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Kronik KC Ranzé
Dans la clarté du réel…
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Kronik KC Ranzé
Dans la clarté du réel…
Pour le moment, on ne connaît pas encore toute la vérité sur la situation économique du pays.
Mais, même avant un audit exhaustif, il y a déjà des situations avérées de tripatouillage des chiffres, dans le but de présenter le bilan du gouvernement sortant comme étant meilleur que ce qu’il est. Les Rs 14 milliards de recettes budgétaires ’23-’24 présentés au Parlement qui s’évaporaient, quelques semaines plus tard (*), les recettes de l’offshore appelés à la rescousse pour réduire le déficit de la balance des comptes courants de 12 % à 4,1 % ou pour doper le PIB (**), certains chiffres de croissance à peine crédibles, ont sauté aux yeux ces derniers mois ! L’Alliance du changement, annonçait d’ailleurs, dimanche, des ‘bombes’ lors de son meeting de remerciements… On va enfin connaître la vérité bientôt, une vérité que le gouvernement sortant se serait bien gardé de rendre publique. Il est probable que l’on trouvera pire et qu’il faudra sortir le casque de protection ainsi que… la ceinture.
Ce qui a été rendu visible jusqu’ici c’est que le déficit budgétaire ’23-‘24 est, à 5,4 % au moins, bien plus important que les 3,9 % du PIB présenté au Parlement lors du dernier discours du Budget. Pour ’24-’25, le déficit budgétaire annoncé de 3,4 % serait, finalement plus près de 5,4 %, avant même toute pirouette utilisant les Special Funds, aujourd’hui, d’ailleurs, largement vidés de leurs trésors de départ….
Si le déficit budgétaire empire, et ce avant de facturer toutes les promesses électorales plus récentes, l’endettement public va aussi se détériorer évidemment ! Contrairement à ce que nous présentions à Moody’s et au FMI, la dette nationale ne baisse pas par rapport au PIB. Le chiffre officiel de 75 % aligné lors du dernier discours du Budget est, en fait, déjà à 78 %, et va sans aucun doute se détériorer encore avec les nombreuses promesses électorales à concrétiser.
Parmi celles-ci, nos nouveaux dirigeants ont confirmé le paiement universel d’un 14e mois de folie (Rs 20 milliards pour les salariés et Rs 4 milliards pour les retraités, sans compter les self-employed…) et la baisse du prix de l’essence, on ne sait pas par combien… Qui paiera pour le 14ᵉ mois ? La MRA ? On ne le sait pas à ce stade, mais de nombreuses compagnies ne pourront pas payer ! Moody’s et le FMI, qui vont bientôt nous rendre visite ramèneront sûrement la consolidation financière nécessaire à l’ordre du jour !
Maurice étant Maurice, on va se focaliser sur les tripatouillages, les tripatouilleurs et leur punition et bien moins (ou pas du tout…) sur la vérité économique et ses cruelles conséquences. On le répète depuis des années dans ces colonnes : on vit au-dessus de nos moyens ; nous avons engendré une économie qui n’encourage plus la débrouillardise et l’effort, mais une dépendance de plus en plus inquiétante sur l’état–tétine ; la productivité qui découle de plus d’efforts intelligents et de moins de gaspillages éhontés – on s’en fout ; la bureaucratie envahissante gagne du terrain et étrangle le quotidien (***) ; l’État providence ne cesse de s’étendre et représente aujourd’hui (et surtout demain !), une charge insupportable, que des pays bien plus riches que nous ne peuvent soutenir et, finalement, les ‘trous’ divers dans les finances publiques (****) ne vont pas disparaître parce que nous avons eu la perspicacité nécessaire pour… changer nos dirigeants !
Il sera fort intéressant de voir comment ce nouveau gouvernement va réagir face aux contraintes économiques qui vont être mises à nu sous peu. Il peut choisir la fuite en avant comme ses prédécesseurs, mais cela est improbable. Ils sont quand même plus sérieux. Il peut opter pour l’austérité sévère et la consolidation financière immédiate sur la base des ‘bombes’ économiques qui leur ont été cachées et maintenant léguées. Mais il est probable qu’ils joueront leurs partitions entre ces deux extrêmes, comme suggéré par la décision sur le 14e mois et l’essence. Ils honoreront ainsi en partie leurs promesses, ce qui rendra sans doute aussi le redressement économique du pays plus difficile. Alors que SEULE LA VÉRITÉ TOTALE LIBÈRE ! La Banque mondiale à la rescousse pour des dollars de soutien ?
