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Kronik-KC Ranzé

Commisérations en série !

2 février 2025, 04:48

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Commisérations en série !

À force de terroriser ses partenaires, du Canada à l’Union européenne, du Panama au Danemark, du Mexique à la Grande-Bretagne, tout ça au nom de «MAGA», M. Trump et ses conseillers ne réalisent-ils pas qu’ils sont en train de fragiliser, voire carrément fracturer, l’ordre démocratique en faveur de l’ordre autocratique ?

Est-ce qu’ils jugent que cette vision du ‘plus fort’, totalement auto-centrée sur lui-même et ses élites économiques restera valable, même si l’ultime conséquence est d’isoler Washington, avec pour seuls dividendes, quelques gros investissements de corporations étrangères qui ne pourraient se passer du marché américain ? Caché derrière des tarifs élevés, Trump réduira certes ‘son’ déficit commercial avec le reste du monde, une de ses hantises particulières étant que les autres ‘profitent’ ainsi de l’Amérique, mais il incitera aussi tous les pays qu’il intimide et brutalise vers un monde nouveau. Ce dernier sera inévitablement écartelé entre les Etats-Unis d’un côté, les autres démocraties libérales recroquevillées et sur la défensive, les BRICS en expansion qui vont en profiter pour tenter d’accélérer la fin de règne du dollar et, finalement, un solde des ‘populations générales’ qui restent (dont la description se rapprochera d’ailleurs beaucoup de celle décrite dans notre propre système de Best Loser…) ?

Lundi dernier, les Etats-Unis ont sonné le début du nouvel ordre mondial qu’ils entendent dominer. La première victime ? La Colombie qui était menacée de tarifs de 25 %, passant à 50 % sept jours plus tard, si la Colombie ne se pliait pas à la décision unilatérale des Américains de leur renvoyer les Colombiens en situation illégale aux Etats-Unis. La Colombie refusait d’abord de laisser des avions militaires américains débarquer ces ‘illégaux’ à Bogota, disant souhaiter que soit préservée la ‘dignité’ de ses citoyens. La Colombie allait jusqu’à menacer d’imposer un tarif de 50 % sur les importations US – la Colombie étant un des rares pays commercialement déficitaires vis-à-vis des Américains. Cependant, ses exportations américaines représentent tout de même 25 % de son total et moins de 48 heures plus tard, la Maison Blanche annonçait triomphalement que la Colombie acceptait toutes ses conditions et Trump proclamait que désormais les Etats-Unis se feront ‘respecter’.

Ils seront surtout craints…

Le Brésil, le Mexique, le Guatemala, El Salvador se sont pliés jusqu’ici pour les rapatriements. Ces pays sont cependant dans l’arrière-cour de Washington, et les chances sont qu’avec le Honduras et le Venezuela, ils se rapprochent tous de la Chine, ne serait-ce que pour avoir une alternative à un partenaire qui leur assène désormais crûment : «Je décide ce que vous devez faire ! Obéissez, sinon… !». Le Canada, le Mexique, le Panama et la Norvège (pour le Groenland) devront bientôt confronter le nouvel impérialisme américain pour d’autres raisons que l’immigration illégale…

Cependant, le test ultime des rapatriements de Trump surgira sans doute quand il tentera de retourner les immigrants illégaux venus de Chine (ils sont 241 000 !), de Russie ou d’Iran !

Quant à la douzaine de peaux rouges Navajo interpellés lors de raids de déportation divers, qui ne pouvaient montrer des documents de citoyenneté en règle, on peut déjà anticiper la question : «Déporter ? Mettons ! Mais vers où ?»

Ça promet !

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Il est évident que les politiciens trouvent difficile de nommer un Comité de Sélection pour s’assurer que seul le mérite prime pour accéder à des postes nationaux ‘clés’. Ce fut la promesse de Lepep en 2015, notamment à travers l’annonce ‘de bonne volonté’ du ministre des Finances d’alors, Lutchmeenaraidoo, mais deux mandats plus tard, l’idée ne s’était jamais concrétisée. L’Alliance du Changement a annoncé le même genre d’idée, mais pour être réaliste, s’il fallait d’abord trouver une demi-douzaine «d’oiseaux rares» avant d’investir ce comité de ses pouvoirs, le structurer, lui donner les moyens de sa politique, le voir publier les avis de recrutement nécessaires et interviewer les candidats avant de recommander quelqu’un ; on n’aurait probablement toujours personne à l’heure qu’il est pour être ni Gouverneur à la Banque centrale, ni Commissaire de police, ni Attorney General…

Et qui, d’abord, choisirait les ‘oiseaux rares’ de ce Comité ? Le PM lui-même ? Pourraient-ils se prononcer à la fois sur qui serait le plus méritant aux Casernes centrales et à Air Mauritius ?

