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Incendie suspect au ministère de la Sécurité sociale

Des documents sensibles sur les maisons de retraite réduits en cendres

3 juillet 2025, 07:00

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Des documents sensibles sur les maisons de retraite réduits en cendres

■ Les flammes ont touché une section névralgique du dixième étage du Renganaden Seeneevassen Building, à Port-Louis.

Un incendie s’est déclaré dans les bureaux du ministère de la Sécurité sociale, au Renganaden Seeneevassen Building, à Port-Louis, le matin du lundi 30 juin. Les flammes ont touché une section névralgique du dixième étage, chargée notamment de la supervision des maisons de retraite. Si aucun blessé n’est à déplorer, la destruction de plusieurs documents confidentiels oriente dès les premières heures l’enquête vers une hypothèse de sabotage ciblé.

Le feu, survenu vers 10 h 37, a ravagé des locaux administratifs hébergeant des unités sensibles du ministère. Parmi elles, celles en charge du suivi des établissements pour personnes âgées ainsi que du traitement des demandes de permis. Ce sinistre survient en pleine enquête interne sur de graves irrégularités et l’origine criminelle est désormais sérieusement envisagée. Les services affectés incluent le Home Care Resident Board, responsable de la gestion des résidents pris en charge à domicile, ainsi que le département de délivrance des permis, qui supervise l’enregistrement et le fonctionnement des établissements accueillant des personnes âgées. Ces deux unités ont été placées sous haute surveillance policière depuis les premières constatations.

Un tissu brûlé, retrouvé sur place, a été saisi comme élément de preuve. Des experts de la scène de crime ont effectué des prélèvements, photographies judiciaires à l’appui. Le ministère a immédiatement enclenché des vérifications internes. Le personnel concerné a été invité à fournir des informations sur l’accès aux bureaux sinistrés dans les jours précédant l’incendie. Selon une source au ministère, les flammes ont ciblé deux compartiments métalliques conte- nant des documents confidentiels. «Il ne s’agit pas d’un feu généralisé, mais d’un foyer précis. Cela n’a rien d’un accident de câblage ou de matériel défectueux», a-t-elle affirmé sous anonymat.

Ce sinistre intervient dans un contexte particulièrement tendu. Depuis avril, une enquête interne est en cours au sein du ministère. Elle vise notamment le département de délivrance des permis et l’inspectorat après plusieurs plaintes liées à des négligences présumées dans des maisons de retraite privées. Ces signalements portaient sur des conditions de vie inadaptées, des soupçons d’abus et des manquements graves aux normes d’encadrement.

À cela s’ajoute l’onde de choc encore palpable de l’affaire Fieldview Care Home. Cet établissement illégal situé à Mont-Goût opérait depuis deux ans sans permis avec 43 pensionnaires, dont plusieurs en situation de grande vulnérabilité. Après la saisie de 21 kilos de cannabis par la brigade antidrogue destinés à un résidant innocent dont le nom avait été utilisé en octobre 2024, une cascade de révélations et de drames s’en sont suivis: allégations d’abus sexuels sur des résidentes âgées de 63 et 70 ans, personnel non qualifié, complicité présumée de fonctionnaires et absence d’action malgré des signalements dès 2021.

Fermée en mai 2025, la maison de retraite avait été au centre de plusieurs enquêtes ouvertes par la Central Criminal Investigation Division et la Financial Crimes Commission. Certains documents relatifs à cette affaire auraient transité par les services touchés par l’incendie, ce qui renforce l’hypothèse d’une tentative de destruction de preuves.

Un feu qui derange

Plusieurs sources proches du dossier parlent d’un événement «inquiétant», qui pourrait être une manœuvre délibérée de brouiller les pistes ou de ralentir les investigations en cours. La coïncidence entre l’ouverture d’une enquête interne sur la gestion des maisons de retraite et l’incendie de ces bureaux précis n’a échappé à personne. D’autant plus que certaines voix au sein de l’administration affirment que des audits prévus cette semaine devaient cibler directement ces services.

Pour l’heure, aucun lien formel n’a été établi avec l’affaire Fieldview, mais la convergence des faits suscite un fort malaise. Le ministère de la Sécurité sociale, déjà critiqué pour ses failles de supervision, se retrouve une nouvelle fois sur la sellette. L’enquête policière est en cours. L’hypothèse criminelle est active- ment examinée. Les responsabilités, si elles sont établies, pourraient atteindre plusieurs niveaux de l’administration.

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