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Raymond Guillouzo directeur de l’Institut de la Francophonie pour l’Entrepreneuriat : «L’intérêt d’une formation en entrepreneuriat est largement reconnu»

22 mars 2012, 13:48

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L’Institut de la Francophonie pour l’Entrepreneuriat (IFE) organise depuis lundi et ce jusqu’à aujourd’hui une Semaine de l’entrepreneuriat. L’occasion de demander à son directeur si l’entrepreneuriat, cela s’apprend dans une salle de classe ou sur le terrain…

¦ Vous offrez à l’IFE un Master en Entrepreneuriat Est-ce que l’entrepreneuriat, cela s’apprend ?

C’est une question qui a été longtemps débattue. Peut-on enseigner l’entrepreneuriat ? Est-il réservé aux personnes en formation continue, c’est-à-dire qui ont déjà une expérience du management en entreprise ? Des enseignants qui ont des métiers stables peuvent-ils former des preneurs de risques ?

La question est aujourd’hui tranchée et l’intérêt d’une formation en entrepreneuriat est largement reconnu, même si c’est une discipline récente (1980-90) qui n’échappe pas à un effet de mode. L’idée d’une formation en entrepreneuriat émane de cadres d’entreprises qui, soucieux de créer ou de reprendre une entreprise en cours de carrière ou suite à un licenciement, souhaitaient acquérir une méthodologie pour entreprendre personnellement ou développer des projets innovants au sein de leur entreprise, dans un environnement en constante mutation.

¦ Quid du terrain ?

Une formation en entrepreneuriat ne peut être déconnectée du terrain.

C’est la raison pour laquelle la formation délivrée à l’Institut de la Francophonie pour l’Entrepreneuriat (IFE) associe à parts égales professionnels et universitaires. Une partie des enseignements est assurée par des chefs d’entreprises et des consultants.

Chaque étudiant est suivi par un tuteur professionnel, qui est un entrepreneur mauricien, tout au long au long de sa formation. Avant de soutenir son mémoire professionnel, il repart six mois sur le terrain pour mieux s’imprégner des conditions environnementales et peaufiner son projet de création d’entreprise.

Pourquoi proposer une formation diplômante alors que l’entrepreneur devient son propre employeur ? Tout simplement parce que l’obtention d’un diplôme de type Master crédibilise l’entrepreneur auprès des parties prenantes (banques, etc.) et l’accrédite comme diffuseur de la culture entrepreneuriale auprès des organismes professionnels et des institutions scolaires ou universitaires.

¦ Quel est le profil de ceux qui s’inscrivent au Master en Entrepreneuriat que vous offrez à l’IFE ?

Le profi l des étudiants de l’IFE est très diversifié. La condition principale pour se porter candidat à cette formation est d’être porteur d’un projet de création d’entreprise ou de développement d’une activité au sein d’une entreprise existante. Comme nous proposons une co-diplômation en partenariat avec les Université de Bordeaux 4 et de Paris 12 – UPEC, le niveau requis à l’entrée est celui du Master 1, quelle que soit la discipline d’origine. Toutefois, tout candidat peut demander à faire valider une expérience professionnelle en remplacement du diplôme universitaire requis.

¦ Votre formation s’adresse t- elle uniquement aux Mauriciens ?

Il convient de reconnaître, qu’après avoir constitué le vivier le plus important des premières promotions, les Mauriciens sont aujourd’hui peu nombreux à suivre la formation de l’IFE. La raison principale est que les Mauriciens éprouvent des difficultés à concilier une formation intensive avec une activité professionnelle.

La solution est, selon nous, dans un aménagement des horaires au sein de l’entreprise et l’octroi de bourses pour compenser une diminution de salaire.

Nous souhaitons également sensibiliser les Rodriguais à notre formation d’autant que deux bourses leur sont proposées par les autorités rodriguaises.

La 14e promotion qui suit actuellement la formation est composée de 34 étudiants de 16 nationalités.

Ils viennent de toute l’Afrique, des Caraïbes et du Sud-Est asiatique.

Les femmes restent minoritaires mais représentent près d’un quart de l’effectif.

L’âge des étudiants varie entre 25 et 50 ans et tous ont déjà acquis une première expérience professionnelle.

¦ Et ces étudiants, ont-ils déjà une idée du secteur vers lequel ils veulent s’orienter ou de l’entreprise qu’ils souhaitent créer ?

Les étudiants sont recrutés sur la base d’un projet : ils ont donc déjà choisi la branche dans laquelle ils souhaitent développer leur affaire. Le contenu des projets est souvent lié au niveau de développement économique de leur pays d’origine. Les étudiants du continent africain sont souvent porteurs de projets industriels, notamment agro-alimentaires. Les étudiants vietnamiens ou mauriciens sont bien plus tournés vers les services, plus particulièrement ceux qui s’appuient sur les technologies de l’information et de la communication.

Incontestablement, les projets développés par les étudiants reflètent les priorités affichées par les gouvernements respectifs et, lors du recrutement, nous sommes très vigilants sur la faisabilité du projet. Nous incitons les porteurs de projet à prendre en compte dès la création, les préoccupations en matière de développement durable et nous avons de plus en plus de projets portant sur les énergies renouvelables ou le tourisme vert.

¦ Est-ce que ce genre de formation permet aux jeunes et moins jeunes d’être mieux armés pour affronter les réalités souvent dures de l’entrepreneuriat ?

Le rôle de la personnalité du créateur ne peut être nié dans une démarche entrepreneuriale. Mais si le tempérament et les capacités spontanées sont des éléments importants, la formation doit permettre à chaque porteur de projet d’entreprendre en fonction de sa personnalité et de ses qualités propres.

Les enseignements doivent l’aider à mieux identifier ses forces et ses faiblesses d’une part, à mieux cerner les menaces et les opportunités de l’environnement dans lequel il évoluera d’autre part. Un entrepreneur est supposé détenir une telle palette de connaissances et de compétences pour réussir. On l’imagine mal les détenir toutes ou les acquérir seul. C’est pourquoi notre formation allie cadrage théorique et démarche empirique. Chacun doit tout à la fois inscrire son projet dans un cadre méthodologique – un modèle d’affaires (Business Model) – et en proposer une mise en oeuvre quantifiée – le plan d’affaires (Business Plan) – qu’il présentera notamment à son banquier pour l’octroi d’un prêt.

Comme le souligne Michel de Spéville, CEO de Foods & Allied et président du Conseil d’administration de l’IFE, la passion et l’intégrité sont les fondements de la réussite de l’entrepreneur.

Ce sont des valeurs que nous essayons d’inculquer à nos porteurs de projets en leur proposant des enseignements aussi divers que la créativité ou l’éthique des affaires.