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Ravi Shankar: le parrain de la World Music s’en est allé
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Ravi Shankar: le parrain de la World Music s’en est allé
Après une longue maladie, celui qui a fait connaître la musique indienne à travers le monde est décédé à 92 ans, à San Diego, en Californie.
C’est le genre de musique qu’on écoute dans la pénombre de la nuit. Le virtuose du sitar fait palpiter le cœur au rythme de ses sonorités. Le voyage est garanti. Rares sont tenues les promesses. Avec Ravi Shankar, on ferme ses yeux et on réalise tous ses rêves. C’est l’ex-Beatles, George Harrison, qui devait le qualifier de «parrain de la World Music». Cela lui a collé à la peau. Aujourd’hui, le Premier ministre indien évoque, à juste titre, la perte «d’un trésor national et d’un ambassadeur mondial de l’héritage culturel de l’Inde.»
Père de trois enfants, Shubhendra, Anoushka et de l’inégalable Norah Jones, le maître indien a influencé la musique des groupes comme les Beatles et les Rolling Stones. Né le 7 avril 1920 à Bénarès, Ravi Shankar s’est ensuite installé en Californie, aux Etats-Unis. Il a participé, entre autres, à Woodstock. Il mariait avec génie les ragas indiens aux notes du rock.
En 1997, le magazine français Télérama l’avait rencontré. Voici quelques extraits de cet entretien:
«Mon père faisait des recherches sur les hymnes védiques, qui s''''appuient sur les Vedas, poèmes religieux très anciens, et il lui arrivait de scander certains des chants que j''ai repris dans un de mes albums.»
«Le plus long, c’est d’apprendre à improviser et à s’abandonner totalement, sans se poser de questions. On travaille dix, douze ou quatorze heures par jour. Quelquefois, c''est pénible, douloureux le gourou peut comprendre quelque chose de travers ou se fâcher à tort, mais on ne peut jamais lui répondre. Plus tard, ce genre d’expérience est vécu comme une bénédiction.»
«Figurez-vous que j’ai épousé la fille (ndlr: il s’est marié à deux reprises) de mon gourou et que, contrairement à la tradition, je n’ai même pas eu à me convertir à l’islam. En fait, c''est elle qui est devenue hindoue, c’est son père qui l’a suggéré»
«La langue est essentielle car la musique indienne s''appuie sur le chant. Souvent, un même raga est joué au Nord et au Sud avec des noms différents. Au fil des siècles, comme les artistes n''avaient plus tellement l’occasion de s’écouter les uns les autres, les différences se sont accrues. C''est seulement après l''Indépendance, grâce à la radio et aux cassettes, que les musiciens des deux régions se sont de nouveau rencontrés et écoutés.»
«Le raga n’est ni une gamme, ni un mode, ni une clef, ni une mélodie, ni un chant. Pourtant, il y a des éléments de tout cela. Chaque raga a un motif, un leitmotiv. C’est comme un visage, grâce à ses traits, on peut le reconnaître immédiatement. Il faut aussi qu’un raga ait un rasa, c''est-à-dire une humeur, un état d''âme particulier. Les uns sont dignes, les autres érotiques, romantiques, héroïques...»
«John Coltrane a été le premier jazzman que j’ai rencontré. J''écoutais beaucoup Louis Armstrong, Cab Calloway ou Miles Davis, mais j''associais leur musique à des pièces enfumées avec drogue et alcool. Quand j''ai connu Coltrane, il avait cessé de boire, il était devenu végétarien, il étudiait les textes de Rama Krishna… Il posait des questions sur les ragas, les talas (rythmes), l’improvisation. Je lui disais : j''entends des perturbations, des sons perçants, quelque chose qui hurle dans votre musique.  «C''est exactement ce que je veux apprendre de vous, m''a-t-il répondu, comment puis-je mettre de la paix dans ma musique ?»
 
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