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Élections générales : aucun des trois ne peut perdre !

16 août 2024, 10:00

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Élections générales : aucun des trois ne peut perdre !

Le ton entre les deux principaux blocs est déjà acrimonieux. Mais cela va empirer au fil des jours menant aux prochaines élections générales. Pour cause : au moins trois dirigeants ne peuvent pas se permettre une défaite. Sinon leur monde s’écroulera et l’histoire retiendra.

Après deux défaites consécutives, au no 5 en 2014 et au no 10 en 2019, Navin Ramgoolam, qui reste aux commandes de son parti, ne pourra plus, logiquement parlant, s’accrocher au leadership en cas d’une nouvelle débâcle. Il a connu une longue traversée du désert depuis dix ans, s’est rendu une multitude de fois aux Casernes centrales et en cour de justice et n’a pu voyager qu’une seule fois (quand il est allé se faire soigner en Inde). S’il a pu, avec son panel d’avocats, faire tomber les neuf charges retenues contre lui, il reste toujours empêtré dans l’affaire des Rs 200 millions/coffres forts, à la suite d’un appel logé par le bureau du DPP. Ce qui handicape considérablement le financement de son parti, dont il détenait les fonds des mystérieux donateurs.

De nouveau en duo avec le leader du MMM, qui l’avait tenu responsable pour la défaite de 2014, Ramgoolam veut tourner la page en s’affichant cette foisci ouvertement comme éventuel Premier ministre pour les cinq ans du mandat. Pas question de partage de pouvoir. Il va régner en maître et s’est assuré 35 tickets pour son camp. Il aura la lourde tâche de répartir les 25 tickets entre le MMM, les Nouveaux Démocrates et probablement Rezistanz ek Alternativ, qui a soumis son programme électoral à Ramgoolam et Bérenger, qui n’ont eux-mêmes pas encore finalisé le leur, ni leur liste de candidats. Ramgoolam n’a pas encore confirmé s’il reste au no 10 ou s’il fera son come-back au no 5. Ramgoolam a promis de faire mentir l’adage – jamais deux sans trois défaites – d’où son extrême prudence à révéler son plan avant qu’il ne soit fixé lui-même...

Pour des raisons personnelles, Paul Bérenger est le plus vocal de ceux qui critiquent Xavier-Luc Duval et son fils depuis que le leader des Bleus a quitté l’alliance PTr-MMM-PMSD sur un désaccord à propos du nombre de tickets, entre autres. Comme Ramgoolam, Paul Bérenger accumule les défaites électorales. En fait, le MMM, mené depuis toujours par ce dernier, n’a pas été au pouvoir depuis 2005, année où il a essayé de conserver son siège comme Premier ministre, avec pour adjoint... Pravind Jugnauth, alors son «petit frère». Mais les Mauriciens n’en ont pas voulu ; le tandem s’est alors décomposé.

Après la chute de 2005, les Mauriciens n’ont pas voulu de Paul Bérenger ou de ses alliances en 2010, 2014 et 2019 ! Cela fait donc 20 ans que Paul Bérenger court inlassablement derrière le pouvoir. Mais il maintient, à chaque fois, des clichés du genre, «ce sera une année décisive» ou «enough is enough». Après les législatives de 2019, Bérenger a même tenté de virer Navin Ramgoolam à la tête du Parti travailliste avec le soutien de Xavier-Luc Duval, Roshi Bhadain et... Nando Bodha (qui s’est fait embobiner par le leader mauve qui lui a fait croire qu’il était un PM potentiel). Mais Ramgoolam ne s’est pas laissé faire et a rugi une ou deux fois. Paul Bérenger a alors compris qu’il n’avait pas d’autre choix : il fallait jeter Bodha comme une vieille chaussette et s’agripper à nouveau au pantalon de Navin Ramgoolam.

Et puis il y a celui qui détient le pouvoir : Pravind Jugnauth, qui conserverait 40 tickets pour le MSM. Conscient qu’après deux mandats du MSM, l’usure du pouvoir est bien réelle. Surtout après plusieurs scandales politiques. Alors pour présenter un visage new-look, il envisage de faire du neuf autour de lui. Plusieurs de ses ministres n’auront pas de ticket cette fois-ci, dit-on au Sun Trust. Il a aussi tenté de casser le momentum de l’opposition parlementaire en faisant les yeux doux au leader du PMSD qui ne pouvait pas finaliser un accord avec Ramgoolam et Bérenger. En cassant le bloc, il a réussi à se faire quelque peu oublier par ses deux adversaires qui ont eu tendance jusqu’ici à focaliser leurs tirs sur les Duval, comme on l’a constaté au Parlement et au meeting de La Louise dimanche dernier.

En plaçant Adrien Duval dans le fauteuil de speaker, Pravind Jugnauth a enlevé l’épine Sooroojdev Phokeer de son pied (certes après l’avoir bien utilisé pour casser les opposants parlementaires) et créé les conditions pour accueillir à bras ouverts l’ancien leader de l’opposition qui pourrait obtenir 13 tickets (soit six de plus qu’il n’aurait eu en s’associant au tandem Ramgoolam-Bérenger). Pravind Jugnauth et Xavier-Luc Duval, rompus à l’exercice du pouvoir, comme leurs rivaux du reste, ont l’avantage de l’âge sur les leaders rouge et mauve. Cependant, contrairement aux États-Unis, l’âge de nos dirigeants ne fait pas débat chez nous, sauf quand SAJ s’était retiré en 2017 pour céder la place à son fils, après 18 ans à la tête du pays.

En raison du traitement qu’aura subi Navin Ramgoolam, dont la maison a été perquisitionnée et les coffres-forts saisis en février 2015, Pravind Jugnauth pourrait redouter que son challenger, s’il reprend le pouvoir, pourrait lui faire la même chose puisque la ligne rouge contre un ancien PM a déjà été franchie... D’où le fait qu’une défaite n’est pas envisageable pour la dynastie Jugnauth qui ne veut pas finir aux Casernes centrales, où DIP ne sera plus en service. Il va alors tout faire pour que Ramgoolam et Bérenger enregistrent leur énième – et peut-être dernière – débâcle électorale. Pour réussir, tous les moyens sont bons, tous les coups seront permis, d’un côté comme de l’autre.