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Roshan Ramoly : «Il faut éviter d’investir dans les sociétés très endettées»

9 mars 2011, 11:04

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? Après un début d’année en fanfare, la Bourse connaît actuellement une correction. A quoi est due cette correction ?

Il faut d’abord comprendre que le marché avait bien monté, et que donc, la consolidation enregistrée ces dernières semaines est plutôt normale. Plusieurs titres sont désormais bien valorisés et leur potentiel de hausse est maintenant plus limité. Il faut en outre préciser que la récente hausse était liée au retour des investisseurs étrangers. Or, ces investisseurs non-résidents interviennent actuellement de moins en moins. Plusieurs fonds ont été créés en 2010 et l’argent est déjà investi. Ce qui réduit le flux de capitaux. A Maurice, nous ne disposons pas d’une base solide d’investisseurs individuels locaux. Il nous faudrait une population de petits porteurs mauriciens afin de créer un socle domestique d’investisseurs. Ce qui permettrait d’éviter une trop forte volatilité des cours. La Bourse a souvent tendance à suivre la direction que les investisseurs étrangers prennent.

Mais pour l’instant, l’investisseur mauricien est très conservateur dans son approche du marché. Il est plus courant pour eux de conserver les titres déjà acquis en attendant que les marchés reprennent. Cette attitude est peut être liée au problème de liquidités que rencontre parfois le marché.

? Y a-t-il un véritable changement d’attitude de la part des investisseurs étrangers ?

Avec ce qui se passe en Tunisie, en Egypte, en Libye ou en Côte d’Ivoire, les gestionnaires de fonds internationaux sont plus circonspects sur l’Afrique, d’autant plus que certaines places, comme la Bourse de Nairobi au Kenya, sont surévaluées. On assiste à un ralentissement des investissements vers les Bourses en Afrique. Autre phénomène qui nous affecte : la réémergence du Nigeria, où les banques se paient une fois le «book value», alors que la Mauritius Commercial Bank (MCB) se paie, par exemple, deux fois le «book value». Vis-à- vis de Maurice, les investisseurs internationaux sont dans l’expectative et c’est le «wait and see» qui prévaut car les titres sont désormais bien valorisés. Ils sont entrés dans la MCB à Rs 137 ou Rs 138 et la banque vaut désormais plus de Rs 170.

? Justement, après les hausses de 2009 et 2010, le marché mauricien estil devenu trop cher ?

Il est vrai que la Bourse de Port-Louis est devenue plus chère, mais elle n’est pas «trop» chère. Le marché mauricien affiche un PER (NdlR, price earning ratio, rapport cours/bénéfice) de 15.18, ce qui reste encore raisonnable.

? Quels sont les secteurs et les titres les plus touchés par la correction ?

Le secteur bancaire a été affecté. La MCB et la State Bank avaient beaucoup monté, et elles ont été les premières à être touchées par la correction. Rogers a également subi des dégagements.

? Dans ce contexte plus difficile, quels sont les titres qui tirent le mieux leur épingle du jeu ?

Parmi les valeurs les moins touchées, on retiendra Sun Resorts, qui bénéficie de la prochaine ouverture du Long Beach. Omnicane a également résisté. Le groupe offre une base très solide et des perspectives intéressantes dans l’énergie, avec l’éolien et l’éthanol. Innodis a pris de la valeur après le rachat de Meaders Feeds, qui consolide sa position dans la production de poulet. Innodis est par ailleurs en train de se développer en Afrique. Harel Frères a profité de la bonne valorisation de ses activités immobilières et de ses projets dans le secteur financier. Shell Mauritius a été soutenue par le rendement offert par son dividende. Et puis Caudan est resté très stable, malgré la perspective de l’ouverture du centre commercial de Bagatelle, qui viendra concurrencer ses espaces commerciaux.

? Attendez-vous une hausse du taux repo de la Banque de Maurice ?

Il est clair que les pressions inflationnistes se font de plus en plus sentir. Cela milite en faveur d’une remontée du taux repo. Mais la Banque centrale a déjà relevé le ratio de liquidités des banques commerciales pour éponger une partie de l’excédent de liquidités du marché monétaire. Par ailleurs, il ne va pas falloir décourager l’investissement, et beaucoup de sociétés sont endettées. C’est pourquoi nous n’attendons pas une remontée des taux de forte ampleur. Si jamais le taux directeur monte, la hausse devrait porter au maximum sur 50 points de base.

? Quel va être l’impact d’une éventuelle hausse des taux sur la Bourse ?

Il ne devrait pas y avoir un impact majeur sur la Bourse. Même si avec la faiblesse actuelle du marché, une hausse des taux ne va pas attirer de nouveaux investisseurs particuliers. Compte tenu de la faible ampleur attendue pour cette hausse de taux, les épargnants ne devraient pas modifier leurs positions. Déjà, quand il y avait eu la baisse de 100 points de base en septembre dernier, nous n’avions pas constaté de changements majeurs immédiats dans le comportement des épargnants.

? Dans le contexte actuel, quels secteurs et quels titres conseillez-vous ?

Nous restons confiants sur Sun Resorts, qui devrait tirer, dès cette année, les bénéfi ces de l’ouverture du Long Beach. Nous conseillons aussi les valeurs liées aux commerces, comme Innodis. Il faut également se porter sur les titres qui présentent une forte décote par rapport à leur actif net. Car dans ce cas, un rattrapage est toujours probable.

C’est notamment le cas de Rogers et de Promotion and Development. Le secteur bancaire s’attend à une bonne performance cette année, et combiné avec une correction des valeurs, la MCB commence à redevenir attirante. En revanche, dans la perspective d’un durcissement de la politique monétaire, il faudra faire attention aux sociétés très endettées, car un relèvement des taux affectera directement leurs comptes. Il faudra donc chercher des entreprises avec des gearing (NdlR, rapport entre l’endettement net et les fonds propres) peu élevés.