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Front Bench pour une nouvelle alliance

30 juin 2018, 11:20

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Le Mouvement socialiste militant (MSM) et le Mouvement militant mauricien (MMM) sont condamnés éventuellement à s’engager dans une alliance électorale afin de faire face à ce qui semble être un regroupement inévitable du Parti travailliste, du PMSD, du Mouvement patriotique et des dissidents MMM menés par Pradeep Jeeha. Les récentes élections au niveau national dans les instances du MMM pour le renouvellement de son comité central sont riches en enseignement sur l’état de santé du MMM et de ses options futures, notamment les arrangements à conclure dans le cadre d’une alliance avec le MSM et surtout le marketing d’un Front Bench.

À noter tout d’abord que les instances du MMM ont massivement approuvé l’entrée en scène, au niveau national, de Joanna Bérenger. Qu’elle ait été aidée dans son élection par le fait qu’elle porte le nom de Bérenger, cela reste incontestable. Mais même les pires adversaires du leader du MMM reconnaîtront qu’il n’est pas du genre à donner un mot d’ordre du style de «Eh, pa bliyé enn vot pou mo tifi»

 

Aussi, en se classant juste après les éléphants Paul Bérenger, Reza Uteem, Adil Ameer Meea et Rajesh Bhagwan, Joanna Bérenger a fait preuve d’une performance remarquable pour une néophyte. Les militants qui l’ont jugée sur son track record, et surtout sur sa pugnacité sur Facebook, croient sans doute dans l’avenir politique de la jeune fille. Dans le contexte d’une alliance future avec le MSM et surtout si Paul Bérenger se retire de la scène partisane, il ne serait nullement surprenant qu’elle soit désignée no 2 de cette alliance, après le leader du MSM.

L’autre performance remarquable à émerger de cette consultation nationale dans les instances du MMM, c’est le rang qu’occupe Satish Boolell, ancien député du no 17 et chef du département médico-légal de la police pendant quelques décennies. Il surclasse Madun Dulloo de 10 votes (275 contre 265) et Ajay Gunness de 23 votes. Au fait, en tenant compte du facteur que Rajesh Bhagwan soit de descendance gujrati et échappe aux catégorisations culturelles normales, il est à noter que Satish Boolell vient largement en tête de tous les élus hindi-speaking au comité central.

Le facteur Satish Boolell invite des réflexions sur la stratégie politique future du MMM. Selon toute évidence, en sponsorisant à la fois Pradeep Jeeha, Ajay Gunness et Madun Dulloo, le MMM avait voulu jouer la carte Vaish. Or, cette option n’a pas été convaincante ces dernières années, encore moins maintenant avec le départ de Pradeep Jeeha, qui a disposé de bien d’atouts.

Dulloo, qui fut pendant longtemps une bête noire du MMM, ayant même acquis le sobriquet de «pagla mamou», n’a jamais émergé comme un notable pouvant créer un impact dans les circonscriptions rurales. Gunness, lui aussi, n’a jamais dépassé le seuil d’apparatchik pour être admis dans le club des grands.

De toute façon, si le MMM entend jouer la carte Vaish, le parti doit go the whole hog comme dirait l’anglais, c’est-à-dire ne pas se contenter de demi-mesures symboliques mais aller jusqu’au bout en présentant un Vaish comme leader du parti et comme futur Premier ministre pour un mandat de cinq ans, comme le feront le MSM et le Parti travailliste. Il est difficile de comprendre comment un candidat limité à un partage du mandat serait aussi attrayant pour une section de l’électorat face au produit proposé par le MSM et le Labour.

La stratégie Vaish du MMM reste problématique car non convaincante et le parti aurait intérêt à envisager une nouvelle approche. Comme il l’avait fait en 1987, avec la candidature de Prem Nababsing. Cette option obtint des résultats positifs malgré la personnalité molle de Nababsing, que Gaëtan Duval qualifia de lapin déguisé en… lapin.

En effet, avec l’option Nababsing, le MMM enregistra une progression par rapport à 1983, quand le MMM présenta Paul Bérenger comme Premier ministre. Le score national du MMM en 1987 fut de 48,12 % de votes recueillies contre 46,4 % en 1983. Qui plus est, alors qu’aucun candidat mauve ne fut élu dans les régions rurales en 1983, par contre, en 1987, Nababsing lui-même et Alan Ganoo furent élus aux nos13 et 14.

 

En éliminant l’option Dulloo ou Gunness, le MMM pourrait envisager une toute nouvelle formule, qui s’ancrerait bien dans un futur Front Bench d’une alliance MSMMMM. En effet, si la performance de Satish Boolell est fortement significative, cette nouvelle carte pourrait bien rapporter des dividendes aux mauves. La personnalité de Satish Boolell est définitivement plus vendable que celle du regretté Nababsing. Sa profession lui a permis d’acquérir un prestige dépassant les clivages politiques.

De plus, en raison de l’engagement de son père dans le mouvement Arya Samaj et dans la gestion du couvent Gayasing, il n’est pas affublé du label élitiste qu’on associe généralement à un Boolell. D’ailleurs, si Paul Bérenger a souhaité un brillant avenir à Arvin Boolell à la tête du Parti travailliste, comment pourrait-il logiquement priver son propre Boolell d’un avancement ?

Puisque logiquement Pravind Jugnauth ne céderait pas l’accessit musulman du Front Bench au MMM, Fazila Jeewa-Daureeawoo serait le no 3, après Joanna Bérenger. Showkutally Soodhun est jugé trop controversable pour ce poste malgré toutes les tentatives de réhabilitation qu’on entreprendrait en sa faveur. En réunissant les composantes «calcutteea» et «gujrati» (elle-même d’ascendance mehman), le no 3 surclasse tous les autres.

Puisque le quatrième siège reviendrait au MMM, le parti devrait ranger au placard ses dinosaures carriéristes et y placer Satish Boolell.