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L’imposture BoM-MIC
À une récente conférence des banques centrales africaines, la Banque de Maurice (BoM) a repris le mensonge flagrant selon lequel la Mauritius Investment Corporation (MIC) a été financée par les réserves de la BoM, à hauteur de 2 milliards de dollars. Ce canular a pris naissance lors de l’annonce de la création de la MIC le 29 mai 2020, par une déclaration de la BoM que “up to two billion US dollars from the foreign exchange reserves of the Bank will be made available to the MIC”.
La MIC a été créée en vertu des dispositions de l’article 6(1)(y) de la BoM Act, qui donne à la BoM le pouvoir d’investir, avec l’approbation du ministre des Finances, dans une compagnie dans le but de promouvoir le développement économique. En juin 2020, la BoM a constitué la MIC en tant que filiale, avec un investissement en capital de Rs 1 milliard.
La BoM a crédité le compte de dépôt de la MIC d’un montant de Rs 80 milliards dans l’année financière 2020-21, Rs 33 milliards en octobre 20 et Rs 47 milliards en avril 2021. Ce passif de la BoM s’est accompagné d’un nouvel actif au bilan de la BoM, appelé «Deposit for acquisition of MIC shares», qui a été changé en «Equity investment in MIC» en juillet 2021.
La BoM a créé des fonds de Rs 81 Mds pour la MIC en 2020-21 simplement en ajoutant un nouveau poste d’investissement en actions au crédit de son bilan. C’est de la création monétaire pure et simple, et non un financement de la MIC par des réserves de la BoM.
D’ailleurs, les deux derniers rapports annuels de la BoM ne font aucune mention du financement de la MIC par des réserves de change. Dans les notes d’audit des états financiers de la BoM pour l’exercice clos en juin 2021, il est seulement rapporté que “To enable MIC to achieve its objectives, the Bank has disbursed a total amount of Rs80 bn during the financial year. This amount will be used to increase the capital of MIC from Rs1bn to Rs81 bn”.
Le rapport annuel de la MIC ne fait qu’évoquer l’article 46(5) de la BoM Act, comme suit : “The MIC has been established by the Bank under Section 6(1)(y) of the Bank of Mauritius Act and is funded in terms of Section 46(5) thereof.” Cette référence à l’article 46(5) est incorrecte, car il n’y a pas eu de financement de la MIC par les réserves de la BoM.
L’article 46(5) de la BoM Act habilite la BoM à utiliser les réserves de change officielles pour investir dans la MIC, mais seulement si cet investissement n’est pas comptabilisé dans les réserves de change officielles. Conformément à cet article, un financement de USD 2 Mds des réserves officielles à la MIC entraînerait une baisse de réserves de USD 2 Mds.
La BoM est responsable de la gestion et du suivi des réserves de change de Maurice, et publie des données mensuelles sur les réserves internationales officielles brutes (GOIR - Gross Official International Reserves). Les statistiques de la BoM ne reflètent pas de diminution de USD 2 Mds des GOIR en 2020 et 2021. Il n’y a donc pas eu de financement des réserves de change à la MIC. Le déclin des réserves externes en 2022 et 2023 est dû à la demande excédentaire sur le marché de devises, et non à un financement fictif à la MIC.
Discutable, voire invraisemblable
Une autre déclaration de la BoM affirmant que la MIC est en mesure de générer des rendements financiers supérieurs est fort discutable, voire invraisemblable. L’investissement le plus important de la MIC, de Rs 25 Mds dans Airports Holdings Ltd (AHL), décrit par le FMI de financement quasi budgétaire, vise à réduire les gros besoins d’emprunts et le lourd endettement de l’État. Cet investissement dans AHL a déjà subi des pertes de Rs 1,5 milliard en 2021-22, comme indiqué dans le dernier rapport annuel de la BoM (page 109). La MIC pourrait éventuellement s’attendre à une performance financière lamentable, comme en témoignent les nombreux scandales financiers dans les entreprises publiques.
Dans le portefeuille d’investissements de la MIC, les pertes dues à AHL ont été compensées par la réévaluation des actifs fonciers rachetés d’Omnicane, aidée par l’inflation. Cela met en évidence le rôle conflictuel de la BoM dans la lutte contre l’inflation, et renforce la recommandation du FMI à la BoM de renoncer à la MIC pour une meilleure gouvernance monétaire. En attendant, la BoM devrait cesser d’induire le public en erreur sur le financement présumé de la MIC à partir de ses réserves en devises.
Finalement, le discours selon lequel la MIC serait un fonds souverain pour les générations futures est le comble de l’absurdité. La planche à billets de la Banque centrale ne peut servir à établir un fonds souverain. L’excès de création monétaire contribue plutôt à détruire la richesse par la dévaluation de la monnaie et l’inflation.
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