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Drains: Bobby Hurreeram remet les chiffres de l’Audit en question
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Drains: Bobby Hurreeram remet les chiffres de l’Audit en question
Pravind Jugnauth et Bobby Hurreeram, notamment, lors d’une visite au Ruisseau du Pouce, le 8 avril.
Le ministre des Infrastructures nationales a encore une fois tout mis en oeuvre pour éviter de répondre aux questions précises, en inondant Shakeel Mohamed de listes et de chiffres qui bien souvent n’avaient pas grand-chose à faire avec la Private Notice Question (PNQ)… Suite aux inondations du 15 janvier et du 21 avril, le leader de l’opposition voulait pourtant tout simplement connaître le nombre de projets de drains qui sont en chantier et ceux qui ont été complétés avec les dates, les coûts, ainsi que les noms des constructeurs choisis, et plus généralement tous les projets y compris ceux autour du Ruisseau du Pouce, Mgr Leen, Canal Dayot, La Butte, Les Salines, la Place d’Armes et le Caudan. Il voulait aussi savoir ce que compte faire le gouvernement pour éviter d’autres inondations et enfin, si les autorités comptent mettre sur pied un «complaints desk» et une procédure accélérée pour compenser les victimes.
Le ministre Bobby Hurreeram a commencé son discours en jetant tout le blâme – il fallait s’y attendre – sur le changement climatique. Sentant que le ministre allait faire une longue péroraison, Shakeel Mohamed devait demander au speaker de veiller à ce que Hurreeram ne fasse pas perdre son temps l’Assemblée nationale. Visiblement irrité par cette remarque, Sooroojdev Phokeer devait répondre sèchement : «I disregard your remark.»
«Thank you, Mister speaker sir», se ragaillardit Hurreeram, qui prendra 26 minutes pour énumérer en détail tous les drains, ponts et autres infrastructures qui ont été construits, démolis, reconstruits ou dont les travaux sont en cours. Tout comme il l’avait fait à plusieurs reprises dans le passé. Il donnera ensuite, tel Husnoo – ou «Monsieur Météo» – la liste de la pluviométrie dans une dizaine de localités et ce pour le 15 janvier et le 21 avril…
Zones inondables
Hurreeram communique alors en partie sur ce qu’a demandé Shakeel Mohamed : 1 742 projets de drains ont été engagés, étalés sur cinq ans, et 539 seulement ont été complétés, au coût de Rs 3,8 milliards ; 114 au coût de Rs 3,3 milliards sont en chantier et 150 projets pour un montant de Rs 2,8 milliards sont à l’étape d’appel d’offres. Tout en faisant remarquer que les seuls 34 projets qui ont été «mal rapportés» sont en fait de nouveaux projets pour 2022-2023 engagés par la National Development Unit. «‘Mal rapportés’ par le bureau de l’Audit ?» enchaîne Shakeel Mohamed peu après. Le ministre éludera la question en s’embarquant dans une répétition – presque mot pour mot – de ce qu’il venait de dire. Bobby Hurreeram donnera une information importante dans la foulée : 306 zones inondables ont été identifiées, dont 62 sont à haut risque. Il n’a pas promis de déposer cette liste tant attendue…
S’ensuit alors une autre longue énumération de travaux projetés rien que pour Port-Louis : démolition et reconstruction de ponts, de murs de soutènement, constructions de drains et les fameux «desilting» ou nettoyages de rivières. Et d’ajouter que les mesures du gouvernement ont permis de faire en sorte que le Caudan soit «moins inondé» le 21 avril 2024, avec 200 mm de «flood mark» contre 900 mm au même endroit le 30 mars 2013. Mais il ne compare pas les taux de pluviométrie. Si Bobby Hurreeram s’est attardé sur de longues listes de travaux, il ne donnera pas celle des constructeurs ni le montant des contrats, promettant de déposer cela sur la table de l’Assemblée nationale.
Bobby Hurreeram rappelle encore une fois qu’il n’est pas possible de faire disparaître les inondations. Ces Rs 11,7 milliards consacrées rien qu’aux drains ne sont que des mesures d’atténuation. Pour se justifier encore, le ministre parle de problèmes d’acquisition des terres pour l’installation de drains, des retards dans les appels d’offres etc. Et d’annoncer des mesures «innovatrices» comme les bassins de rétention ou des drains verts (NdlR, les swales). Cependant, il ne dit pas où et quand ces projets verront le jour. Le ministre s’auto-congratulera en affirmant que les projets du gouvernement portent déjà leurs fruits, comme à Quatre-Bornes, où malgré 102 mm de pluie enregistrés, il n’y a pas eu d’inondation le 21 avril… Il venait pourtant lui-même d’affirmer qu’en janvier, 164,6 mm de pluie s’étaient abattus sur la ville des fleurs… Surprise : le speaker l’arrêtera pour lui demander de s’en tenir aux lieux concernés par la PNQ.
Taisez-vous !
Las d’attendre cependant, Shakeel Mohamed proteste : «Le ministre a pris 23 minutes pour répondre. M’accorderez-vous du temps additionnel pour poser mes cinq questions supplémentaires ?» Sooroojdev Phokeer n’est pas content et engage une longue discussion avec le leader de l’opposition, lui demandant de dire d’abord s’il s’agit d’un point d’ordre. Et lorsque Mohamed répond par l’affirmative, il dégaine : «Taisez-vous et laissez le ministre terminer…» Hurreeram continue alors sur sa lancée avant de répondre à la question relative aux compensations : «Il y a eu 735 demandes. Nous accorderons aussi des soutiens additionnels.» Ces demandes seront-elles traitées en urgence ? «L’honorable Premier ministre a visité les victimes personnellement. Il n’y a pas plus fast-track que cela», fait alors valoir Bobby Hurreeram. Qui en profitera pour faire de la politique : «Qu’on se rassemble tous derrière le PM et le gouvernement pour lutter contre le changement climatique. Ne faisons pas de la basse politique, comme des vautours, sur le malheur des gens.»
Shakeel Mohamed demande encore une fois du temps additionnel après les 27 minutes sur les 30 utilisées par Hurreeram. «Non», répond le speaker. Le leader de l’opposition n’aura pas non plus de réponse concernant le rapport de l’Audit que Hurreeram semblait blâmer. Ce dernier n’aura pas à s’excuser non plus pour les dégâts causés à la maison de la famille Ramsahye, à Tranquebar, notamment, comme le réclamait Shakeel Mohamed. Ainsi en a décidé le speaker…
Hurreeram donnera toutefois une réponse directe : il n’a jamais reçu la lettre d’Osman Mahomed. Quant aux cas de négligences éventuelles dans ce dossier, le ministre annonce la création d’un… comité, chargé «d’enquêter sur les responsabilités. Et comme il y aura surement un procès, [je] n’en dirai pas plus». «Time over», lance finalement le speaker alors que le leader de l’opposition s’apprêtait à poser sa troisième question supplémentaire.
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