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Souvenirs de l’indépendance Comorienne, 50 ans après

«Ce jour-là, on ne pouvait pas ne pas être plus heureux»

7 juillet 2025, 17:00

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«Ce jour-là, on ne pouvait pas ne pas être plus heureux»

■ Une vue aérienne de Moroni, aux Comores.

Les Comores ont célébré, hier, le 50e anniversaire de leur Indépendance. Trois militants et politiques racontent comment ils ont vécu cette proclamation d’Indépendance, le 6 juillet 1975. Amina Djoussouf avait 25 ans. Elle était militante pour l’Indépendance au sein d’une association étudiante et jeune mariée au futur Premier ministre, Abbas Djoussouf.

Elle se souvient de sa joie :«Je me trouvais chez moi. J’étais là avec mon mari et il y avait justement un député de son parti, le RDPC, qui est venu le voir parce qu’il était convoqué à la Chambre des députés. Je lui ai dit :Mais dépêche-toi, va vite, vite. Tu vas voter pour l’Indépendance. Il est parti tout de suite après. On a écouté la radio et c’était très émouvant d’entendre le discours du président, Ahmed Abdallah. J’étais vraiment heureuse.» Mais même obtenu, les défis restaient nombreux, selon elle qui pointe que cette Indépendance reste inachevée : «Pendant 150 ans, la France est restée ici. On avait un seul lycée pour les quatre îles. Il n’y avait pas de routes, un seul hôpital. L’évolution normale des Comores, c’était l’Indépendance. Bien sûr, quand on nous a dit que c’était une proclamation unilatérale, je savais qu’il faudrait s’attendre à des coups de bâton. C’était un grand défi. La France ne nous a pas fait de cadeau. Il y a eu une déstabilisation permanente avec des coups d’État successifs avec l’implication de la France par le biais de Bob Denard, le fameux mercenaire. Et tant que Mayotte restera sous occupation française, il faudra continuer le combat.»

Ahmed Mohamed Thabit est un ancien militant politique pour l’Indépendance, devenu hautfonctionnaire aux Nations unies et ambassadeur des Comores. Il raconte l’euphorie de ce 6 juillet 1975 : «Moi, je faisais partie d’un parti qui s’appelle Pasoco (parti socialiste des Comores), qui réclamait, qui mobilisait et qui sensibilisait la population pour l’Indépendance. Donc, quand on a appris qu’Ahmed Abdallah allait déclarer l’indépendance à la Chambre des députés, avec enthousiasme, nous sommes allés là-bas. On n’était pas sûr qu’Ahmed Abdallah allait défier la puissance coloniale française et déclarer l’Indépendance.Nous, on était derrière comme observateurs. La Chambre des députés ne pouvait pas contenir tout le monde. Beaucoup de gens étaient à l’extérieur et toute la place était envahie de gens. Vraiment, c’est l’euphorie. Tout le monde était très content. Les gens criaient Indépendance.» Mais cette euphorie a été éphémère puisque la question de Mayotte n’est toujours pas réglée : «Tout de suite après la déclaration unilatérale d’Indépendance, la France reconnaît l’Indépendance des trois îles, sauf Mayotte. La déclaration unilatérale d’Indépendance des Comores a été accueillie par toute l’Afrique et par les Nations unies.Et c’est toujours le cas aujourd’hui.Tous les Comoriens veulent absolument que Mayotte réintègre les Comores.»

Dini Nassur, ingénieur, ancien ministre et écrivain comorien, est installé à Marseille, dans le sud de la France, depuis 2007. Au moment de la proclamation de l’Indépendance, il était lycéen. Depuis un café de la cité phocéenne, il se souvient de ce moment de grande joie : «On est parti devant la Chambre des députés et on a entendu la déclaration d’Indépendance. C’était l’euphorie populaire. On se félicitait, on manifestait. Tout le monde souriait. Ce jour-là, on ne pouvait pas ne pas être plus heureux. Même les gens qui ne se connaissaient pas, ils s’embrassaient, s’étreignaient. Ils se donnaient la main. On est toujours fier de l’avoir fait. On sait qu’en 50 ans, on a fait beaucoup plus que durant les 150 ans de la colonisation.» Il lui reste néanmoins un goût d’inachevé : «Seulement, il y a des problèmes. Du point de vue intégrité territoriale, Mayotte est occupée illégalement par la France. Et là où le bât blesse, c’est qu’on a l’impression que la France n’a aucune intention de négocier alors que pour les Comoriens c’est un combat à gagner et pour le droit international, c’est un vol en quelque sorte.»

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