Au détour d’une ruelle, au milieu des grands bâtiments et du bruit de la capitale, se trouve la humble demeure d’une vieille dame. Que cette dernière loue à un prix minime tout en s’occupant de trois jeunes enfants nés d’un couple. Ce dernier, dit-elle, aurait donné naissance à un autre bébé la semaine dernière... Le problème toutefois : elle craint pour la sécurité du nouveau-né, car le couple serait accro à la drogue et aurait toujours abandonné ses enfants – plusieurs d’entre eux – les laissant sous la garde de proches, d’amis et même des autorités. Le couple serait également connu des services de police pour avoir commis d’autres délits. Mais il est surtout soupçonné d’avoir vendu ses bébés...

Nous parlions de cette affaire l’année dernière déjà. Nous évoquions, dans notre édition du 22 mai 2022, le «business» auquel s’adonnerait ce couple depuis de nombreuses années : il vendrait ses bébés au plus offrant. Sans compter le fait qu’ils ont beaucoup d’enfants.... Certains sont pris en charge par des membres de la famille tandis que d’autres sont sous la protection de la Child Development Unit (CDU). Or, toujours selon les dires de leurs proches, le couple aurait donné naissance à un énième bébé durant la semaine écoulée.

Pourquoi auraient-ils abandonné, tenté de vendre ou vendu leurs enfants ? On apprend, lors de notre quête d’informations sur le terrain, que le jeune homme vendait des articles divers sur le marché pour gagner sa vie. Cependant, il y a environ neuf ans, lorsqu’il a rencontré la femme dont il allait tomber amoureux et qu’il allait épouser, il s’est progressivement retrouvé sous l’influence de drogues, car la femme était toxicomane. On apprend également que le couple avait des enfants issus de précédentes unions. Ensemble, ils ont également eu plusieurs autres enfants, incluant un bébé qui est né l’an dernier et qui aurait été vendu.

Puis, leur penchant pour la drogue se serait tellement aggravé qu’ils «ne se sont plus préoccupés de leurs enfants. L’un des enfants a été retrouvé seul dans leur maison et ma nièce a décidé depuis de le prendre en charge (...) d’autres ont été placés sous la responsabilité de la CDU pendant quelques mois, jusqu’à ce que j’estime qu’il était préférable de les prendre en charge. Je leur offre de l’amour et leur assure une éducation disciplinée, mais je ne dispose pas de beaucoup de moyens financiers, et les enfants sont en manque d’affection de la part de leurs parents», raconte la veille dame, abattue.

Par ailleurs, l’enquête menée en 2022 faisait état du fait que le mari et la femme étaient soupçonnés d’avoir vendu leur bébé d’un mois à un autre couple qu’ils avaient identifié pour «l’adopter» moyennant paiement. Le bébé avait des complications de santé, et le couple qui devait «l’acheter» aurait même pris en charge les frais de clinique. Le bébé guéri, les parents biologiques auraient réclamé encore plus d’argent.

«Hormis le soupçon de trafic de bébés, le couple aurait également commis d’autres délits, ayant volé des denrées alimentaires.»

Dans le sillage de ces révélations, la CDU avait fait une déposition à la police et une enquête pour trafic humain avait été initiée. Suite à cette plainte, une femme, soupçonnée d’avoir acheté un bébé à Rs 5 000, avait expliqué que sa cousine aurait remis de l’argent aux parents biologiques de l’enfant pour les aider, et qu’elle avait accepté de prendre le nouveauné sous sa garde jusqu’à ce que la situation de la mère s’améliore...

«Je ne sais pas ce qui s’est passé exactement. L’incompréhension règne encore, car je ne suis pas en contact avec eux. On entend des versions différentes comme le fait que la personne ait apporté une aide financière à la mère et qu’elle n’ait pas acheté le bébé et que les parents ne le vendaient pas (...) mais on ne sait pas ce qui s’est réellement passé. La seule chose dont je suis certain c’est qu’ils ne se soucient pas de leurs enfants. Ils les donnent... Le bébé qui aurait été vendu a été pris en charge par la CDU et je lui rends visite. C’est triste car à son jeune âge, il ne nous connaît pas...» s’attriste la vieille dame. De se demander pourquoi ce couple, qui ne parvient pas à subvenir à ses propres besoins, continue de mettre au monde des enfants innocents.

