurs parents. S?il est vrai que les parents peuvent trouver cela gênant, surtout au début, ils arriveront toutefois à mieux le faire s?ils arrivent à se pencher sur leurs propres attitudes et leurs valeurs par rapport à la sexualité. On ne demande pas aux parents d?être des experts, mais d?expliquer que les changements associés à la puberté sont normaux. Il leur faut rassurer leurs enfants, être ouverts et honnêtes, écouter, offrir leur appui, répondre aux questions et utiliser les bons termes pour désigner les parties du corps. Le plus tôt les parents introduisent le sujet à la maison, le plus à l?aise l?enfant sera pour en parler après. Les enfants sont aussi exposés à l?influence des médias, et on peut alors utiliser des sujets d?actualité sur la sexualité pour introduire et entamer des discussions. Avoir recours à un ouvrage est bien, dans la mesure où une discussion sur le sujet suit, mais avoir recours à une tierce personne ne pousse pas nécessairement à tisser cette relation de confiance parents-enfants qui doit avant tout primer pour des discussions plus approfondies. ■ Il regarde des films pornographiques ou se masturbe. Comment réagir ? Il y a deux points différents à faire ici. D?abord, la masturbation est un acte tout à fait normal, qui aide l?adolescent à se faire plaisir, et c?est aussi un acte qui le pousse à découvrir son corps. À vrai dire, les enfants commencent à se masturber à un très jeune âge, sans toutefois s?en rendre compte. Mais c?est pendant la période de la puberté que la masturbation prend une tout autre dimension, d?où l?importance de relativiser cet acte et surtout, de ne pas culpabiliser votre enfant. Pour ce qui est de la pornographie, cette dernière pousse les enfants et les jeunes à développer des perceptions malsaines sur la sexualité. En effet, ils voient le sexe qui ne sert qu?à dominer et/ou contrôler l?autre. Les femmes sont décrites comme de simples objets servant à assouvir les besoins sexuels. D?où l?importance d?une éducation basée sur la réciprocité dans la sexualité, l?empathie humaine et une éthique relationnelle. C?est là le rôle des parents de ne pas négliger de tirer la sonnette d?alarme sur les aspects émotionnels des relations qui vont de pair avec les relations sexuelles. ■ Elle écrit des billets doux à une autre fille. Est-ce grave ? Les transformations fonctionnelles et sexuelles du corps de l?ado relancent la construction de son identité et de son orientation sexuelle, d?où la curiosité naissante pendant cette période. Ressentir des sentiments pour une personne du même sexe ou même avoir une expérience homosexuelle sont choses assez courantes pendant l?adolescence, mais cela ne signifie en aucun cas que votre enfant est homosexuel. Reconnaître et assumer son orientation sexuelle est un long processus, et finalement, le jeune adulte finira par savoir où il se situe. Mais le punir ou en faire tout un drame peut laisser des cicatrices émotionnelles et psychologiques néfastes pour la santé psychique des ados. ■ Il s?enferme dans sa chambre avec sa petite amie. Dois-je empêcher cela ? Tant que vous serez permissif, votre ado repoussera les limites pour voir jusqu?où il peut aller ! Donc, c?est aux parents d?établir les paramètres et d?avoir des règles bien claires. Une structure solide aide les enfants à savoir « where to draw the line ». En étant trop rigides ou laxistes, les parents n?aident pas leurs enfants à gérer cette indépendance naissante qu?ils recherchent pendant la puberté. ■ Ma fille ne mange plus parce qu?un petit ami l?a plaquée. Dois-je intervenir ? C?est normal de ressentir un mal-être et de la peine face à une première déception amoureuse. Les adolescents vivent cette expérience différemment des adultes car leur perception du présent et du futur est conçue d?une autre manière, d?où l?importance de se montrer compatissant en étant à l?écoute et en les encourageant à ne pas se replier sur eux-mêmes. Mais si cela dure plus de deux semaines, accompagné par d?autres signes comme l?isolement, la perte d?intérêt dans des activités qu?elle aimait, des perturbations au niveau de son humeur, des changements par rapport aux habitudes alimentaires etc., il ne faudrait pas hésiter à avoir recours à de l?aide. ■ Elle est harcelée par un garçon avec qui elle a refusé de sortir. Que faire ? Il faut en parler car le gang bullying, surtout pendant l?adolescence, peut avoir des effets tragiques, entraînant même le suicide chez certains qui n?arrivent pas à gérer la situation. Donc, ne pas en faire cas n?aidera pas votre fille. Si dans un premier temps, malgré le recours au dialogue avec les personnes concernées, les choses ne changent pas, il faudra s?en remettre aux autorités compétentes. Ceux qui harcèlent sont souvent des gens qui vivent dans une souffrance perpétuelle, avec un besoin de contrôler et de manipuler l?autre, ce qui leur procure un pseudo sentiment de contrôle sur leur vie. Il s?agit, en général, de personnes très troublées psychologiquement et qui ont elles-mêmes grand besoin d?un accompagnement thérapeutique. ■ Il ne sort pas, n?a pas d?amis, ne s?intéresse pas aux filles. Est-ce normal ? Nous avons tous des caractères différents, ce qui fait que certains ados sont plus repliés sur eux-mêmes que d?autres. En outre, il n?existe pas de moment spécifique où on se dit « bon maintenant que je suis ado, il faut impérativement que je m?intéresse à une fille ou à un garçon ». Bien au contraire, être non-conformiste prouve un caractère fort, qui se traduit aussi en une validation interne au lieu d?être à la recherche de la validation externe, vouloir être comme les autres, faire comme les autres. Donc, on ne peut pas tout dramatiser ! Or, si ce que vous dites est aussi accompagné de symptômes et de signes que j?ai mentionnés plus haut, à ce moment il faut en faire un cas. ■ Elle a des complexes concernant son corps. Comment l?aider ? De nos jours avec tout le battage médiatique par rapport à l?image de soi, je pense qu?on peut facilement développer des complexes. Et ce, avec un besoin de tout faire pour fit in pendant que ceux qui sont constamment en train de tirer les ficelles pour que les femmes ressemblent de plus en plus à des « pretty coat hangers » remplissent leurs poches ! Si les mères sont complexées et font de sempiternels régimes, de la liposuccion, etc. de peur qu?elles ne soient perçues comme des laiderons par rapport à, par exemple, Angelina Jolie, quel message sommes-nous en train de renvoyer à nos jeunes ? Déjà, ces derniers se sentent mal à l?aise dans leur « nouveau » corps ! C?est vrai que certains ados pensent que tout le monde reste focalisé sur leurs boutons, leurs poils, leur taille, etc. car ils se prennent pour le nombril du monde. Le point, c?est de les aider à développer une acceptation de soi, en tant que personne à part entière, et non pas comme celui qui doit survivre dans un monde superficiel où « the survival of the prettiest » règne ! Je dirais aux ados : « Les imperfections nous rendent plus humains et moins caricaturaux ! »

