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Violence domestique
Deux récits, d’un homme et d’une femme, un seul cri de cœur
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Violence domestique
Deux récits, d’un homme et d’une femme, un seul cri de cœur
[Photo d'illustration]
Deux personnes, deux récits, un dilemme : surmonter la violence domestique. La problématique est à nouveau au cœur de l’actualité cette semaine. 8 600 cas et sept homicides perpétrés par des conjoints, enregistrés en 2022. De janvier au 31 octobre 2023, il y a eu quatre homicides commis par des conjoints. Le «rapid response system» pour les victimes a enregistré 3 351 alertes de panique à ce jour. Chaque victime témoigne de sa propre expérience qui va au-delà des normes sociales et du genre. Récits de deux personnes qui se sont confiées à nous sous couvert d’anonymat. Nous les appellerons Nathalie et Dilen.
Nathalie, 32 ans, vient de donner naissance à son troisième enfant il y a quelques semaines, après avoir été accueillie dans une organisation non gouvernementale (ONG) avec ses deux autres enfants. «Mon père était alcoolique. J’ai abandonné ma scolarité pour travailler. À 18 ans, je me suis enfuie de chez moi» , confie-t-elle. Nathalie rencontrera bientôt son grand amour, qu’elle épousera et avec qui elle aura deux enfants. Mais son époux tombera dans le piège de la drogue.
Cette mère de famille loue immédiatement une maison et s’y installe séparément avec ses deux enfants, travaillant dur pour les élever. Parallèlement, elle rétablit les relations rompues avec sa mère et ses sœurs, qui la soutiennent. Avec le temps, Nathalie rencontre un autre homme avec lequel elle rêve de construire sa vie. Cette fois, pour le meilleur. Mais cette nouvelle relation va bientôt devenir un cauchemar lorsque son compagnon se met à l’agresser verbalement. «(...) Jurons et menaces. Ensuite, il implorait le pardon, en disant qu’il avait agi sous la colère et qu’il n’avait jamais rien voulu dire de tout cela. J’étais amoureuse; je lui pardonnais à chaque fois. Je ne me rendais pas compte que mes enfants étaient traumatisés.»
La situation empire entre Nathalie et son partenaire lorsque ce dernier lui inflige des violences physiques. «Nous sommes allés à la plage en couple, un soir, lorsque nous avons appris que j’étais enceinte de lui. Sous l’influence de l’alcool, il a proféré des insultes à l’égard de mes deux enfants et je l’ai interrompu. Il m’a violemment jetée au sol, ayant reçu un coup violent à la tête. Tout en sachant que je portais son bébé.»
«Êtes-vous parvenu à vous rendre à l’hôpital ?» , a-t-on voulu savoir. «(...) Nous sommes rentrés à la maison et je suis restée enfermée dans la chambre, avec des blessures, pendant deux jours. Lorsque ma sœur est venue me voir et a constaté mon état, mon compagnon a été contraint de m’emmener à l’hôpital» , raconte Nathalie.
Par ailleurs, le compagnon de Nathalie est rentré à la maison un jour, furieux, avec un couteau pour la poignarder au ventre. «Mes enfants ont couru chez les voisins qui ont appelé la police. Je me suis cachée dans une armoire jusqu’à ce que la police me secoure. J’ai alors compris qu’il fallait que je m’en aille pour de bon.» Grâce au conseil de ses proches, Nathalie a finalement contacté une ONG pour se mettre à l’abri. Après plusieurs comparutions devant le tribunal, elle a obtenu un «protection order». Ses enfants étant relativement bien placés et bénéficiant d’une structure de soutien adéquate, Nathalie a récemment donné naissance à une petite fille qui est en bonne santé, et elle souhaite bientôt chercher un nouvel emploi. La leçon à tirer, confie-t-elle, est que les femmes doivent savoir reconnaître les signes à temps. «N’attendez pas que la violence devienne physique ou brutale. Partez avant qu’il ne soit trop tard.»
Difficultés des hommes victimes
Bien que le nombre de cas rapportés soit nettement inférieur, la violence domestique touche aussi les hommes, de manière bien réelle. Selon Statistics Mauritius, 17,9 % de l’ensemble des victimes de violence domestique étaient des hommes l’année dernière. Ce chiffre était de 13,3 % en 2021. «Malgré le fait que les stéréotypes traditionnels soient de plus en plus désuets de nos jours, nos institutions et nos lois n’ont définitivement pas su s’adapter à la révolution sociétale», confie Dilen, père de deux enfants qui s’est séparé de son épouse en 2020 après 12 ans de mariage, en raison de conflits sérieux.
«Je savais qu’elle avait elle-même subi des abus et des traumatismes dans son enfance. Tout allait bien jusqu’à la naissance de notre deuxième enfant, lorsqu’elle a souffert d’une grave dépression post-partum. Après la maternité, notre dynamique a connu beaucoup de changements, et son comportement est devenu hystérique. Malgré ses provocations, je ne l’ai jamais frappée en retour pour me défendre. Au contraire, je quittais temporairement la maison pour éviter les conflits…»
Cependant, Dilen raconte : «Mon épouse a éventuellement réclamé le divorce et, pour consolider sa cause, elle a demandé un protection order et la garde de mes deux enfants. (...) Je me suis retrouvé du jour au lendemain à me débattre dans trois batailles juridiques. Bien que j’aie le droit de rendre visite à mes enfants tous les samedis, la famille de ma femme m’empêche de les voir. J’avais l’habitude d’encadrer mes enfants pour les cours de natation et les leçons académiques, et leurs performances scolaires ont chuté parce que leur vie est perturbée en mon absence. Cela fait plus de deux ans que je n’ai pas pu passer du temps avec mes enfants alors que je les conduisais tous les jours à l’école. C’est très dur.»
Alors que les batailles se poursuivent en justice, Dilen fait part des préjugés auxquels il est confronté quotidiennement en tant que père et homme victime. *«Il faut souvent se déplacer en cour au lieu de travail. (...) Vos enfants sont utilisés comme arme contre vous dans une affaire pour que votre conjointe abuseuse semble être une victime. En raison des préjugés inhérents à nos institutions et à nos cadres politiques, les hommes sont toujours considérés comme des agresseurs et les femmes comme des victimes. De plus, la garde partagée n’existe pas dans notre Code civil, et les hommes doivent dépenser beaucoup d’argent pour passer deux heures par semaine avec leurs enfants. Beaucoup est fait pour protéger la femme alors que l’homme souffre en silence.»
Dans une étude intitulée «Barriers to Men’s Help Seeking for Intimate Partner Violence», publiée en 2022, les auteurs notent que le récit dominant selon lequel les hommes sont les agresseurs et les femmes les victimes semble avoir créé une myopie dans laquelle les personnes qui ne correspondent pas au récit standard sont discréditées. «...Men’s attempts to seek help led to them being dismissed as liars, unfit fathers or the ‘real’ abuser, a shocking indictment for any society that claims to be egalitarian», souligne cette étude.
«Le concept de ‘spousal retaliation using the child as a weapon’ doit être inclus dans la définition de violence domestique afin que les enfants ne soient plus utilisés comme des armes. (...) Beaucoup d’hommes sont victimes de ce cercle vicieux et certains finissent même par se suicider», affirme Dilen.
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