L’homme de loi, membre du cabinet « Raj Solicitors » à Londres, apporte un éclairage sur la politique d’immigration du gouvernement Cameron en Grande-Bretagne. 

Vous êtes depuis vingt ans en Grande-Bretagne. La question de l’immigration a refait surface après les émeutes dans la banlieue de Londres, la crise économique et les déclarations musclées de David Cameron. Le dossier est-il plus sérieux que jamais ?

Disons qu’il y a une combinaison de facteurs qui a, en effet, aggravé la question de l’immigration. Mais ne soyons pas dupes, les immigrants ont bon dos et à chaque fois que la Grande-Bretagne passe par une période difficile, ils sont les premières victimes, les premiers à être blâmés. C’est un dossier récurrent, une carte politique et un good vote winner. Les discours musclés étaient davantage destinés à calmer la population. D’ailleurs, la cote de popularité de David Cameron a grimpé.

? Les mesures strictes annoncées par David Cameron et son objectif de réduire de moitié l’arrivée des immigrants d’ici à quatre ans, s’agit-il de la rhétorique ou une nouvelle politique de l’immigration en Grande-Bretagne ?

Les deux. Vous savez, David Cameron n’est ni contre ni pour les immigrants. Mais il se trouve dans une coalition au pouvoir avec un partenaire qui a une vision différente. Il est un conservateur et son partenaire, Nick Clegg, est un libéral. Aujourd’hui, le contexte de crise économique a amené les deux partenaires à faire des compromis et à regarder dans la même direction. Donc, du fait que la crise ne va pas abandonner de sitôt la Grande-Bretagne – elle peut durer quatre ans encore –, la question de l’immigration fait consensus et l’étau va se resserrer contre les immigrants clandestins. Surtout que les mesures d’austérité ont instauré un mauvais climat. Bon nombre d’immigrants sont rentrés chez eux certains partent encore en ce moment. J’ai vu beaucoup de personnes, qui sont là depuis cinq-six ans, faire le chemin inverse. Des Sri-Lankais, des Africains et des Mauriciens.

? Le moment est donc mal choisi pour ceux qui songent à aller s’installer en Grande-Bretagne ?

Ce pays n’est plus l’Eldorado des immigrants. Même pas pour les études. Presque 150 écoles privées ont fermé, en grande partie parce que beaucoup n’étaient pas tout à fait des écoles. C’est une bonne chose, parce que beaucoup de ces écoles arnaquaient les étudiants. Je demande aux étudiants mauriciens de bien choisir leurs écoles, de faire eux-mêmes leurs démarches et recherches et d’éviter les intermédiaires.

? Est-ce que la Grande-Bretagne a pansé ses plaies après les émeutes d’août dernier ?

Cela prendra encore du temps, vu les dégâts causés aux commerces notamment, et pour les familles des victimes. En ce moment, des procès continuent. Il faut savoir que les autorités britanniques avaient déployé de grands moyens. La justice a siégé durant des nuits entières pour inculper les émeutiers. Et parmi, il y avait une douzaine de Mauriciens, des jeunes et des moins jeunes. La police a noté que parmi les milliers d’émeutiers qui ont été inculpés, 75 % étaient des récidivistes, et le reste des opportunistes.

Propos recueillis par Abdullah EARALLY

Abdullah EARALLY