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Recension du propos

21 septembre 2012, 00:00

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Cela ne concerne pas que le Best Loser System. Un recensement ethnique identifie aussi une majorité et des minorités, soit les termes d’ un rapport de force. Si on prenait la peine d’en arriver là, cela voudrait dire que cette comptabilité reste nécessaire à la gestion des grands équilibres sociétaux. L’est-elle ?

A chaque fois qu’un partisan du Best Loser System, Yousouf Mohamed ou son fils spirituel, Paul Bérenger, évoque les droits des dites «minorités» que protégerait l’artifice, c’est aussi une manière d’affirmer, du moins implicitement, qu’il existerait une «majorité» menaçante. Refuser le recensement ethnique, c’est rejeter l’idée de décompte, de taille des uns et des autres, c’est se passer des notions de majorité et de minorité.

Avons-nous besoin, pour bâtir notre société, d’un ensemble de chiffres indiquant qu’il y a 47 % de fans de Man U, 33 % de Liverpool, 17 % d’Arsenal et 3 % de Chelsea. Si ses talents étaient reconnus de tous, faudrait-il de surcroît que le futur Premier ministre soit issu de la pépinière d’Old Trafford ? Si le moyen pourcentage acquis aux Gunners et les petits nombres du club d’Abramovich comptaient de vraies compétences, seraient-ils limités, pour l’entrée au Cabinet, par le numerus clausus suggéré par les chiffres de 1972 ?

La notion de nombre et, partant, de “force” de nos groupes sociaux a déjà fait bien assez de mal à ce pays. Que ce soit à travers de prétendues différences communales, voire, quand le jeu s’affine, quand religion et origine ancestrale deviennent secondaires, à travers des normes sociales, entre autres l’appartenance de caste. Au titre d’une prétendue loi des nombres, combien d’injustices jamais réparées, combien de concitoyens profondément frustrés ? Est-ce cette société que nous voulons perpétuer ou est-ce une autre que les jeunes générations devraient avoir le droit d’inventer ? Jusqu’à quand les sexagénaires, qui ont fait main basse sur notre vie politique, continueront-ils à imposer leur représentation passéiste de notre vivre ensemble ?

Qui est pour le maintien du Best Loser System ? Qu’est-ce que ces hommes veulent maintenir ?

Au nom de quelle prétendue sagesse, de quelle prétendue intuition intime de notre histoire et de notre avenir nous imposent-ils surtout le spectacle affligeant de leur propre obsolescence ? Comme si l’enjeu était surtout révélateur de la fin d’une époque et du déclin de ses héros fatigués.

 

Gilbert AHNEE