Publicité
Journée internationale
Geraldine Baptiste : «On m’a dit ‘ki zom pou kontan twa ek to bann tas ?’ ou encore que je ressemble à une vache»
Par
Partager cet article
Journée internationale
Geraldine Baptiste : «On m’a dit ‘ki zom pou kontan twa ek to bann tas ?’ ou encore que je ressemble à une vache»

En ce 8 mars, parole aux femmes. Une dizaine d’entre elles nous ont conté leur vécu, leurs difficultés et leurs espoirs. Une façon d’encourager les petites filles à croire en l’égalité des genres et de remercier les grands-mères pour leurs luttes pour les droits des femmes, luttes qui ne sont pas terminées.
Geraldine Baptiste, 26 ans, atteinte de vitiligo, habite Roche-Bois et est enseignante de profession. Elle est également d’origine chagossienne, un héritage qui lui tient profondément à cœur.
«Je sais que cela peut paraître cliché, mais grandir dans une cité fait que certains ont déjà une autre perception de notre personne. Beaucoup pensent que les filles issues de ces quartiers sont sans ambition, peu éduquées ou considérées comme des “nimport”. On suppose trop souvent que nous ne voyons pas plus loin que notre ombre. Or, ce n’est pas le cas. Nombre d’entre nous se battent chaque jour, corps et âme, pour terminer leurs études et aspirer à une carrière.
«Issue d’une famille modeste, je n’ai pas eu une adolescence évidente. Mes parents n’ont pas fait de grandes études, mais cela ne les a jamais empêchés de m’encourager. Surtout ma mère qui m’a énormément soutenue, et ma grand-mère qui m’a donné, dès mon plus jeune âge, le goût de la lecture. Elle me répétait sans cesse d’aller jusqu’au bout de mes rêves et que la vie d’une femme ne se résume pas au mariage ou à devenir mère. Elle était mon inspiration. Son absence lors de ma remise de diplôme a été un déchirement, car elle nous avait quittés, emportée par un cancer.
«Lorsque j’ai été admise à l’université, durant la présentation, j’ai remarqué la surprise de mes camarades de classe en apprenant que je venais de Roche-Bois. Pour beaucoup, c’est un quartier perçu comme dangereux, gangrené par les fléaux sociaux. Pourtant, ce n’est pas notre endroit qui nous définit, mais bien notre volonté de nous dépasser, même lorsque le chemin est semé d’embûches. J’ai utilisé ces préjugés comme une force pour montrer que je vaux plus que ces stéréotypes. Aujourd’hui, j’ai terminé mes études, je me suis lancée dans la poésie, j’ai été invitée plusieurs fois à la télévision et dans les journaux. Je mets aussi ma voix au service de mes racines chagossiennes, portant haut l’histoire et la souffrance de mes grands-parents. Désormais, les habitants de mon quartier me disent qu’ils sont fiers de moi, que je redonne de la couleur à Roche-Bois.
«Atteinte de vitiligo, j’avoue que cela a aussi impacté ma vie car j’ai dû affronter le poids du regard des autres, les moqueries, mépris, commentaires blessants… Certains allaient jusqu’à me dire : ´ki zom pou kontan twa ek to bann tas ?’, ‘Mets un peu de maquillage pour les cacher’, ou encore que je ressemble à une vache.
«Aujourd’hui, je suis fière d’affirmer que je vis bien avec. J’ai appris à faire la paix avec moi-même. Je n’écoute plus les jugements et j’ai remarqué que, depuis que je marche la tête haute, les gens me sourient. Lorsqu’on me pose des questions, j’en profite pour sensibiliser les autres à cette maladie. C’est ma manière de montrer que l’on peut vivre sereinement avec, sans honte ni complexe. Il suffit de croire en soi et de s’entourer de bonnes personnes.»
Publicité
Publicité
Les plus récents




