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Sen Ramsamy : «L’heure n’est plus au Trial & Error ou à la fête»?

21 janvier 2013, 08:47

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Le directeur du département Hôtellerie, Tourisme et Loisirs chez KPMG, prône une ouverture intelligente du ciel mauricien en prenant en compte la demande grandissante des économies émergeantes.


Maurice a fait 0,1 % de progrès en termes d’arrivées touristiques en 2012. Quelle est votre première analyse des dernières statistiques ?

2012 a été une année «bouge-fixe», si l’on situe l’enjeu du tourisme local dans un contexte global. L’année dernière, on a atteint le chiffre record d’un milliard de touristes à travers le monde.

Malgré la crise en Europe, nos concurrents directs ont fait une belle récolte touristique en 2012: les Seychelles avec 7 % d’augmentation, les Maldives 3 %, le Sri Lanka 17 %. Alors que les marchés européens continuent leur déclin sur Maurice, (-5 % en 2011 et -7 % en 2012), les arrivées européennes au Sri Lanka sont très révélatrices: France +14 %, Allemagne +24 %, Angleterre +6 %. J’essaie de voir en 2013 une année de relance, une année d’espoir.

A quoi est due la note positive pour décembre, où l’on constate une hausse de 2,8 % par rapport à décembre 2011 ?

En décembre, malgré la baisse persistante de l’Europe (-7 %), les marchés émergents ont continué leur bonne progression. Ce sont surtout l’Angleterre, la Suisse, l’Afrique du Sud et la Réunion qui ont fait mieux.

Chaque année, en décembre, Maurice accueille également beaucoup de touristes VFR (Visiting Friends and Relatives), soit un grand nombre de Mauriciens établis à l’étranger, qui reviennent pour les fêtes en famille.

Après la période festive très animée, le constat pour les hôtels reste toujours inquiétant…

D’où l’effet VFR. Le taux d’occupation moyen des hôtels est resté autour de 60 % sur l’ensemble de l’année, contre 77 % pour celui des hôtels de plage aux Maldives.

Ce sont, sans doute, les effets de l’augmentation de l’offre et de la suppression de sièges d’avion de certains marchés traditionnels.
Espérons que 2013 sera meilleure en termes d’opérations hôtelières, avec les prochains vols directs sur Shanghai et des possibilités de vols directs sur la Russie.

Comment le pays aurait-il pu bénéficier de l’ouverture du ciel ?

Avec une position géostratégique entre les pays émergents et l’Afrique, Maurice pourrait prendre le grand large si elle ouvre intelligemment son espace aérien, avec davantage de valeur ajoutée, vers la Chine, l’Inde, la Russie, l’Afrique du Sud et aussi Singapour, la Malaisie, la Corée du Sud, le Japon, la Nouvelle-Zélande et le Moyen-Orient.

L’équation, capacité de sièges et capacité de chambres, deviendrait alors simpliste.

Les chiffres démontrent que les touristes du Moyen-Orient préfèrent d’autres destinations de la région à Maurice. Comment les séduire davantage ?

Ce marché regorge de potentiel, avec les riches Arabes et les expatriés. Ils voyagent en famille, dépensent gros et sont à la recherche de nouvelles destinations balnéaires. Maurice est une destination idéale pour eux. Mais, très souvent, l’avion à Dubayy est déjà presque rempli par des passagers en transit. Trouver une place du Moyen-Orient pour Maurice n’est pas facile, sans compter le prix exorbitant dû à une situation de monopole.

Il coûte moins cher d’aller à New York, Hong Kong ou Londres de Dubayy que de venir à Maurice. Il serait sage d’avoir une concurrence sur cette ligne afin d’augmenter les fréquences et la capacité de sièges, et aussi ramener le prix du billet à un meilleur niveau pour augmenter sensiblement le trafic.

Une concurrence saine sur cette route aiderait à déverrouiller l’immense potentiel de ce marché de proximité.

Quelle devrait être la priorité en termes de stratégie marketing cette année ?

La priorité est de définir un nouveau Business Model par rapport aux tendances du tourisme mondial. Et, professionnaliser le marketing de la destination. Après des décennies d’existence, on ne peut procéder par Trial & Error, encore moins faire la fête après les leçons de 2012.

Une redéfinition de notre produit touristique par rapport à la demande et aux attentes des nouveaux marchés, une amélioration sensible de la qualité des services dans les hôtels et restaurants et des innovations dans le réceptif s’imposent. Il est temps de réunir les vraies compétences, faire de la place pour la jeune génération de professionnels et agir avec un sens de direction. Maurice a besoin de bons visionnaires pour assurer l’avenir de son tourisme.


Propos recueillis par Karen WALTER

 

Karen WALTER