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En attente de reconnaissance

Champ-de-Mars : Oui, Mais… Au statut de patrimoine national

2 août 2025, 15:00

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Champ-de-Mars : Oui, Mais… Au statut de patrimoine national

■ L’hippodrome de Maurice est le deuxième plus vieux au monde. © Beekash Roopun

Ce n'est pas que l’organisation des courses, qui est revenue sous la cravache du Mauritius Turf Club (MTC). Cela fera bientôt trois mois que le vénérable club a retrouvé la gestion et le contrôle de l’hippodrome aux 213 ans d’histoire.

1812-2025 : après plus de deux siècles d’existence, ne faudrait-il pas classer le Champ-de-Mars patrimoine national ? Santosh Gujadhur, président du MTC, répond : «je suis à 100 % d’accord, aussi longtemps que les restrictions ne nous empêchent pas de nous adonner à notre sport favori. La raison principale pourquoi le Champ-de-Mars devrait être reconnu c’est qu’il est, the second oldest race track in the world. On a vu l’épisode malheureux de ces dernières années, durant lesquelles les lieux s’étaient détériorés». La nouvelle saison de courses démarre aujourd’hui après de nombreux travaux.

C’est le ministère des Arts et de la culture qui a la responsabilité – via le National Heritage Fund (NHF) – du patrimoine national. Une source autorisée indique qu’il y a bien eu une demande pour le classement du Champ-de-Mars, «il y a deux ou trois ans. Mais cela n’a pas abouti. A l’époque, le Champ-de-Mars était sous le contrôle de la Côte d’Or International Racecourse and Entertainment Complex Ltd (COIREC). Il y a eu des soucis à ce niveau». On se souvient que la COIREC avait rapidement obtenu le bail du Champ-de-Mars après que la mairie de PortLouis a résilié le bail du MTC. La page de la COIREC tournée, le MTC est revenu sur ses terres historiques.

«A l’heure actuelle, il n’y a pas de demande», indique-t-on au ministère des Arts et de la culture. «Il faut attendre qu’une demande soit formulée». Est-ce que ce ministère peut prendre l’initiative de classer un site patrimoine national ? Des précédents existent. «Le ministère des Arts serait partant. Auparavant, il faudrait étudier les conditions requises», avance-t-on prudemment.

Quelles sont ces restrictions, qui inspirent des craintes ? Le National Heritage Fund Act, dans la section qui traite d’«ownership of national heritage», prévoit que le propriétaire d’un bien classé patrimoine national doit – avant toute rénovation ou modification – informer par écrit le NHF. Mais surtout que le propriétaire ne peut aller de l’avant avec des travaux, «à moins que le board du NHF, avec l’accord du ministre, n’ait autorisé les altérations ou additions».

Dans l’autre sens, le board du NHF a le pouvoir, selon la loi, de demander au propriétaire d’un bien classé patrimoine national d’«entretenir, de rénover ce patrimoine national». Le NHF est également habilité à mener des inspections, suite à un préavis «raisonnable». La loi prévoit aussi que si un propriétaire n’est pas en mesure d’entretenir le bien classé, une aide peut être décidée par le board. «Toute personne qui fait obstruction aux inspections ou aux travaux de rénovation commet un délit».

SOS Patrimoine en péril

Parmi les voix qui se sont élevées pour réclamer l’inscription du Champ-de-Mars sur la liste du patrimoine national figure l’ONG SOS Patrimoine en péril. Son président Arrmaan Shamachurn a régulièrement adressé des courriers au ministère des Arts à ce sujet. Le plus récent date du 13 juillet dernier. Arrmaan Shamachurn y souligne que, «malgré plusieurs demandes au fil des années, que ce soit auprès du ministère des Arts ou auprès du bureau du Premier ministre, pour que le Champ-de-Mars soit classé patrimoine national, jusqu’à l’heure, nous n’avons pas reçu d’explication valable du non-classement d’un site, qui a une importance historique majeure. Cela en dépit du fait que nous avons mis en avant que ce classement serait un outil pour la préservation de l’intégrité du site».

L’ONG avait réitéré sa demande alors que le MTC avait annoncé des travaux d’amélioration du site, en vue de l’ouverture de la saison des courses qui démarre aujourd’hui. «Nous sommes d’avis que l’inscription du Champ-de-Mars sur la liste du patrimoine national n’est pas compliquée. Cela peut se faire par voie de règlements du ministère des Arts. Dans la tradition populaire, le Champ-de-Mars est déjà un patrimoine, pas seulement en tant qu’hippodrome, mais aussi comme lieu-clé de l’indépendance du pays. Le classement officiel donnerait une valeur ajoutée au Champ-de-Mars».

*** 

Un lieu emblématique qui abrite plusieurs repères historiques

Paradoxe à Port-Louis. Si le Champ-de-Mars n’est pas classé patrimoine national, par contre, il abrite des patrimoines nationaux :

• Le lieu du premier lever de drapeau

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Cette inscription a été annoncée le 10 décembre 2021. Est patrimoine national, l’emplacement du premier lever de drapeau, qui a eu lieu au Champ-de-Mars, le 12 mars 1968.

• La statue du roi Edward VII

Untitled design.png © Tony Fine

Cette statue, datant du début du 20e siècle, est l’œuvre du sculpteur Prosper d’Épinay. Edward VII, fils aîné de la reine Victoria, accéda au trône à l’âge de 60 ans. Il régna de 1901 à 1910.

• Le tombeau Malartic

Untitled design (1).png © Tony Fine

L’imposant monument est un hommage à Anne Joseph Hippolyte de Maurès, comte de Malartic, gouverneur de l’isle de France de 1742 jusqu’à sa mort en service, à Port-Louis, le 28 juillet 1800. Dans son ouvrage de référence consacré à Malartic, Raymond d’Unienville écrit qu’à la mort du gouverneur Malartic,«le corps est d’abord placé dans une première tombe au Champ-de-Mars». La même année, l’Assemblée coloniale décide d’ériger un monument qui «réunit la noblesse et la simplicité» en mémoire de Malartic. Le projet et son exécution sont confiés à l’architecte bordelais Jacques Gastambide. Les travaux commencent en 1801. L’entrepreneur demande que «pour une plus belle perspective, le corps du général Malartic soit transféré à vingt toises plus haut au Champ-de-Mars, observant que l’on s’est concerté avec le clergé pour cette opération (…) Les restes du général sont mis en terre dans une seconde tombe». Le monument reste inachevé. En 1810, les Anglais prennent possession de l’île. En 1842, Sir William Maynard Gomm, lieutenant général devient gouverneur. Son épouse, «Lady Gomm trouva regrettable qu’on laissât inachevé le tombeau de Malartic, éminent prédécesseur de son mari. Elle prit les choses en main en 1846, fit appel à la générosité des colons, établit une liste de dames patronnesses dont elle prit la tête et toutes ensemble, elles organisèrent une kermesse intitulée Bazar Malartic (...) Le Bazar Malartic rapporta en deux journées près de 6 000 piastres et avant la fin de l’année, le tombeau reçu son obélisque».

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