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Ma vie en quarantaine
C’était l’avion de la dernière chance pour beaucoup de Mauriciens coincés en Europe. Le vol MK 053, qui a quitté Heathrow samedi à 15 h 55, a atterri à Maurice hier avec 82 passagers à bord. Mais l’arrivée de ce vol spécial, qui a été autorisé à se poser à l’aéroport Sir Seewoosagur Ramgoolam, n’était que le début d’un long calvaire pour les passagers.
Après avoir pris place dans l’avion, le commandant de bord nous a prévenus, comme il s’agit d’un vol spécial, le service serait donc réduit au strict minimum pour éviter les interactions entre les membres de l’équipage et les passagers. D’ailleurs, le look des hôtesses et stewards, a surpris plus d’un. Finis les coiffures, les uniformes bien repassés ou encore le maquillage impeccable. Désormais, on ne jure que par des combinaisons blanches, gants et masques.
Il a aussi été conseillé aux passagers de ne pas bouger de leurs sièges. D’ailleurs, il semblerait que les Mauriciens à 20 000 pieds du sol assimilent mieux les consignes que ceux qui sont sur terre. Étonnant ! Mais le personnel a été très peu sollicité. Les repas, réduits à une forme simplifiée, n’ont fait broncher personne.
Après 11 heures 30 de voyage et 10 minutes d’attente dans l’avion, nous avons finalement pu débarquer. Prise de température, passage à l’immigration en moins de cinq minutes… Mais après… plus rien !
Nous étions pourtant contents au départ de ce dénouement. Il faut dire que depuis l’annonce de la fermeture des frontières, cela n’a pas été de tout repos à l’étranger. Délivrance ! Nous pouvions finalement rentrer au pays.
Mais là, regroupés dans la salle d’attente de l’aéroport, nous sommes dans une attente infinie. Une dizaine de policiers, assis sur les bancs au milieu des passagers, parlent entre eux. Ils ne savent rien de la situation, sauf qu’ils doivent être là. «Bann gramatin ti atann enn ta mo krwar», dit l’un d’eux. C’est peu dire car à 12 h 30, il y avait encore des «bann gramatin» (ceux qui sont venus de l’Inde et ont atterri à 3 heures du matin) étaient toujours sur le parking de l’aéroport.
Les employés d’Airports of Mauritius Ltd n’en savent pas plus non plus. Eux, ils ont eu pour mission de distribuer des bouteilles d’eau et des sandwiches. La durée de l’attente et les démarches sont loin de leurs préoccupations.
La frustration monte. Personne ne fait d’esclandre, mais la patience arrive à bout. Surtout que les batteries sur les portables commencent à rendre l’âme et sur les quatre prises disponibles dans l’aérogare, il n’y en a qu’un qui marche. Si les plus jeunes profitent du temps pour jouer aux cartes, d’autres ont moins envie de s’amuser. Nous voulons simplement obtenir des informations.
Un des nôtres ne se sent pas bien. Il est évacué dans la discrétion. Mais difficile de faire discret dans un lieu fermé. Un vague de panique s’installe dans le hall. Il était assis où dans l’avion ? Il a les symptômes ? Non rassure-t-on. Il va subir des analyses mais il ne faut surtout pas s’inquiéter. Tout est sous contrôle.
Finalement, c’est un fonctionnaire du ministère de la Santé qui, acculé, est obligé de donner quelques détails sommaires. Il est été encerclé par un groupe dès qu’il quitte son bureau. «Asterla inn gagne plas pou ban kinn vini gramatin. Bé la, bizin koumans rod plas pou zot», dit-il. Mais pas de craintes, L’hôtel Champ de Mars est d’accord pour accueillir des gens. Sauf que la capacité est limitée et il faut maintenant classer les gens par famille afin que tous soient en quarantaine dans le même lieu. Pourquoi ne pas avoir fait les démarches en amont ? Il ne le sait pas, mais promet de revenir avec des réponses.
Finalement, un de ses collègues sort . «Bann gramatin inn allé». Puis, il assure que les chambres sont prêtes. Un accord a été trouvé avec plusieurs hôtels. Mais il y a un manque de personnel pour s’occuper des voyageurs en quarantaine…
Bref, à 14 heures, finalement, nous sommes sommés de nous diriger vers le parking de l’aéroport. Après une heure, nous prenons place à bord d’un vieil autobus. Direction : un centre de quarantaine dans le nord du pays. Lequel ? Aucune idée. Pour le moment…
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