REACTIONS par rapport au livret de PILS « Je suis maman de deux teenagers. Je voudrais dire ce que je pense de ce livret. Le mérite du livret est qu?il a su attirer les jeunes. Il donne des informations (pas toutes forcément nécessaires) auxquelles tous les jeunes n?ont pas accès. Le grand tort du livret est dans le message général qu?il passe. Ce message contient deux aspects positifs par rapport à la relation sexuelle : ? Ne l?impose pas à l?autre, ne te laisse pas l?imposer?, ?Tu n?es pas obligé d?avoir des relations sexuelles?. Malheureusement, ce qui suit ne va pas du tout aider le jeune à se construire, à devenir le jeune responsable et l?adulte responsable que chacun aspire au fond de lui-même à devenir. En effet, dire aux jeunes ?du moment que tous les deux le désirent, allez y?, ne les invite pas à réfléchir que le fait de répondre à un désir ne suffit pas pour qu?un acte soit bon ; il y a d?autres aspects à considérer : ?Qu?est-ce que je perds ? qu?est-ce que je risque ? surtout, qu?est-ce que je gagne à ne pas poser cet acte ?? Les jeunes, qui auront été ?invités? à avoir des relations sexuelles quand ils le désirent tous deux, sauront-ils qu?aucune méthode contraceptive n?est à 100 % garantie ? Donc qu?un bébé pourra toujours s?annoncer. Que si le préservatif diminue de beaucoup le risque (et doit donc être utilisé dans les comportements risqués), il ne l?élimine pas, pour le VIH? La relation anale est banalisée dans le livret, mais il n?ajoute pas que le HIV a ainsi 5 fois plus de chances de se transmettre. Le livret n?aide pas le jeune à découvrir que la relation sexuelle est infiniment plus que la recherche du plaisir. Il donne l?impression que le jeune est incapable de rester maître de ses pulsions. » Elzette Balgobin, membre du Board de l?Éducation de l?Association scout mauricienne et détentrice d?un certificat de formateur des formateurs en santé de la reproduction. « Après la sortie du livret ?GUIDE DU CORPS?, nous voudrions, nous, éducateurs de la sexualité auprès des jeunes, vous donner notre point de vue. Le livret commence par informer les jeunes des transformations physiques à la puberté. Après avoir parlé un peu des aspects psychologiques qui accompagnent les transformations du corps (peur d?être différent, etc.), le livret ne parle au jeune que de ses désirs, ses pulsions, et, comme le titre l?indique, va lui expliquer en détail comment aller plus loin. Pas un mot sur l?impact psychologique qui accompagne tout geste d?amour. La masturbation est présentée comme une bonne chose. Cependant, si la masturbation ne doit pas être dramatisée, elle ne doit pas non plus être banalisée ; l?effort pour maîtriser la masturbation libère la capacité d?aimer ; c?est cela qui est important. Son corps est à lui, à 16 ans il a la majorité sexuelle, lui rappelle le livret? Et la maturité qui nous aide à mieux discerner, l?avons-nous aussi à 16 ans ? Sans compter que le livret s?adresse également à des adolescents beaucoup plus jeunes. Par rapport à l?homose-xualité, on lui recommande de ne pas « se laisser enfermer » par ce que lui disent les autres !!! Quels autres ? Ses parents ? Au garçon et à la fille qui se demandent si il/elle n?est pas homosexuel (le), le livret aurait dû dire que souvent, à l?adolescence, le jeune se sent attiré par quelqu?un du même sexe. C?est le plus souvent une tendance provisoire et il/elle n?est pas homosexuel pour cela. Attirance ne veut pas dire qu?il faut passer à l?acte, ce qui pourrait l?entraîner vers l?homosexualité permanente. La panoplie de la contraception lui est présentée mais pas un mot sur leur manque de garantie totale. Voilà nos jeunes face aux IST, au virus du sida, avec un sentiment de sécurité qui les pousse à s?exposer davantage alors que les échecs, à l?usage, du préservatif sont loin d?être négligeables. Nous voyons clairement l?avortement implicitement suggéré comme une alternative. La pilule du lendemain y est également conseillée sans parler de sa possibilité abortive et de sa faible efficacité. Eva, MAM, Action familiale, Rolande Gourel de St-Pern.

Adresse utile : Les enseignants désireux de suivre la formation offerte par les éducateurs à la Sexualité et à l?Affectivité auprès des jeunes, peuvent contacter le Centre EVA au 232 bis, route Royale, Rose-Hill, Tél. : 467.01.93.

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