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Rapport de l’audit
Comment une dette Rs 24 millions a grossi à Rs 632 m par négligence
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Rapport de l’audit
Comment une dette Rs 24 millions a grossi à Rs 632 m par négligence
Le litige entre le conseil de district de Rivière-du-Rempart et la compagnie Alphamix a pour toile de fond la construction du marché de Rivière-du-Rempart.
Intérêts mirobolants de Rs 522,1 millions et frais légaux de Rs 25,8 M. Les hommes de loi ayant supposément défendu le conseil de district de Rivière-du-Rempart l’ont tellement mal fait qu’à la fin, ce dernier a dû se tourner vers le ministère des Collectivités locales. Qui a aussi laissé traîner l’affaire ?
Le montant qui était en litige, selon le rapport de l’Audit, est de Rs 23 991 613 entre le conseil de district de Rivière-du-Rempart et le contracteur Alphamix Ltd pour la construction du marché de la localité en 2003. Cela, alors qu’Anwar Husnoo, lui, parlait de Rs 14 052 595 dues à Alphamix et que Soobiraj Ellayah, qui est toujours président du conseil de district de Rivière-du-Rempart, donnait de son côté, le 17 juillet 2017 à l’express, un tout autre chiffre : Rs 8,2 millions. Which is which?
Même si l’on prend le chiffre le plus élevé de Rs 24 millions cité par l’Audit, c’est finalement Rs 632 millions qui ont dû être payées à Alphamix. Ce qui fait probablement de ce bazar de Rivière-du-Rempart le plus cher du monde par mètre carré, concernant tout au moins les intérêts de Rs 522,1 millions qui étaient dus pour retard de paiement, mais aussi pour le montant des honoraires de Rs 19,7 millions payés aux avocats et avoués. Ce montant d’honoraires, précise le bureau de l’Audit, exclut les frais encourus par le bureau de l’Attorney General pour l’appel au Privy Council, qu’il n’a pas donnés. Pourtant, Anwar Husnoo les avait donnés le 20 juin 2023, en réponse à une question de Mahend Gungapersad au Parlement : Rs 6,1 millions. On sait maintenant que les avocats et avoués ont empoché Rs 25,8 millions en tout.
L’Audit explique qu’Alphamix a décidé de se tourner vers la Cour suprême en mars 2010 pour réclamer les Rs 23 991 613 dues. La Cour suprême nomme un arbitre (NdlR, Denis Vellien) qui impose, en juillet 2013, au conseil de district le paiement de Rs 10,35 millions à Alphamix. Toujours selon l’Audit, Denis Vellien est remplacé en février 2015 par un autre arbitre (NdlR, l’ancien juge Benjamin Marie Joseph) qui doit se prononcer maintenant sur une nouvelle réclamation de – tenez-vous bien – Rs 118 millions. Visiblement, Alphamix et le conseil de district ne se retiennent plus devant un arbitre (la Cour suprême s’en est lavé les mains) pour les réclamations les unes plus énormes que les autres. L’Audit ne commente pas cette nouvelle somme de Rs 118 millions. Benjamin Marie Joseph accorde Rs 3,1 millions à Alphamix, plus des intérêts astronomiques de Rs 11,2 millions. Que le conseil de district paie sans rechigner.
En mai 2016, dit l’Audit, le conseil de district est conseillé par ses hommes de loi de réclamer Rs 75,98 millions au ministère des Collectivités locales pour effectuer un autre paiement à Alphamix. Le ministère refuse, le conseil légal a payé on ne sait combien n’ayant servi à rien. Le conseil se retrouve donc avec une dette de Rs 75,98 millions.
Le 23 septembre 2016, Benjamin Marie Joseph accorde Rs 72,9 millions à Alphamix comme «award» supposément final. Le conseil de Rivière-du-Rempart se tourne une nouvelle fois vers son ministère de tutelle qui lui répond d’aller plutôt voir une banque pour un emprunt… La dette reste impayée. Approchée en décembre 2016 par Alphamix, la Cour suprême ordonne le paiement. Le conseil de district s’assoie sur l’ordre. En février 2017, le gouvernement ordonne le non-paiement et demande à l’Attorney General de voir comment éviter de payer. Alphamix veut alors faire saisir les biens du conseil, y compris la Jaguar du président Ellayah et les camions de ramassage d’ordures ménagères. Tentative qui sera cependant déjouée. La somme due de Rs 72,9 millions, plus la TVA de Rs 11 millions, est finalement payée à Alphamix le 30 avril 2018 après de vaines contestations, payantes bien sûr, de la part des hommes et des femmes de loi du conseil.
«Compound interest»
Ce n’est pas fini pour autant car l’arbitre et ex-juge Benjamin Marie Joseph adjuge en mai 2018 la somme faramineuse de Rs 412 millions à Alphamix qui réclamait le paiement de «compound interest» sur cette même somme de Rs 72,9 millions, pour la période allant du 10 octobre 2005 au 3 mai 2018. Étonnamment, l’Audit ne donne pas le taux d’intérêt utilisé que Husnoo a, lui, pourtant communiqué : 15,33 % et quotidiennement compounded.
Un autre paiement de Rs 91,7 millions sera dû à Alphamix. Pourquoi ? L’Audit explique que ces Rs 412 M n’ont pas été payées à Alphamix à la suite d’une énième contestation de la part des hommes de loi du conseil de district auprès de la Cour suprême qui, pour une fois, leur donne raison en décrétant que l’arbitre Benjamin Marie Joseph a adjugé ce paiement à Alphamix le 3 janvier 2019 alors que son mandat vient d’expirer le 31 décembre 2018. Et à Alphamix de faire appel auprès du Privy Council qui renverse, le 5 juin 2023, le jugement de la Cour suprême en donnant raison à Alphamix et en imposant des intérêts additionnels, à taux d’intérêt simple, heureusement, de 3,5 %, au conseil de district de Rivière-du-Rempart jusqu’à la date de paiement le 15 juin 2023. Facture finale: Rs 503,7 millions !
En conclusion, l’Audit recommande qu’il faut désormais inclure l’intérêt applicable pour retard de paiement dans tout contrat. Cela veut-il dire que ce taux exorbitant de 15,33 % et quotidiennement compounded ne figurait pas dans le contrat liant Alphamix au conseil de district de Rivière-du-Rempart ? Il semble que oui. Interrogé par l’Audit, le ministère d’Anwar Husnoo répond: «It is difficult to situate responsibilities on the matter, unless a full-fledged independent enquiry is conducted.» Mais qui demandera une enquête ? Ce gouvernement ? Le prochain, s’il change ? Il en est peu probable lorsque l’on prenne connaissance des noms d’avocats et d’avoués ayant «défendu» le conseil de district de 2005 à 2023. Le Public Account Committee se penchera-t-il sur ce dossier scandaleux puisque même le ministère dit ne pas comprendre ?
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