Publicité

L’équation sanataniste dans l’enjeu de 2019

26 août 2017, 08:37

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.

Plusieurs mois avant les élections générales de 2014, Somduth Dulthumun avait abandonné le camp Ramgoolam pour rallier les Jugnauth. Savait-il que l’alliance avec Paul Bérenger menait Ramgoolam tout droit à la défaite ? Ou avait-il oeuvré à la déroute de l’alliance PTr-MMM ? Le rôle des organisations socioculturelles reste posé et le débat a été relancé après la cinglante défaite de Dulthumun lors des élections du dimanche 20 août pour désigner une nouvelle équipe dirigeante pour la Mauritius Sanatan Dharma Temples Federation (MSDTF).

Après sa défection du camp travailliste, Dulthumun avait été vite adopté par les Jugnauth. Il avait créé la sensation en s’affichant au meeting du MSM à Vacoas. Avant les élections de la MSDTF, des indications sur le terrain laissaient croire que les adversaires de Dulthumun étaient suffisamment motivés et organisés pour le renverser. Ce qui a amené le Prime Minister’s Office (PMO) à mobiliser toutes ses ressources pour sauver sa peau, surtout que certains de ses adversaires étaient connus pour leur tendance pro-Ramgoolam.

L’ampleur de la défaite de Dulthumun fut significative. Toute son équipe et lui-même furent balayés de la scène. Avec un taux de participation de 89,6 %, les délégués de différents temples sanatanistes du pays se sont montrés nullement impressionnés par les consignes du PMO de voter Dulthumun. En faisant abstraction de ce dernier, ce vote constitue un désaveu sans équivoque pour Pravind Jugnauth. Avant les élections de 2014, bien que Dulthumun fût contesté par certains, le mot d’ordre du pouvoir était respecté et le président de la MSDTF se faisait élire an après an.

Répudiation

Une telle vulnérabilité de Pravind Jugnauth n’augure rien de bon pour les élections générales prévues entre décembre 2019 et mai 2020. Cela compromet son pouvoir de marchandage dans le contexte d’une nouvelle alliance. À moins d’une remise en question totale de la stratégie politique de Pravind (si stratégie il y a) et la répudiation de toute cette équipe cristallisée autour de la fameuse cuisine. Si cette équipe n’a pas réussi à orchestrer l’opération tyrolienne à Rodrigues, à quoi devrait-on s’attendre d’elle quand il faut se bagarrer sur le terrain pour sauver Dulthumun ?

Rien ne dit toutefois que la nouvelle équipe de la MSDTF se montrera ouvertement hostile à Pravind Jugnauth ni qu’elle s’engagera à faire de la politique active en faveur de Navin Ramgoolam. Toutefois, comme l’a souligné Nad Sivaramen, les élections de dimanche constituent un paradigm shift. Une nouvelle équation entre dans le jeu politique. Mais aussi dans l’administration publique, constituée majoritairement d’éléments qui exercent une certaine influence sur le plan politique et électoral. Puisque des scandales se produisent de façon régulière pour compromettre des dirigeants du MSM, les fonctionnaires appelés à exécuter des ordres des ministres se montreront davantage vigilants pour insister sur le respect scrupuleux des procédures et des règles. Par exemple, en dehors des questions de gestion problématique de fonds publics, il serait intéressant de savoir si des fonctionnaires ont été impliqués dans la rédaction du communiqué que Soodhun (dans un anglais approximatif) avait publié pour annoncer la rupture des relations diplomatiques avec le Qatar.

En exigeant le respect inconditionnel des procédures, les fonctionnaires pourraient sans le vouloir retarder la réalisation de bien des projets, alors que Pravind Jugnauth doit nécessairement présenter un bilan éloquent avant les élections générales. Il y a surtout le projet du tramway qui implique l’octroi de bien des contrats d’un montant de 18 milliards à des entités associées à une compagnie privée nouvellement créée à la State Bank. Un tel stratagème vise à contourner les règlements sur les appels d’offres. Si jamais il y a un changement de gouvernement et que le rôle des uns et des autres soit soumis à une commission d’enquête, des fonctionnaires n’ayant pas pris des précautions nécessaires pourraient se retrouver en difficulté. Même les dépenses encourues par le gouvernement lors des conférences de presse hebdomadaires d’Étienne Sinatambou pourraient compromettre des fonctionnaires si des procédures n’ont pas été suivies car on ne peut légalement utiliser les ressources d’État à des fins partisanes.

Le fait que des votants à la MSDTF – dont beaucoup de fonctionnaires et de petits entrepreneurs – aient fait fi des consignes de l’hôtel du gouvernement représente un gamechanger. Pravind Jugnauth est condamné à réaliser des missions impossibles avant l’échéance des prochaines élections générales. Des missions impossibles surpassant même celles de Tom Cruise, afin de faire oublier l’épisode tyrolienne de Rodrigues, la défaite de Dulthumun et l’amoncellement de scandales depuis 2015.