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Arnaque

Dans les filets de charlatans étrangers : La «foi» risque de coûter cher

11 mai 2024, 21:00

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Dans les filets de charlatans étrangers :  La «foi» risque de coûter cher

Une mère de 70 ans ne sait plus à quel saint se vouer. Elle s’est laissé manipuler et a cru qu’on pouvait guérir son fils, dépensant ainsi la somme de Rs 10 000 et remettant des bijoux valant plusieurs milliers de roupies. Des guérisseurs venus d’Inde lui avaient promis que cela ne durerait que trois jours. Les jours ont passé, puis les semaines et après des mois, son fils n’est toujours pas guéri. Les «sorciers» continuent cependant à la rouler dans la farine. Cette habitante des hautes Plaines-Wilhems nous relate sa mésaventure.

La septuagénaire explique que son fils de 53 ans a sombré dans l’alcool, refusant de l’écouter et y dépensait tout son argent. Depuis quelques semaines, il a commencé à consommer de lalkol bleu avec quelques habitants de la localité, mettant ainsi sa santé et son travail en péril. Elle a tout fait pour le ramener à la raison, mais en vain. «Enn zour an oktob, mo pé marsé lor larout royal, enn madam indien inn apros mwa. Linn dir mwa vini li get mo destin. Monn dir li mo pa krwar dan sa bann zafer-la. Linn dir mwa sa pou kout nanié, vini mo gété. Monn alé. Ti éna enn misié ki tinn plas bann koki lor kart ek linn lir mo destin.»

Le «sorcier» lui a ainsi parlé de son fils et que si ce dernier n’abandonne pas la bouteille, il risque d’y laisser la vie. «Bann zafer linn dir mwa ti vré. Mo’nn inpé soké. Ek pou geté, linn pran Rs 200. Linn dir mwa ki pou bizin fer swingn mo zanfan ek li pou bizin vinn kot mwa pou koné kot sa mal-la vini. Mo’nn dir li non mo pa pou aksepté, mo pa krwar ladan», confie Sheila (nom d’emprunt).

Le «travail»

Mais après plusieurs explications, elle se laisse convaincre. Elle leur explique toutefois que son fils ne voudra jamais les laisser s’approcher de lui, ni venir chez elle. «Zot inn dir mwa pa fer nanié, zot pou vini kan li pa la, sonn zot fer zot koné.» Ils s’échangent leurs numéros de téléphone et les guérisseurs lui donnent une liste des choses à acheter.

Effectivement, après quelques jours, alors que son fils s’est rendu au travail, elle les appelle et ils arrivent au bout de quelques heures. «Zot inn vinn a sink. Kouma zot inn ariv divan laport, Guru-la inn koumans tranblé. Li pa pé kapav marsé. Li dir lakour lamem éna problem. Li dir akoz sa mo garson inn tonb dan mové simé. Zot inn rant dan lakaz, inn rant dan lasam mo garson ek zot dir isi mem ki pou bizin fer lapriyer-la parski éna mové kitsoz dan so lasam osi. Zot inn komans plas zot bann zafer ek inn pran enn bol, inn met o milié. Sa bol-la inn koumans tranblé ek inn fer létour lakaz. Mo’nn gagn per parski zamé mo’nn trouv sa dan mo lavi. Zot inn dir mwa gété, lespri-la pé rod sové, zot pé gagn difikilté pou métriz-li. Linn dir mwa si mo pa tir mo garson la dan li pou mor», relate la septuagénaire. Puis, ils expliquent qu’ils ont réussi à retenir cet «esprit».

