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Sheila Bappoo, ministre de la Sécurité Sociale : «Je prône la fidélité conjugale»

6 janvier 2013, 07:38

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 La version papier de cette interview de l’express dimanche a été censurée au marqueur hier soir suite à l’ordre de la Cour suprême interdisant toute information sur Nandanee Soornack. Certains extraits ne seront pas compréhensibles. Nous nous en excusons.

 

C’est à elle que le leader du MSM doit sa nuit de jeudi au CCID. Militante anti-répression en 1972, maquisarde anti-Jugnauth aujourd’hui, Sheila Bappoo n’a pas rendu les armes. Le genre de carrière qui autorise à avoir des avis sur les choses de ce bas monde.

Vous semblez avoir survécu à ce qu’on appelle communément « les fêtes » …
Je suis en pleine forme !

C’est le fait d’avoir pourri le Noël de Pravind Jugnauth qui vous met en joie ?
Je ne pense pas lui avoir gâché les fêtes. Au contraire, je lui ai donné l’occasion de s’exprimer. Jeudi, en 15 heures de déposition, il a eu le temps de dire des choses.

Dire, par exemple, que vous connaissez l’enseignant du MITD soupçonné de pédophilie. Vous confirmez ?
C’est vrai, je connais cette personne, mais cela ne veut pas dire que je la protège. J’ai fait sa connaissance lors de la campagne électorale de 2005. J’étais candidate à Vacoas/ Floréal (n° 16), c’était un habitant de la circonscription.

Etait- il votre agent ?
Non. Il ne pouvait pas l’être vu qu’il était policier.

Après les élections, êtes- vous restés en contact ?
Je ne répondrai à cette question que si la police me le demande.

Pourquoi, le 21 décembre, avez- vous porté plainte contre Pravind Jugnauth ?
Parce qu’il a dit sur les ondes de Top FM que Sheila Bappoo « pe protez enn gouvernman pedofil e sadik » . C’est grave, vous autres ! Maurice n’est pas la Thaïlande. M’accuser moi, de cautionner des choses aussi dégueulasses que la pédophilie, est purement inacceptable. Je ne suis pas n’importe quel ministre, mon cher ami. En 1989, quand Maurice a signé la Convention internationale des droits de l’enfant, j’étais en charge du portefeuille de l’Enfance. Voilà pourquoi cette accusation m’a profondément blessée.

Qui vous a demandé de porter plainte ?
Personne.

C’était une initiative personnelle ?
Non. J’ai consulté l’ Attorney General , puis j’ai parlé au Premier ministre, qui m’a donné son feu vert.

Vous avez l’indignation sélective…
Quand Pravind Jugnauth parle de gouvernement pédophile, il me cite nommément.

Etes- vous en bons termes avec l’épouse du Premier ministre ?
Nous sommes très amies.

Pensez- vous le rester encore longtemps ?
Aussi longtemps que je vivrai. Mais pourquoi cette question ?

Ça, c’est ce qu’essaie de faire croire Pravind Jugnauth.

Je suis très amie avec l’épouse de mon Premier ministre, mais je ne suis pas chargée de la défendre. Cela ne m’empêche pas d’avoir de l’admiration pour elle. Je l’admire comme femme et comme épouse. Elle ne se met jamais en avant, elle ne fait pas de show autour de sa personne, contrairement à d’autres.

Vous avez été ministre de la Famille pendant 12 ans, cela vous donne une légitimité sur ce dossier, non ?
( Rire) Cela ne m’autorise pas à entrer dans la sphère privée. Mais je peux vous dire que je suis pour une cellule familiale solide et responsable, je suis pour le respect des moeurs et la fi délité conjugale, j’ai toujours prôné ça. ( Sur le ton de la confidence) En 40 ans de vie politique, j’ai côtoyé pas mal de monde, des hommes surtout, et j’ai vu beaucoup de relations, disons, un peu bizarres, un peu par-ci par-là.

Des noms ?
Je n’ai jamais parlé et je ne parlerai jamais. Les politiciens, leurs épouses, les journalistes… oh, mon dieu, c’est un monde fou !

Tout le monde couche avec tout le monde ?
Je n’ai pas dit ça. De toute façon, ce n’est pas à moi d’en parler. Je respecte la vie privée des gens, chacun vit à sa façon, je ne juge pas.
Mais je suis chagrine quand je vois les dégâts de l’infi délité et de l’irresponsabilité. Les enfants en souffrent, ce sont les premières victimes.

N’avez- vous pas l’impression d’avoir été la mère Noël de Pravind Jugnauth ? Grâce à vous, il s’est remis en selle politiquement en prenant la posture du martyr de la liberté d’expression.
Peut- être, mais je suis une personne de principe. Je ne peux pas accepter que l’on traite un gouvernement dont je fais partie de pédophile, a fortiori quand mon nom est cité. J’ai bien réfl échi avant de porter plainte. J’ai décidé de condamner un dérapage, après, que cela relance ou non Pravind Jugnauth, ce n’est pas mon problème.

