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Roland Meunier : l’art de transformer le porc

18 octobre 2010, 00:00

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Roland Meunier : l’art de transformer le porc

Ambitieux, le charcutier rodriguais projette de vendre ses produits à Maurice dès le début de l’année prochaine. L’on dit que «dans le cochon, tout est bon». Ce n’est pas Roland Meunier qui contredira cet adage.

Voilà plus d’une décennie que cet homme, charcutier à Rodrigues, régale les papilles des Rodriguais mais aussi et surtout des Mauriciens et autres étrangers de passage dans l’île.

Si, pour le moment, ses produits ne sont en vente qu’à sa charcuterie artisanale de Citronnelle, d’ici le début de l’année prochaine, il les exportera vers Maurice où il y a, selon lui, «une grande demande». «Je suis déjà en contact avec quelqu’un qui vendra mes produits sur le marché mauricien. Il est actuellement à la recherche d’un local», explique Roland Meunier, vêtu d’un tablier, un couteau à la main.

En ce samedi matin, le charcutier n’a pas une minute de répit. Il vient de recevoir des kilos et des kilos de viande de porc qu’il lui faut maintenant découper. «Chaque morceau, indique-t-il, demande une préparation particulière.» La cuisse, c’est pour le bacon. Avec l’épaule, on peut faire du jambon.

Aujourd’hui, c’est une variété de plus de 25 produits que Roland Meunier propose au consommateur.

On est loin des trois produits – jambon, bacon, saucisses – qu’il a appris à confectionner lors de son passage à l’Agricultural Training Farm de Maréchal, à la fin des années 60.

A cette époque-là, si la matière première était disponible, il n’y avait toutefois pas le matériel nécessaire à la confection et à la conservation du jambon. C’est pourquoi, pendant plus d’une dizaine d’années, Roland Meunier exerce divers autres métiers et met la charcuterie complètement de côté.

Et puis, au milieu des années 80, un commerçant de Port-Mathurin lui commande un jambon. «Je lui ai dit que j’avais oublié comment on le faisait.

Il m’a dit d’essayer. Je l’ai fait. J’ai dû abîmer une douzaine de cuissots avant d’obtenir finalement un jambon», se souvient Roland Meunier.

A partir de là, il n’a plus arrêté de faire du jambon. Sur commande uniquement, pour commencer. Et c’est vers la fin des années 90 qu’il se lance dans la charcuterie à plein temps.

«C’est à partir de là que j’ai commence à diversifier ma production», souligne le charcutier. Soit, à faire de la galantine, du saucisson à l’ail, du fromage de tête et du «boucané», entre autres.

Pour arriver à confectionner la plupart d’entre eux, il a «sey seye» par lui-même. Si le jambon au miel, il est arrivé à le faire du premier coup, avant de pouvoir mettre du jambon cru sur le marché, cela lui a demandé des mois et des mois de travail. «J’ai abîmé 65 cuissots en essayant de trouver comment produire du jambon cru, raconte Roland Meunier. Notre climat n’est pas adapté à ce type de jambon.»

Technique maîtrisée

Une fois la technique maîtrisée, il ne faut pas plus de quatre jours pour faire un jambon fumé et deux jours pour du saucisson à l’ail. En revanche, il faut attendre entre trois à quatre semaines avant de pouvoir déguster un saucisson sec.

Peu de temps après qu’il ait décide de se lancer à plein temps dans la charcuterie, Roland Meunier tombe malade. Depuis, il ne consomme plus de charcuterie. Pour la confection de ses produits, à défaut de se fier à son palais, «mo lizie goute li», dit-il. Et depuis deux ans, Sultana Jean Baptiste, une jeune femme qu’il forme au métier de charcutier, l’aide. Un palais et des bras supplémentaires plus que nécessaires puisque d’ici la fi n de l’année, le nouveau local de Roland Meunier devrait être opérationnel. Un local qui lui permettra de «grandi biznes la».

A côté de son atelier actuel, cette nouvelle installation, aux normes internationales, est en construction. Elle devrait être opérationnelle d’ici la fin de l’année et lui permettra d’augmenter sa production. Pour l’instant, il transforme 25 porcs, 15 poulets et cinq canards ou pintades environ chaque mois. D’ici la fin de l’année, il espère en transformer autant chaque semaine. Cette nouvelle installation sera pourvue d’un laboratoire, d’un abattoir et d’un lieu pour mettre les produits sous vide, entre autres. Actuellement, les porcs sont tués par des bouchers et Roland se charge de les découper dans son atelier artisanal.

Comme son nouveau bâtiment sera pourvu d’un abattoir, il tuera lui-même les bêtes, en attendant que l’abattoir que construira le gouvernement sorte de terre.

S’il compte employer une ou deux personnes supplémentaires, il a toutefois l’intention de mettre l’accent sur les machines. «Li pa pou demann ogmantasion», lâchet- il dans un grand éclat de rire.

Ce nouveau bâtiment lui a demandé un investissement de Rs 1,3 million déjà. Une fois qu’il sera terminé, le charcutier estime que le bâtiment ainsi que l’équipement lui auront coûté pas moins de Rs 2,8 à Rs 3,2 millions environ.

Selon lui, c’est un investissement qu’il pourra assez facilement rentabiliser.

En effet, ce n’est pas le travail qui manque. En période de fête, c’est à peine s’il ferme les yeux 15 minutes chaque jour pour se reposer un peu.

«Je travaille 23, voire 24 heures par jour», dit-il. Avec sa nouvelle installation, le charcutier veut relancer l’utilisation du cochon noir de Rodrigues. Il a déjà rencontré des éleveurs à cet effet.

«Ils n’avaient pas un bon prix avec ces cochons-là avant. Afin de les encourager à les élever, je leur ai dit que je leur donnerai davantage que pour un cochon blanc.» N’y voyez pas là une générosité excessive. Si Roland Meunier tient autant à ses cochons noirs, c’est qu’ils sont, dit-il, plus savoureux.

Il est à souligner que Roland Meunier ne travaille pas uniquement le porc. Tous les produits qu’il fait à base de porc, il peut les faire avec du poulet et du canard. Il mettra d’ailleurs bientôt sur le marché local du bacon à base de poulet.

Quant aux prix, ils varient pour la plupart entre Rs 100 et Rs 275 la livre. Par exemple, la livre de «boucané» se vend à Rs 275. Le jambon cru, lui, est un peu plus cher. Il faut compter Rs 400 pour s’en procurer une livre.

 

Valrie OLLA