Ils expliquent également que ce «travail» coûtera Rs 1 million et qu’ils doivent se rendre en Inde, hiberner dans une forêt et tuer plusieurs animaux pour que son fils revienne sur le droit chemin. «Je lui ai dit que je n’avais pas cette somme. Ils m’ont dit que la pension du gouvernement est beaucoup et que je devais réunir la somme si j’aime mon fils. Zot inn dir mwa fer enn zéfor. Ils me manipulaient tellement que j’ai fini par dire que je n’ai que Rs 10 000 qui est à mon fils et ils m’ont demandé de leur remettre cette somme. Ils ont fait le tour de ma maison et ont même ouvert mon réfrigérateur pour se servir. Avant de partir, l’un d’entre eux m’a dit que les Rs 10 000 ne seront pas suffisantes et que je devais leur remettre les bijoux que j’ai. J’ai refusé mais ils ont exigé que je remette les bracelets en or qui valent au moins Rs 400 000 et que j’avais reçus de ma défunte belle-mère, en promettant de me les ramener par la suite», pleure Sheila. Même avec le cœur lourd et rempli de regrets, Sheila garde quand même l’espoir que les guérisseurs parviendront à guérir son fils.

Les jours passent et la septuagénaire continue à y croire. «À chaque fois que je les appelle, ils me disent que le travail avance. L’esprit est tellement dangereux qu’il faut plus de temps. Ils disent qu’en 40 jours, il sera corrigé. Puis en trois mois. Ils disent que je ne dois pas perdre espoir et que j’aurais bientôt droit à un miracle.» Elle se rend plusieurs fois dans leur bureau situé à Vacoas pour les menacer, mais rien ne semble les effrayer. «Dès que j’ai su que beaucoup de gens se sont fait arnaquer, je me suis dit qu’il faut que ça s’arrête», lâche-t-elle. Une autre victime explique qu’après s’être fait berner par ces Indiens, croyant qu’elle retrouverait sa santé, ceux-ci lui ont demandé de prendre un téléphone d’une valeur de Rs 40 000 à crédit, en avançant qu’ils allaient le payer mensuellement.

Ces guérisseurs venus des recoins de l’Inde se sont répandus à Maurice. Ils se sont installés dans différentes parties de l’île, dont Rose-Hill, Goodlands, Quatre-Bornes, Vacoas, Belle-Rose et Flacq. Ils n’hésitent pas à accoster les piétons en leur remettant des dépliants, leur demandant de venir se faire lire le destin. Nous avons appelé leur numéro. La personne qui a répondu a aussitôt déclaré qu’un grave danger nous attend et qu’il faudra qu’on vienne pour une consultation au plus vite.

En février de l’année dernière, huit Indiens d’un groupe se présentant comme Sri Amba Bhavani Astrology, composé de cinq hommes et de trois femmes, sont arrivés à Maurice avec un visa touriste. Ils ont été arrêtés par les officiers de la Passport and Immigration Office. Leur modus operandi était astucieux : ils distribuaient des cartes dans les rues de Quatre-Bornes, informant le public qu’ils pouvaient résoudre beaucoup de problèmes, immobiliers, familiaux, sexuels et financiers. Le meneur, Pandith Durga Prasad, utilisait une technique vieille de 300 ans, selon la carte de visite.

Il n’y a pas que des Indiens

Le 16 avril, alors qu’une habitante de la capitale, âgée de 76 ans, se rendait à Port-Louis, elle a été approchée par trois Chinoises. Elles lui ont fait croire qu’elles avaient le don de lire le destin et que son fils était menacé par un mauvais sort. Pour conjurer ce sort, elles lui ont demandé de leur remettre tout l’argent et les bijoux qu’elle avait. La femme, craignant pour la vie de son fils, a remis la somme de Rs 300 000 ainsi que les bijoux d’une valeur de Rs 400 000, mais les Chinoises lui ont demandé de faire un retrait de Rs 500 000 en plus. Elles lui ont dit que pour conjurer le mauvais sort, il faudrait travailler sur ses biens. Elles ont placé l’argent et les bijoux dans un sac qu’elles lui auraient ensuite remis en lui demandant de l’ouvrir après six jours. Elles lui ont aussi remis une bouteille contenant de l’eau bénite. Mais la femme, soupçonnant les trois femmes, n’a pas cessé de penser à l’incident. Le lendemain, pour en avoir le cœur net, elle a ouvert le sac et a découvert qu’il était rempli de cailloux et de papiers. Elle a rapporté l’affaire au poste de police et le cas a été référé à la Criminal Investigation Division de Port-Louis Sud.