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Miracle économique : un joker tout trouvé

8 octobre 2014, 08:08

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En faisant appel à Vishnu Lutchmeenaraidoo pour être son ministre des Finances dans l’alliance de l’opposition, sir Anerood Jugnauth ne fait que jouer un joker tout trouvé, voire une carte maîtresse susceptible de faire mouche. Car ce tandem retrouvé serait à bien des égards une épine dans les pieds de Navin Ramgoolam et de Paul Bérenger, faisant du coup du «damage control» pour atténuer une cinglante défaite que l’alliance Parti travailliste-Mouvement militant mauricien (PTr-MMM) prévoit déjà pour l’opposition.

 

Dans l’imaginaire collectif, le tandem Jugnauth- Lutchmeenaraidoo incarne le miracle économique que le pays a vécu de 1983 à 1991. Une période de relance marquée par la deuxième vague d’industrialisation après celle de l’Indépendance ; la sophistication de l’architecture économique avec le lancement de la Bourse de Maurice et l’abolition du taux de change, voire d’autres réalisations comme le plein-emploi.

 

Mais il y a mieux : Vishnu Lutchmeenaraidoo est l’architecte des mesures éminemment populaires qui ont révolutionné le mode de vie des Mauriciens. Les moins jeunes n’oublieront pas de sitôt la détaxe sur le magnétoscope et les téléviseurs couleurs, véritable craze de l’époque qui a permis à de nombreuses familles urbaines et rurales de s’approprier ces nouveaux gadgets. Les débuts du «feel good factor»…

 

Certes, le contexte économique a changé et les défis avec. Mais l’architecte de ce miracle, loin d’être un magicien de l’économie, a su comprendre la psychologie de la population. Et savoir comment enrober une mesure économiquement difficile et la faire accepter sans brocher par les moins fortunés de la société. Et Dieu sait qu’il avait pris des mesures douloureuses durant cette période pour redresser l’économie.

 

Dès lors, on peut s’interroger sur la réussite économique de Vishnu Lutchmeenaraidoo. Les spécialistes de l’époque diront certainement qu’une de ses forces réside dans sa capacité à donner une touche sociale à toutes les mesures économiques. S’il ne se targue pas d’être un technocrate, à l’instar de Rama Sithanen, il se veut d’abord et avant tout un ministre des Finances volontariste, pédagogue dans son approche et soucieux de la préservation de la paix sociale. Ainsi, on ne peut l’enfermer dans une cage et lui coller une étiquette, telle que «l’homme du secteur privé» ou celui du «grand capital».

 

C’est fort de ces atouts que Vishnu Lutchmeenaraidoo va certainement rejoindre son ancien Premier ministre pour tenter de faire rêver encore une fois toute une population.

 

À l’opposé, Rama Sithanen est déjà sur le terrain et son poste déjà confirmé, sans aucune indication toutefois sur son rang dans la hiérarchie gouvernementale. Ce comeback a été diversement accueilli. Il n’a échappé à personne que certaines personnalités du secteur privé ont applaudi ouvertement son retour au Trésor public, en cas de victoire de l’Alliance PTr-MMM. À l’instar de Tim Taylor et d’autres qui, eux, ne veulent pas manifester publiquement. Ils pensent, à tort ou à raison, que Rama Sithanen est l’homme de la situation pour redonner du souffle et du muscle à l’économie et aider Maurice à affronter les tempêtes en vue de se hisser au niveau de pays à revenu élevé. Personne ne conteste ce postulat. Il a fait ses preuves en 2006 avec la première vague de mesures économiques.

 

Toutefois, s’il rassure la communauté des affaires, Rama Sithanen est loin de faire l’unanimité au sein de la classe syndicale. Celle-ci n’hésite pas à rafraîchir la mémoire de la population en invoquant la politique jugée ultralibérale prônée par le tandem Rama Sithanen-Ali Mansoor. Des mesures fortement contestées à l’époque comme la taxe sur les intérêts bancaires ou encore le projet de ciblage aux bénéficiaires de la pension de vieillesse ont été remises sur le tapis.

 

Comme dans les autres scrutins électoraux, l’économie occupera une place de choix dans l’agenda politique de cette campagne. Entre un économiste praticien et un magicien de l’économie, le débat promet d’être à la fois rude et exaltant. Vishnu Lutchmeenaraidoo a déjà annoncé qu’il ne compte pas croiser le fer avec son cousin Rama Sithanen, privilégiant un débat d’idées. On le saura prochainement.

 

Mais la stratégie de Vishnu Lutchmeenaraidoo est ailleurs, Son positionnement dans cette campagne est dicté par une cassure hypothétique de l’alliance PTr-MMM. Ce qui déboucherait sur une nouvelle configuration politique où les cartes seront redistribuées. Il attend donc les prolongations pour jouer crânement sa chance aux Finances. Attendons voir, lui qui croit aux astres…