D’autre part, un nouveau gouvernement, et son leader en particulier, veut sans doute pouvoir nommer des personnes sur qui il peut compter pour suivre sa politique. On peut comprendre cela aussi. Si ce leader est bien avisé, il choisira la compétence et l’intégrité, ce qui lui créera le minimum de problèmes. Le leader qui ne choisira que des yes-men voudra par contre sélectionner des individus qu’il pourra dominer et de qui il pourra tout exiger, ce qui augmente les risques que ça puisse, un jour, lui retourner à la figure.

Il faut donc un compromis pour ce minimum de facteurs, d’autant que le peuple, quant à lui, a des aspirations aussi, notamment celles de s’assurer que ce soient les meilleurs à pouvoir dispenser les services publics qui seront choisis. Je ne crois pas du tout, mais alors PAS DU TOUT, qu’un des critères retenus par la population, dans son ensemble, soit de satisfaire des politiques de quota ethniques, religieux ou castéistes lors de ces nominations. Ce sont là, surtout, des considérations de politiciens ! Quand le robinet coule, que les nids-de-poule sont comblés, que le service de l’hôpital est excellent ; qui se plaindra de ce que ce fut le fait d’un chinois, d’un vaish ou d’un agnostique ?

On peut suivre ces jours-ci, sur YouTube ou C-Span, la manière américaine d’assurer les nominations au sein des divers départements. Il est estimé que 1 200-1 400 postes demandent une ratification par le Sénat. On peut supposer que la vaste majorité de ces postes (par exemple, Wikipédia en identifie 22 pour le seul département de l’Agriculture) ne déclenchent aucune des longues auditions contradictoires et souvent partisanes que l’on voit ces jours-ci.

Les plus sages savent qu’il faut sortir du système actuel où le PM décide seul – la procédure de consultation du leader de l’opposition ayant été largement démonétisée plus récemment. Cela pourrait d’ailleurs faire partie d’une réforme générale qui cesserait de concentrer tous les pouvoirs entre les mains d’un PM tout puissant, ce qui le conduira inévitablement à agir comme un Rex Imperator, avec tous les risques qui s’ensuivent pour le pays. On vient d’en faire l’expérience…

Une formule pourrait requérir que l’on établisse d’abord une liste de postes ‘clés’ (entre 15 et 20 ?) et que le PM propose son candidat à un comité parlementaire de sélection constitué de manière bipartisane et agrémenté de quelques ‘sages’ expérimentés, nommés par le PM. Les nominés du PM seraient alors interrogés publiquement sur leur passé et leurs convictions en toute transparence, avant d’être confirmés ou pas. Les détails restent à élaborer mais l’avantage pour le PM est qu’il ne portera plus désormais seul le poids de ses choix… Et que les hommes valables ne seront plus automatiquement licenciés comme «nominés politiques» à chaque changement de gouvernement. Un peu de continuité aurait aussi ses avantages pour le pays.

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Il y a encore quelques cons qui disent que le State of the Economy n’aurait jamais dû être publié pour ne pas risquer une mauvaise note de Moody’s. Cela aurait pourtant été immoral et aurait mené le gouvernement actuel à partager la responsabilité des mensonges de ses prédécesseurs. Le gouvernement a fait le bon choix et Moody’s a acquiescé.

Néanmoins, la vérité financière est telle qu’il faudra maintenant une politique de consolidation fiscale rapide et crédible. De nombreuses promesses électorales devront être mises de côté. Des taxes devront être envisagées. Certaines ambitions élaborées dans le discours-programme devront être décalées si elles coûtent trop cher (en parlant de quoi, il n’y a aucune ambition de réformer le système de pension ? Ou la CSG (déjà 9 milliards de ‘déficit ‘en 24/25) ? Comment alors réduire les dépenses de manière ‘non-miraculeuse’ ?). La dette gouvernementale actuelle est de 77 % du PIB (v/s 58 % pour les pays comparables). Le déficit budgétaire courant est estimé à 7,6 % du PIB (v/s l’objectif initial de 3,4 % !), mais inclut maintenant les promesses électorales déjà engagées, comme le 14e mois. Les dettes des paraétatiques représentent, à fin juin 2024, 10 % de plus du PIB, soit Rs 70 milliards +, et plus de la moitié est garantie par le gouvernement ! Si les subventions de toutes sortes demeurent, il y aura d’autres déficits à combler (métro, CWA, CEB, STC, NTC, Casinos, Air Mauritius,…)

La fête est terminée. Il y a des ceintures à serrer et du sérieux travail à faire !

Faute de quoi, la perspective ‘négative’ de Moodys pour le pays VA se concrétiser, ce qui serait tout bonnement catastrophique.

La note Moodys maintenue à Baa3 n’est qu’une petite victoire. Le State of the Economy désastreux n’a PAS disparu avec…

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