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Politiquons!
Comment se lancer en politique? Faut-il avoir recours à une catapulte ou un simple saut suffit? Quelles sont les qualités requises pour devenir politicien? Quels sont les défauts essentiels à maîtriser?
En feuilletant la 63e édition (avec illustrations) du livre La politique expliquée aux naïfs, j’ai pris conscience que je possédais toutes les aptitudes pour devenir un personnage politique de haute facture. En moins de dix jours, j’avais parfaitement assimilé les préceptes qui devraient désormais me permettre de diriger un peuple :
1) Se déconnecter de la réalité.
Le livre dit que cette qualité est très importante pour se concentrer sur ce qui est important pour soi et ne pas se laisser entraîner dans les préoccupations d’autrui. Rien n’est plus agaçant que les revendications des concitoyens (l’inversion est voulue). Le temps est court entre deux élections, il ne faut pas le gaspiller à tenter d’améliorer la vie de milliers d’inconnus, qui, ingrats, risquent même de ne pas avoir la décence de vous réélire. Si le peuple persiste à se croire malheureux, comparez-le à un peuple encore plus mal loti. Exemple : «Comment osezvous vous plaindre? En Dramasie (inventez, si besoin, un pays), aussitôt sortis de chez eux, les habitants sont systématiquement mangés par des loups!» Ensuite, envoyez une pique au gouvernement précédent : «Souvenez-vous que nos prédécesseurs étaient pour l’introduction en masse du loup dans notre pays!» Enfin, prenez soin de vous déplacer avec une horde de motards, évitez les bains de foule, ne parlez qu’à des membres de votre parti et de temps à autre, apparaissez à la télé pour parler de tout, de rien ou d’un archipel car cela rassure certains de vous savoir en vie.
2) Placer autour de soi des amis proches.
Bien que l’approche des amis proches ne soit pas toujours sans reproche, il est important de les placer à des postes d’où ils pourront veiller au bon déroulement des activités stratégiques. Pourquoi placer des inconnus avec qui il vous faudra faire connaissance alors que vous avez déjà sous la main des gens connus qui vous seront reconnaissants? N’écoutez pas ceux qui diront que c’est du népotisme, ils sont forcément payés par l’opposition. S’entourer de conseillers est essentiel au bon fonctionnement de la bulle dans laquelle vous allez évoluer. Privilégiez l’affection qu’ils vous portent aux compétences qu’ils possèdent. Après tout, un compétent n’est rien d’autre qu’un crétin qui empeste l’atmosphère.
3) Divisez le peuple et l’opposition.
Pour le gouvernant mal aimé, l’union du peuple signifie la fin des haricots ! Il est donc primordial de faire un servicing régulier de ses moteurs à division. Un pays comportant plusieurs communautés ethniques et plusieurs religions est du pain béni pour le dirigeant qui n’aura pas à se fouler la rate pour le fractionner allègrement. Le principe du 364-1 est alors recommandé. Diviser durant 364 jours et rassembler le jour de la fête nationale. Notez bien : il n’est pas nécessaire de fragmenter l’opposition parlementaire, car elle s’autodivise automatiquement.
4) Savoir répondre à une question embarrassante.
Il faut toujours répondre à une question de la presse par une autre question. Exemple de question : «Avec quel argent avezvous acheté votre yacht?» Réponse : «Avez-vous demandé à l’ancien Premier ministre avec quoi il a acheté son jet?» Q : «Pourquoi refusez-vous de parler de votre yacht?» R : «Pourquoi refuse-t-il de parler de son jet?» Etc. Un bon politicien peut tenir des heures à ce jeu-là. Les énergies du sage sont le yin et le yang alors que pour déjouer les attaques des journalistes, le politicien manie le ping et le pong. L’expérience aidant, vous apprendrez à ignorer les journalistes insignifiants et expulser, manu militari, les plus pertinents. Rassurez-vous, au faîte de votre gloire, vous n’aurez plus besoin d’apparaître devant d’autres organes de presse que les vôtres.
Finalement, le bouquin dit que pour réussir son gouvernement, il faut se trouver des partisans prêts à tout pour votre bonheur et vous serez adulé jusqu’au bout de votre mandat par une cour de fins linguistes exclusivement dédiés au lustrage de vos bottes. Alors, seulement vous saisirez pleinement l’adage qui dit :
«Ce qui est chatwa est chamwa.»
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