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Babita Thannoo : «On ne peut tolérer un régime qui a fait de nos enfants des consommateurs de drogues»

22 septembre 2024, 17:00

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Babita Thannoo : «On ne peut tolérer un régime qui a fait de nos enfants des consommateurs de drogues»

Babita Thannoo, membre de Rezistans ek Alternativ et candidate au n°8.

Rezistans ek Alternativ (ReA) a rejoint l’alliance regroupant le Parti travailliste (PTr), le Mouvement militant mauricien (MMM) et les Nouveaux Démocrates (ND). À ce stade, il a été convenu que ReA obtienne deux tickets des les prochaines législatives : un pour Ashok Subron au n°4 – Port-Louis Nord–Montagne-Longue – et l’autre pour Babita Thannoo, qui ira se mesurer à Pravind Jugnauth au n°8, Quartier-Militaire–Moka. Qui est cette dame ? Estimet-elle qu’elle est de taille à affronter le PM dans son fief ?

Qui est Babita Thannoo ?

Professionnellement, je suis chargée de cours au sein d’une institution privée et en parallèle, je me consacre au Centre for alternative research and studies (CARES), une branche de ReA qui se penche sur des projets politiques et des recherches. Je collabore aussi avec des organisations internationales sur la crise climatique et je dispense des cours sur l’écoféminisme.

C’est quoi l’écoféminisme pour vous ?

C’est une philosophie, une pratique, qui démontre comment le capitalisme rend la femme victime. Par exemple, les femmes travaillent autant que les hommes mais ne sont pas rémunérées de la même façon. La femme elle, est doublement exploitée car elle doit s’occuper en sus de cela de la maison, de sa famille, de ses enfants. Au final, la femme est aussi victime du système qui l’empêche d’avoir plus d’enfants. Qui plus est, je dois dire que le système capitaliste engendre davantage de violences domestiques. Il n’y a qu’à voir le nombre de cas de féminicides à Maurice...

Revenons sur votre parcours, depuis quand êtes-vous membre de ReA ?

J’ai toujours été dans les coulisses de la scène politique avec ReA, pour des raisons personnelles et professionnelles. J’ai défendu plusieurs causes avec le parti, dont les dossiers Pomponette et Wakashio. Je collabore avec ReA depuis 2017. Mais là, dans le contexte actuel, où on m’a proposé d’être candidate, c’est l’occasion pour moi d’apporter ma part et de vraiment contribuer à la lutte.

Quel est votre sentiment après que ReA a rejoint l’Alliance du changement ?

Un sentiment de détermination. Nous sommes dans un cas de figure très, très grave et il fallait prendre une décision pour apporter des changements, chose que nous ne pourrions pas forcément faire en dehors du Parlement. On se retrouve dans un contexte où il y a de l’oppression, où les gens ont peur, mangent mal, où les jeunes quittent le pays car ils ne se retrouvent plus chez nous. Et il fallait faire ce choix même si des fois cela n’a pas été facile et qu’il a fallu faire des compromis. Nous sommes venus avec notre programme et nos idéologies et avons rencontré ces deux grands partis – le PTr et le MMM – et on a vu qu’il était possible de travailler avec eux pour apporter ce changement. Qui plus est, on a commencé à nous retrouver dans leur programme, qui comporte par exemple avec le congé parental, les menstrual leaves... ReA n’est pas là pour le pouvoir mais pour apporter un changement fondamental dans le pays.

**Vous pensez faire le poids face à Pravind Jugnauth au n°8 ? **

J’ai été étonnée par le fait que les gens individualisent le combat politique. Pour moi, cela ne se passe pas comme ça. Le combat qu’on mène a trait à nos idéologies et nous prônons un changement de système. On est là pour contrecarrer le néolibéralisme (NdlR, terme désignant aujourd’hui un ensemble d’analyses ou de doctrines économiques et sociales inspirées du libéralisme économique aux définitions multiples et parfois concurrentes). On vit dans un contexte de crise. Je pense que les gens sont là prêts à accueillir un programme qui nous donne beaucoup plus confiance en l’avenir.

Vous avez déjà commencé à occuper le terrain au n°8 ?

On ira sur le terrain bientôt, et nous serons très présents. Car en ce moment, nous travaillons sur un protocole qui vise à tout règlementer pour éviter tout dérapage. Il faut une approche disciplinée.

ReA a, à plusieurs reprises, dénoncé les agissements de ce gouvernement. Que reprochez-vous au clan MSM et à ses alliés ?

On ne peut tolérer un régime qui a fait de nos enfants des consommateurs de drogues – pas tous mais beaucoup. Ce fléau touche des jeunes, des très jeunes ; ils sont à la dérive et on laisse mourir ces enfants et ça c’est inacceptable. Cela montre que l’on a un gouvernement qui ne tient pas compte des besoins de son peuple et c’est grave. Nous vivons sur une petite île où les gens avaient espoir en leur avenir mais ce n’est plus le cas désormais. De nombreux Mauriciens pensent qu’il faut partir, quitter le pays pour pouvoir vivre mieux. Il faut penser à ceux qui restent et leur offrir de nouveaux espoirs.

On parle souvent d’intimidation et de pression venant du pouvoir envers ces opposants. Pas plus tard que mercredi, Ashok Subron a été interpellé pour une affaire qui date d’il y a 12 ans. Ne craignez-vous pas des représailles en vous engageant dans la politique active

Non, parce que c’est précisément en voyant ces attaques basses et farfelues qu’on se dit qu’on est fort. Je ne suis pas seule, nous sommes une équipe soudée. Ça devrait aller!

Si vous faites partie du prochain gouvernement, quel sera votre dossier prioritaire ?

Nous avons des mesures clés dans notre programme. Je pense qu’en premier lieu, nous devons inclure la protection de la nature dans la Constitution afin de protéger notre île. Là, avec la bétonisation, la braderie de nos terres et la destruction massive de nos wetlands, il est impératif d’intégrer les droits de la nature dans notre Constitution. Puis en deuxième lieu, on se penchera sur les droits économiques et sociaux. On voit actuellement l’appauvrissement de toutes les couches sociales. Et puis bien sûr, on passera en revue tout ce qui ne va pas au sein des institutions publiques, la santé, l’éducation, le judicaire. Il n’est pas normal que des personnes doivent attendre des années, voire des décennies, pour des cas qui sont en cour. Nous allons en outre insister sur la réforme électorale puisque jusqu’à présent on nous force à déclarer notre appartenance ethnique, sinon nous ne pouvons pas participer aux législatives. Mais nous allons continuer à nous battre pour la reconnaissance de l’identité mauricienne. Je dois pouvoir être candidate aux élections en tant que Mauricienne.

Ne pensez-vous pas que Kugan Parapen méritait également un ticket ?

Pour être franche, beaucoup de membres de ReA méritent d’être candidats aux prochaines législatives, dont Kugan ! Il y a des pourparlers à ce propos et j’espère que la décision finale sera positive. Cela, car Kugan est plébiscité par le public… ** Pensez-vous que deux tickets pour ReA au sein de l’alliance soient suffisants ?**

On aurait aimé en avoir dix (rires). Moi j’aurais bien aimé que David (Sauvage) soit là, que Stefan (Gua) soit là. Nous avons des gens qui ont milité toute leur vie pour des causes justes au sein de ReA....