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Résidences Bethléem : Des bâtisseurs avec la pauvreté dans le viseur
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Résidences Bethléem : Des bâtisseurs avec la pauvreté dans le viseur
Il pleut sur Rose-Belle. En un sens, ça tombe bien. Cela permet au visiteur de constater que l’eau ruisselle dans des ruelles étroites. Elle ruisselle en emportant tout ce qu’elle trouve sur son chemin.
Elle ruisselle pour finir sa course dans de petites cours. Certaines des maisons ont de la chance d’avoir quatre murs en béton pour arrêter l’eau. Les autres… Les autres deviennent le théâtre d’un univers surréaliste…
A l’intérieur (encore, peut-on parler d’intérieur pour un espace exigu, entouré de quatre feuilles de tôle frêles), c’est un spectacle désolant : le sol est humide. Le toit, dont la tôle a fait son temps, laisse entrevoir le ciel, à travers les nombreux petits trous. Ces derniers trouvent chacun leur moitié dans le concert de pluie, à travers les récipients (seaux et autres pots, entreposés sur les lits, les rares meubles qu’on peut trouver.
Non, ce n’est pas de la fiction. Ce n’est pas non plus l’exagération d’un quelconque esprit trop exigeant en matière de qualité de vie. Ici, ce sont les Résidences Bethléem. Bienvenue à la Cité EDC de Rose-Belle…
Toutefois, il y a une lueur d’espoir pour les habitants les moins fortunés de cette localité, boudée, selon les dires des habitués, même par les taxis et les services d’urgence. Cet espoir est alimenté par un groupe de volontaires de l’ONG Sa nou vize, sous la houlette d’Alain Auriant. Il délaisse sa musique pour essayer de donner un sens à un quartier qui, comme il le déplore, «n’a pas changé en 20 ans.» Les mêmes bicoques aimantées et suintantes.
Comment ? En relogeant les familles qui en ont le plus besoin. Ils ont commencé par trois familles qui habitaient dans une même bicoque. Celle-ci ayant pris feu, ils ont fait les démarches nécessaires pour les reloger. Devant leur initiative, les organismes comme le Trust Fund for the Social Integration of Vulnerable Groups (TFSIVG), ont suggéré à l’ONG de chapeauter un projet de relogement. De maisons en bois et en tôle, ils ont décidé de pousser l’idée plus loin et de trouver des sponsors pour essayer de se tourner vers des maisons en dur.
Ainsi, il y a eu deux premiers échantillons, ayant coûté Rs 240 000 chacun. Une initiative qui leur a valu un désintérêt, pendant un certain temps, du Trust Fund. «Ils ne communiquaient plus avec nous», raconte Alain Auriant. Sans les fonds promis, leur attente aura coûté cher, en termes de temps, pour les travaux. Sans vouloir prêter une quelconque mauvaise volonté à cette institution, on devine que ses officiers ne sont pas odeur de sainteté dans cette partie de Rose-Belle.
Si on les voit de temps en temps, si leurs promesses sont bien présentes, certains témoignages montrent que, dans les faits, l’attente est souvent la seule réponse qu’ils ont. Alain Auriant, pour sa part, est optimiste, alors que la situation se décante, avec la nomination d’un nouveau Chief Administrator, avec qui le dialogue a été rouvert. Le Trust Fund fait preuve de bonne volonté.
«Nous avions identifié 21 familles dans un premier temps, mais nous avons réalisé qu’il faudrait en reloger dix de plus», explique Alain Auriant. Ces familles sont toujours en attente de leur nouveau logis. Cependant, même si l’aide qu’ils proposent est désintéressée, les volontaires de doivent faire face à une autre forme de désintérêt, moins louable. Comme quoi, il ne faut voir que le verre à moitié plein. Les bonnes volontés rencontrent souvent des comportements décourageants.
«Certaines de ces familles ne s’impliquent pas dans la construction de leur maison», regrette Alain Auriant. Certains des bénéficiaires s’attendent ainsi à tout avoir sur un plateau, voire à reprocher à leurs bienfaiteurs d’éventuels retards dans une construction à laquelle ils ne participent pas, même s’ils sont doués pour le travail manuel. «L’idéal serait d’avoir un contrat
social», explique notre interlocuteur.
De plus, les femmes et les enfants font souvent les frais de fléaux sociaux, comme l’alcoolisme, qui affecte la petite agglomération. «L’éradication se fait au quotidien», nuance-t-il. On pourrait ainsi retenir la morale qu’il faut parfois bien commencer quelque part.
«Sa nou vize»
Connu auparavant comme le Mouvement des Forces Vives du Quartier EDC de Rose-Belle, cette ONG a reçu son accréditation CSR en 2010. En plus de ses projets de relogement, elle propose également un service d’alphabétisation pour les habitants de la localité, de même qu’un atelier de musique, en réponse au manque de loisirs dont souffrent les jeunes. Ces derniers bénéficient également d’un soutien pédagogique dispensé par des enseignants du primaire et du secondaire. Parmi leurs partenaires du privé sur les différents projets, on compte Omnicane, United Basalt Products, Airports of Mauritius ou encore Mauritius Union.
Le prochain projet sur lequel se concentre l’ONG, maintenant, concerne la mise en place d’une garderie. Le but : permettre aux parents d’aller travailler alors que les enfants en bas âge seront pris en charge. Cette prise en charge sera faite, dans une large mesure, par des personnes de la localité, qui suivent déjà une formation avec Caritas en ce sens. Ils ont déjà identifié certaines familles pour bénéficier de ce service.
Enfin, avec le soutien de la MCB Forward Foundation, ils ont sorti un DVD pour parler des droits des enfants en mars dernier. Ce DVD a été réalisé avec le concours de Shirin Aumeeruddy-Cziffra, ancienne Ombudsperson for Children et Lindley Couronne, alors directeur d’Amnesty. Si le nom de l’ONG a été choisi pour viser l’éradication de la pauvreté dans la localité, s’adresser aux enfants reste une tactique de l’association.
Ludovic AGATHE
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