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Femme née dans un corps d’homme
«Désormais, je serai officiellement "LINZY"»
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Femme née dans un corps d’homme
«Désormais, je serai officiellement "LINZY"»
Au niveau de l’état civil, son prénom officiel deviendra prochainement Linzy. Aidée par PILS, chez qui elle est engagée comme volontaire, elle a entrepris des démarches pour un Change of Name officiel en ce sens. Cette démarche administrative, dit celle qui est âgée de 34 ans, la mettra en phase avec qui elle est : une femme transgenre. Femme qui est née dans un corps d’homme. Linzy explique cette décision, la discrimination qu’elle a vécue et les étapes qui l’ont aidée à s’assumer pour trouver sa place en société.
En cette fin d’après-midi, son grand sourire est aussi radieux que le soleil qui éclaire la cour familiale de Pailles. Personnage populaire de son quartier, elle salue les voisines qui passent devant son portail en prenant de leurs nouvelles. Quant à elle, ces jours-ci, elle est animée par un partage d’émotions: le bonheur de voir les choses enfin avancer, l’angoisse de l’attente, l’impatience que tout soit rapidement terminé. Une fois que les démarches pour que son Change of Name auront abouti, «Linzy» ne sera plus son sobriquet. À 34 ans, ce sera son prénom officiel. Au niveau de l’état civil et dans sa vie, elle effacera définitivement le prénom masculin qui lui avait été donné à sa naissance et qui n’était plus en phase avec elle : «Depuis longtemps, j’ai pris conscience que je suis une femme qui est née dans un corps d’homme. Je m’assume entièrement transgenre.» Officiellement, elle deviendra Marie Linzy Queendela Joseph. «Je sentirai que mon nom est enfin en phase avec qui je suis.Ce sera comme une renaissance.» Aidée par Prévention Information Lutte contre le SIDA (PILS) où elle est engagée comme volontaire, elle a déjà avancé dans les démarches administratives qui sont en attente d’être finalisées.
Linzy. Ce prénom, elle l’a adopté vers ses 23 ans lorsqu’elle s’était inscrite sur les réseaux sociaux. Elle prenait aussi la décision de s’assumer publiquement comme femme transgenre et d’aller par-delà les préjugés. « Autour de moi, je voyais beaucoup de transgenres qui optaient publiquement pour un prénom féminin. Je me suis dit qu’il était aussi temps pour moi d’assumer qui je suis et comment je me ressens.» Depuis, c’est ainsi qu’elle est connue : «Quand on m’appelle par mon nom masculin, cela me dérange énormément.»
Née d’une fratrie de six enfants à Grande-Rivière, Linzy avait dix ans lorsqu’elle a pris conscience qu’elle était différente. «J’étais attirée par les choses qui concernent les filles, les jouets, les jeux, les vêtements. Je ne fréquentais que des filles et les jeux des garçons ne m’intéressaient pas. J’ai commencé à prendre conscience de ça. Parfois cela me faisait un peu peur parce que je ne savais pas pourquoi les choses étaient ainsi pour moi.»
Cette différence, son entourage la comprend aussi. Si les siens et ses proches l’encadrent, dans la rue, les moqueries, les agressions débutent vers ses 15 ans. «Les gens m’invectivaient, m’insultaient et me lançaient des commentaires pour rien. Une fois, quelqu’un m’a même lancé des pierres.» Linzy prend conscience que son parcours dans la vie sera semé d’embûches. Il y a aussi eu d’autres formes de violences sur lesquelles elle préfère ne plus s’appesantir. «Je n’avais pas tout raconté à mes proches pour que cela ne les affecte pas. J’avais développé un traumatisme. J’avais peur, j’avais mal. J’ai dû apprendre à me mettre debout.J’ai commencé à m’endurcir, à me construire une carapace pour me protéger.»