Hormis le soupçon de trafic de bébés, le couple aurait également commis d’autres délits, ayant volé des denrées alimentaires. L’homme aurait également passé près d’un mois en prison, témoigne un membre de la famille. Qui plus est, le couple – cachottier – tremperait dans des affaires tellement louches et compliquées qu’il est difficile de démêler le vrai du faux, avouent ceux qui le côtoient. Seule certitude : «Ils ont beaucoup d’enfants et ils ne font que les abandonner ou les donner ou les vendre, on ne sait pas trop.» Combien d’enfants ont-ils exactement ? Les chiffres qu’on nous donne varient entre six, dix et 12… «Ils en ont déjà vendu quatre selon moi», lâche un proche.

Et le couple aurait ainsi «récidivé» il y a quelques jours donc, en mettant au monde un énième bébé. Ce sont d’ailleurs des proches qui ont contacté la rédaction pour en faire part. «Nous ne le savions pas, jusqu’à ce que l’un de leurs enfants, âgé de 7 ans et qui est sous notre charge, nous le dise. Il est le seul à être en contact avec son père, qui tente de le rencontrer parfois (...) Nous sommes préoccupés par le bien-être du nouveau-né, car nous sommes conscients à quel point il a été difficile pour nous d’assurer la sécurité des enfants. Qu’adviendra-t-il du nourrisson ? Sera-t-il lui aussi abandonné ? Vendu ?»

Du côté de la CDU, qui avait pris en charge le bébé auquel le couple avait donné naissance l’année dernière, suite à l’ordre de la cour, on nous fait savoir qu’il est en bonne santé et a également été vacciné. Un suivi adéquat est également assuré pour garantir son développement futur.

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Trois arrestations

Suite à l’article de l’express publié le 22 mai 2022 et évoquant l’histoire de ce couple ainsi que le trafic d’enfants allégué, une enquête policière avait été ouverte. Sollicité, le police press office nous explique que l’enquête est déjà bouclée et qu’elle a mené à l’arrestation de trois personnes. Le dossier a été envoyé au bureau du Directeur des poursuites publiques en juin 2023.

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Rita Venkatasamy, Ombudsperson for Children : «L’Adoption Bill indispensable»

Notre société n’est pas à l’abri de trafics d’enfants qui se font bien entendu à huis clos. Cela nécessite une vigilance accrue de la part des autorités et des citoyens, qui doivent dénoncer de tels agissements, souligne d’emblée l’Ombudsperson for Children. Rita Venkatasamy affirme qu’il y a de nombreux couples qui souhaitent avoir un enfant mais ne le peuvent pas, et qui ne savent pas à qui s’adresser pour en adopter un, d’où des recours illégaux parfois. Elle rappelle ainsi qu’il est indispensable de présenter le projet de loi tant attendu, l’Adoption Bill. Ce, afin de mettre en place une voie appropriée pour permettre à des parents d’adopter un enfant et de donner une chance à tous les bébés et enfants vulnérables.

Par ailleurs, en ce qui concerne la présente affaire, «aucune excuse n’est suffisante pour justifier la violation du droit à l’identité d’un enfant», fait valoir Rita Venkatasamy. «Il est primordial que l’intérêt de l’enfant prime, et pour les parents qui se retrouvent dans une situation difficile, des structures telles que la CDU, les familles d’accueil, les services de protection à l’enfance, entre autres, sont en place pour leur offrir un soutien. Au lieu de recourir à des actes qui peuvent nuire aux enfants, il serait opportun de les confier à l’État pour qu’ils soient pris en charge.»