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Château de cartes
Serions-nous à la veille d’un tournant majeur dans l’histoire du pays ? La question se pose eu égard aux événements, un peu à la manière de la série américaine House of Cards, qui ont marqué la scène politique locale depuis la semaine dernière. Contrairement à Frank Underwood, le personnage principal qui n’a pas lésiné sur les moyens, y compris marcher sur les cadavres, pour se hisser à la tête de la Maison-Blanche, ici à Maurice, le Premier ministre, le Dr Navin Ramgoolam, n’aura pas à déployer autant d’efforts pour assurer sa survie politique. D’abord, pourquoi se décarcasser quand on dispose d’une carte maîtresse : la réforme électorale. Un instrument qu’il manie habilement depuis la cassure de l’alliance PTr-MSM et qui, depuis, s’est révélé être une redoutable arme politique au grand dam du MSM.
À plusieurs reprises, lorsque le besoin de refroidir les ardeurs du Remake 2000 (MSM-MMM) s’est fait sentir, notamment quand celui-ci montait en puissance, le Premier ministre n’a pas hésité à agiter la carotte de la réforme électorale. La nouvelle cooling off period réclamée par le leader du MMM, Paul Bérenger, la semaine dernière, ainsi que son rapprochement avec Navin Ramgoolam alors qu’il est toujours en alliance avec le MSM, témoigne de la réussite de cette stratégie. Ce n’est certainement pas le MSM qui dira le contraire.
D’ailleurs, la rapidité avec laquelle cette nouvelle « alchimie », pour reprendre les termes du chef du gouvernement, s’est développée surprend y compris ceux qui sont rompus à ce genre de phénomène politique car il y a à peine quelques jours, le leader de l’Opposition s’acharnait sur le régime de Navin Ramgoolam. Un tour de force dont seul le Premier ministre a le secret et qui laisse pantois ses détracteurs les plus aguerris.
Cela dit, il est important de ne pas se laisser emporter par la vague de la réforme électorale, comme le souhaitent les instigateurs qui assurent que leur rapprochement débouchera sur un « projet d’avenir ». Il est permis de s’interroger sur ce projet car jusqu’à présent, nous n’en avons pas entendu parler, sauf de la réforme du système électoral qui, aux yeux de bon nombre d’observateurs politiques, ne vise qu’à desservir les desseins de deux dirigeants politiques en fin de carrière. À moins qu’il y ait un plan plus large pour une véritable transformation sociétale et économique dont on s’est gardé jusqu’à présent de nous parler.
Si tel est le cas, il serait dans l’intérêt des deux principaux architectes de ce « projet d’avenir » d’en faire part à la nation car tout le cinéma auquel nous avons eu droit ces derniers jours pour justifier des repositionnements politiques n’a fait qu’accroître le désintéressement — pour ne pas dire le dégoût en particulier des jeunes — pour la politique. Le défi, c’est justement de convaincre la population dans son ensemble que la « priorité des priorités est la réforme électorale » et que tout le reste pourra attendre. De lui faire comprendre l’urgence de cette réforme annoncée depuis des lustres étant donné qu’elle n’y voit que de l’opportunisme politique.
C’est d’autant plus important pour le leader de l’Opposition, Paul Bérenger, d’expliquer à la population comment, après avoir descendu en flammes le gouvernement qui croulait sous le poids des scandales et dont il s’est fait un malin plaisir de dénoncer, il peut aujourd’hui évoquer l’idée d’une alliance avec ce même Parti Travailliste. La logique de cette démarche n’est pas évidente, même pour certains dirigeants du MMM. La démission, hier après-midi, d’Ivan Collendavelloo de toutes les instances du parti en témoigne.
Imaginons maintenant un jeune chômeur à qui on a systématiquement fait comprendre que le gouvernement en place est le seul responsable de sa situation. Il y a aussi ces nombreux partisans auxquels on a vendu l’espoir d’une alternance avec en prime un nettoyage du pays au Kärcher.
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