Cet après-midi, elle a les cheveux attachés en queue de cheval. Du vernis foncé sur les ongles et les orteils, un léger maquillage, Linzy prend toujours soin d’être bien présentée. «Ma couleur préférée c’est le rouge. J’aime être bien habillée quand je sors», lance-t-elle en riant. Sa coquetterie, son air enjoué, ses muscles saillants, son grand gabarit, participent à la démarquer. «Jusqu’aujourd’hui il y a toujours des gens qui se moquent ou qui lancent des quolibets. Mais désormais, je ne les entends plus, je ne leur accorde aucune considération. S’ils ont du temps à perdre avec moi, tant pis pour eux. Moi, je continue ma route en écoutant ma musique.»
Dans son cheminement, elle a reçu plusieurs formations pour qu’elle se comprenne et qu’elle prenne confiance en elle. Vers 18 ans, elle a commencé à participer aux ateliers organisés par PILS, VISA G et d’autres organismes engagés dans les droits et la santé sexuelle. «Ces formations m’ont aidée à mieux voir les choses. Je me suis mieux comprise en tant que transgenre. J’ai aussi compris les enjeux entourant la communauté LGBTI. Cela m’a aidée à me responsabiliser dans mes choix et dans mon rôle.»
De là, lui est venu le déclic pour qu’elle s’engage auprès des personnes en situation de vulnérabilité. «Malgré tout, j’ai aussi vécu la discrimination et la stigmatisation à cause de ma différence. Cela m’a poussée à vouloir aider d’autres personnes pour qu’elles ne subissent pas la même chose. Je participe à des sessions de formation et de sensibilisation. J’accompagne aussi des personnes qui sont touchées par les fléaux pour les aider à prendre leur vie en main.» C’est cette motivation qui l’a conduite à s’engager au sein de PILS où elle soutient des personnes infectées et affectées par le VIH et d’autres complications.
La pâtisserie est une de ses grandes passions. Si ses gâteaux sont réputés, elle n’a jamais pensé en faire un métier. Entre-temps, elle a cumulé plusieurs métiers pour gagner sa vie : danseuse de séga à l’hôtel, garde-malade, baby-sitter, femme de ménage, entre autres.
En société, ce changement de nom suscitera moins de complications et de situations embarrassantes, explique-t-elle. Soutenue par PILS dans ses démarches, elle est passée par les procédures habituelles pour ce changement à l’état civil. Le seul retard est venu du fait qu’il fallait aussi la présence de ses parents à une étape alors que ces derniers n’étaient pas forcément libres. Mais finalement, les choses ont avancé.
Interrompant momentanément la conversation, sa mère fait son entrée dans la pièce pour s’enquérir du sujet de la conversation et demande : «Estce que c’est pour l’interviewer afin qu’elle puisse partir à l’étranger ? J’aurais voulu qu’elle ait la chance de partir. Ailleurs, elle sera mieux qu’ici». Partir, c’est aussi un des rêves de Linzy. Elle espère trouver plus d’opportunités à l’étranger, être confrontée à moins d’intolérance et jouir d’une plus grande liberté dans ses droits. «À Maurice, par exemple, le mariage m’est interdit. Il y a beaucoup de trans qui rêvent de vivre officiellement en couple et de fonder un foyer. Mais, la loi ne le permet pas. Il y a encore des choses à changer dans la législation comme dans les mentalités.»
Les regards, le jugement, l’intolérance provoquent au quotidien de vrais drames chez les transgenres témoigne-t-elle. «À cause de ce mal-être elles sont nombreuses à se tourner vers les produits pour se retrouver davantage dans la précarité et la vulnérabilité. Si les gens pouvaient prendre conscience du tort qu’ils provoquent, ils changeraient d’attitude et permettraient à tous de vivre normalement.» Aux jeunes frappés par ces situations, Linzy a un appel : «Soyez courageuses. Ne baissez pas les bras. Demandez de l’aide et faites-vous encadrer. Ne subissez pas dans le silence.»
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