Pourquoi, en avril dernier, lui avez- vous intenté un procès ?
Il s’en est pris à ma fi lle en disant qu’elle avait été favorisée pour obtenir un job au bureau de Londres de la Mauritius Tourism Promotion Authority, ce qui est totalement faux.

Votre guéguerre avec les Jugnauth remonte à loin. C’est quoi le fond du problème ?
Pendant mes 12 ans au MSM, comme ministre []]]] de 1983 à 1995, ndlr ], je n’ai jamais eu le moindre fight avec les Jugnauth. J’étais même très proche de la famille, très proche de Pravind. Lui et Raj, mon époux, étaient d’excellents camarades de chasse.

Ils chassaient quoi ?
Ehoula, pa fer koumsa avek mwa ! Ils chassaient évidemment le gibier, le cerf. Les Jugnauth, tant que vous travaillez pour eux, pour le clan, ils vous aiment, vous êtes prioritaire. Mais dès que vous ne le faites plus, vous êtes leur ennemi, leur poutou rasi si pa ki zafer . Aujourd’hui ils essaient de me salir, ils veulent traîner Sheila Bappoo dans la boue.

Vous aviez 25 ans au moment de vos premiers pas en politique, au MMM, tout près de Paul Bérenger. L’avezvous aimé, cet homme ?
Je n’ai jamais aimé qu’un seul homme dans ma vie, mon mari. Mais j’ai apprécié ce que j’ai appris et vécu au sein du MMM. Mon militantisme des années 70 est toujours là, en moi ( l’index sur la tempe) . Durant ces années- là, j’ai appris à être utile à mon pays, à bâtir une société stable fondée sur le respect de l’autre. J’ai passé des nuits entières à prendre des notes sur un carnet, c’était notre formation, j’ai eu la chance d’apprendre la politique de cette façon. Aujourd’hui, qui fait de la formation ? On entre en politique juste pour défendre ses intérêts.

Y compris au Parti travailliste ?
Oui, dans tous les partis. A l’époque, j’étais une idéaliste. Enn sel lepep enn sel nasyon , j’y croyais. Quelques années plus tard, le MMM est passé maître dans l’art du communalisme scienti- fi que. J’ai fait fausse route, je me suis laissé berner par les beaux discours, mais j’ai retenu la leçon. Depuis, je sais que les leaders ont deux langues : une pour le grand public, une pour le petit salon.

La rumeur vous a prêté une relation amoureuse avec Paul Bérenger...
Il ne faut même pas me poser cette question. ( Elle cherche ses mots)

La rumeur a menti ?
Je ne peux même pas dire que c’est faux car c’est inexistant. Comment cela peut être vrai, faux, analysé ? J’aimerais que vous posiez cette question à mon mari, c’est la personne idéale pour vous répondre.

Votre réponse à vous est étrange…
Je pourrais démentir carrément mais vous diriez que je triche. Comment une question pareille peut- elle être posée ? Personne n’a jamais osé. Franchement, je suis choquée. Ce que vous dites n’a jamais existé.

Vous avez trahi et Paul Bérenger, et Anerood Jugnauth. Par nécessité ou par opportunisme ?
Par conviction. Ce n’était pas des trahisons, je suis partie parce que j’étais mal à l’aise. Les deux fois, j’ai démissionné sur la même base : le communalisme. Et le MMM et le MSM m’ont reproché d’être marathi, d’appartenir à une communauté minoritaire. SAJ m’a même dit que les marathis ne représentaient que 4% de la population - ce qui, soit dit en passant, est supérieur aux 2,8% du MSM. « Vous ne représentez que 4% de la population » , c’est brutal d’entendre ça. Ce jour- là, j’ai pris deux kalot , pak- pak ( elle mime) .

Vous entamez votre 21 e année comme ministre. Vous sentez- vous intouchable ?
Pas du tout. Je suis pour la relève.

Vous laisserez donc la place en 2015 ?
Je n’ai pas dit ça.

Vous êtes pour une relève patiente, en fait.
Je peux ne pas être ministre mais rester membre du Parlement.

Ficher enfin la paix à Pravind Jugnauth, est ce que cela pourrait être votre bonne résolution pour 2013 ?
Non, je ne prendrai pas cet engagement. Je ne cherche pas à m’acharner sur Pravind Jugnauth, je veux juste que de tels dérapages ne restent pas sans conséquence. Si quelqu’un fait une grosse gaffe, politicien ou pas, et s’il me met directement en cause, je me défends. J’ai toujours agi ainsi et je ne changerai pas.

Que vous souhaitez vous pour 2013 ?
De la réussite dans mon combat pour aider les plus vulnérables de ce pays.