D’autant que Diego, comme Capri, ça paraît fini pour le moment…
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Monsieur Nad Sivaramen a été accusé d’être un chatwa au motif d’avoir invité le PM sortant, Pravind Jugnauth, à une interview sur lexpress.mu. A mon sens, il n’a fait que son travail de journaliste. Ce n’était certainement pas le ‘Hard Talk’ que souhaitaient ceux qui allaient voter ‘avec rage’ quelques jours plus tard et ce n’était sûrement pas la meilleure version de son journalisme (j’ai plusieurs fois regretté qu’il ne rebondisse pas sur certaines des réponses du PM), mais les questions étaient pertinentes, parfois pointues et les dernières paroles d’un PM en ballotage, sont aujourd’hui ‘on record’ pour la postérité. Ce n’est pas peu ! Ceux qui auront écouté Jugnauth auront été un peu plus informés que les autres et donc plus aptes à finaliser leurs décisions. A voir les résultats définitifs des élections, cette interview n’aura, de toute manière, pas aidé Jugnauth ; lourdement défait par ses actes et ses propres paroles…
Nad avait aussi invité le challenger du PM sortant, Navin Ramgoolam, qui a choisi, en toute liberté, de se faire interviewer ailleurs. Si les résultats électoraux avaient été inversés, l’intervieweur de Ramgoolam aurait-il été catalogué comme le complice et le lèche-botte de circonstance ?
Il est pour le moins rassurant que Navin Ramgoolam soit bien plus près d’être démocrate que ceux qui voudraient «sauver l’express des mains de Nad, le chatwa». Lui, au moins, comprend que l’on ne peut se déclarer démocrate tout en disposant du droit à la parole des autres et en punissant ceux qui en passeraient outre. De toute manière, Ramgoolam parle, semble-t-il librement, à celui que l’on veut cataloguer comme ‘chatwa’ pour toutes sortes de raison, dont la moins glorieuse demeure, peutêtre, le règlement de compte … ?
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Donald J Trump a gagné des élections en 2016 et en 2024 quand il a été le candidat du… ‘changement’. Il a perdu celles de 2020, quand le changement s’appelait Biden, pourtant quatre ans plus âgé, et que celui qu’il fallait changer était lui-même. Kamala Harris n’a tout simplement pas réussi à se distancer suffisamment de Biden pour se proposer comme candidate du renouveau face à un candidat qui voulait pourtant retourner en arrière. Biden aurait définitivement perdu plus sèchement encore que Harris.
Les États-Unis retourneront donc en arrière. Vers le pétrole et le gaz («Drill, baby, drill !»), abandonnant peut-être, si le Elon Musk de Tesla le lui permet, les politiques incitatives de Biden pour passer aux véhicules électriques et aux énergies renouvelables ! Vers le lait non pasteurisé et un scepticisme accru face aux vaccins, qui ont pourtant été un des plus grands succès de santé publique depuis plus de cent ans ! Éliminant jusqu’à 5 millions de mortalités par an découlant de polio, d’hépatite B, de rougeole, de rubéole, de typhoïde, d’encéphalite ou autre. Vers une Amérique plus patriarcale, moins accueillante, plus partisane, plus blanche, plus sexiste et plus raciste. Vers un État moins règlementé, encore moins égalitaire, peut-être plus ‘robber baron’ … Ramasawmy et Musk étant chargés de tronçonner là où il faut dans la bureaucratie, y compris, je suppose, dans les agences de contrôle de leurs propres activités ? Vers un État plus ‘impérial’ qui, sous le couvert d’un jugement de la Cour suprême, accorde l’immunité totale au président pour toute décision prise ‘dans le cadre de ses fonctions’. Décidemment, ça promet !
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Petite suggestion : Aux inaugurations ‘coupe-rubans’, on invite les notables, parfois le constructeur, mais JAMAIS CELUI QUI PAIE, de fait, c.-à-d. le citoyen-contribuable ! Ne pourrait-on pas, désormais, grâce à un tirage au sort au niveau national, municipal ou régional, selon le cas, identifier une famille qui, symboliquement, représenterait à ces inaugurations, ceux dont l’argent a été utilisé ? Ce ne serait que juste ! Cela pourrait même aider, des fois, à réduire la césure béante entre gouvernés et élites gouvernantes… ?
(*) L'express.mu l Faster to disaster
(**) L'express.mu l GDP Overestimation
(***) Par exemple, une épouse qui achète une voiture doit fournir une facture du CEB de moins de trois mois, comme preuve d’adresse. Cette facture étant au nom du mari, il faut soumettre un certificat de… mariage et celui-ci doit aussi être de moins de trois mois aussi pour permettre, je suppose, que la bureaucratie vérifie s’il y a eu divorce ? Et s’ils étaient toujours mariés, mais ne vivaient pas sous le même toit, qui va certifier cela ? Et plus pertinemment, à quoi servent ces ‘certifications’ de plus en plus envahissantes ? La dérèglementation et la libération de l’économie de quelques bonnes dizaines des «Authorities» qui entravent et qui découragent, sont-elles au menu du Changement ? On aurait intérêt à y veiller, loin des motivations exclusivement capitalistes du Trumpisme et avant que le courant ne devienne irréversible et insoutenable pour les citoyens! Qui paient…
(****) L'express.mu l Today is the day ! Aujourd’hui, nous votons !
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