Elle était la dernière mémoire vivante d’une époque où la politique avait encore une âme. À 97 ans, Grace Seeneevassen s’est éteinte ce dimanche, dans la dignité tranquille qui l’a toujours habitée. Elle fut l’épouse de Renganaden Seeneevassen, mais aussi sa confidente, son ancrage. Discrète, résolue, indéfectiblement fidèle à ses valeurs et à sa famille.

Renganaden et Grace Seeneevassen, avec leurs trois enfants, Rajen, Sarojini et Kriesen.

Avec ses enfants — Rajen, Sarojini, Kriesen — et sa petite-fille Cheriza, Grace ne ratait jamais une occasion de rappeler, dans un souffle doux et précis, l’histoire en train de s’effacer. Rozemont, Anquetil, SSR (qu’elle appelait affectueusement Kewal), Renga… Ces noms n’étaient pas pour elle des figures figées dans un manuel. C’étaient des voix. Des souvenirs. Des engagements. Et elle les partageait avec une acuité rare, sans jamais sombrer dans la nostalgie facile.

Il y a quelques mois encore, dans une conversation avec l’express, elle livrait ce témoignage bouleversant :

“I think of Renga, first and foremost, as a great humanitarian. All people, not just politicians, could learn from him. He was an inspiration to all. And even today, more than half a century after his death, people still speak of him with admiration and awe. Renganaden Seeneevassen was kind and generous – he often pleaded his client’s cases for free. He was intelligent and witty – crowds would gather whenever he was to hold a public meeting. He was a man of integrity – he would accept defeat with dignity if he felt that his opponent was right. He loved life – a bon vivant who loved music, especially the opera and the sega. But most of all, he loved and respected all his fellow human beings, from whatever walk of life, race, culture, religion or community. During his much too short life, he did all he could to improve his fellow human beings’ lives.”

18 juillet 2008, à la State House

On l’écoutait, suspendus à ses mots, car elle parlait peu. Mais quand elle parlait, c’était avec grâce. Elle aurait pu être députée, ministre même. SSR le lui proposa après le décès prématuré de Renga. Elle déclina. Non par manque d’ambition, mais parce que, disait-elle, «mes enfants avaient plus besoin de moi que la Chambre des députés.»

Il fallait l’entendre raconter la scène de ce refus, avec un sourire délicat et un soupçon de mélancolie dans les yeux. Elle ne cherchait pas la lumière, mais elle savait où était l’essentiel.

Grace Seeneevassen n’était pas seulement la veuve d’un homme d’État. Elle était, dans son silence, une pierre angulaire de l’héritage moral des travaillistes historiques. Elle portait en elle une époque où l’on faisait de la politique pour servir, non pour se servir.

Grace Seeneevassen, le jour de ses 90 ans.

Les funérailles de Grace Seeneevassen auront lieu ce lundi à 13 h 30, au crématorium de Belmont, à Goodlands.

Qu’elle repose en paix. Nous présentons nos condoléances émues à Rajen, Sarojini et Kriesen, ainsi qu’à tous les petits-enfants et proches.