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Le premier faux-pas de sir Anerood

13 avril 2015, 07:25

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Le premier faux-pas de sir Anerood

Super Cash Back Gold (SCBG), c’est sûrement le premier véritable test de sir Anerood Jugnauth et de son alliance Lepep face à la colère grandissante de la rue. Jusqu’ici tout allait pour le mieux, ou presque, pour le nouveau gouvernement (hormis peut-être l’incapacité de nommer Ameenah Gurib-Fakim à la présidence ou de brider un Anil Gayan de plus en plus discordant).

 

Jusqu’ici, dans une large mesure, l’opinion saluait la farouche détermination du gouvernement à «nettoyer le pays» et à questionner des personnalités comme Navin Ramgoolam et Rundheersing Bheenick qui, hier encore, n’avaient de comptes à rendre à personne. La notion d’accountability devait reprendre un semblant de sens dans un pays où l’on dit souvent que, sur le plan de la justice, les riches et puissants demeurent intouchables. Ainsi, placer l’ancien Premier ministre dans une cellule policière à Moka et l’ancien gouverneur à Alcatraz ont frappé les esprits. Le citoyen lambda, étonné par ces situations nouvelles, avait tendance à fermer les yeux sur les méthodes-Gestapo de certains membres du gouvernement.

 

Puis est venue la chute de l’empire BAI et les déclarations à l’emporte-pièce de sir Anerood Jugnauth – mal avisé sur ce dossier complexe aux ramifications tentaculaires. Au lieu de rassurer le grand public, il a créé une vague de panique et d’incompréhension parmi les clients et épargnants de la BA Insurance. En parlant de «vaste Ponzi Scheme» et du fait que le «gouvernement ne pouvait rien pour ceux qui ont été alléchés par l’appât du gain» du SCBG, dont les milliards «avaient déjà quitté Maurice», le Premier ministre a montré une facette oubliée de sa personnalité, celle qui ne s’arrête pas sur les émotions du public. Du coup, le papa gâteau est apparu comme un homme froid, sans coeur, indifférent à la souffrance, sourd aux pleurs. Bref un homme différent de la campagne électorale.

 

Sur le SCBG, sir Anerood a tort de vouloir faire une discrimination avec les autres policy holders – vu que toutes ces différentes polices ont eu la bénédiction des mêmes régulateurs. Le communiqué de la BAI explique pourquoi : «Le SCBG n’est qu’une évolution du plan d’assurance Single Premium Endowment qui existe depuis plus de 20 ans et dûment réglementé par la FSC. Il est à noter que des produits similaires sont commercialisés à Maurice et ailleurs.»

 

Au-delà des renseignements dont il pourrait disposer sur les transactions de Dawood Rawat et de son clan, sir Anerood a-t-il saisi le poids de ses mots ? Ses conseillers ont-ils mesuré la panique, le stress, la colère, la déception de ces 24 000 épargnants, dont beaucoup sont des retraités de l’industrie sucrière et de la fonction publique qui y ont injecté les économies de toute une vie ? On aurait tort de croire que les atermoiements de sir Anerood vont lui faire perdre des points uniquement sur le plan personnel. C’est son alliance qui va souffrir de la vague de contestations post-BAI. Si clouer le bec du journaliste Pranay Gupte aura été, même un peu tardivement, un bon move du gouvernement à l’international, sur le plan local la partie risque d’être bien plus ardue. Déjà Reza Issaack, Shakeel Mohamed, Reza Uteem s’enfoncent dans la brèche pour tenter de toucher des dividendes politiques, alors que l’ancien ministre des Finances de Ramgoolam, qui travaille aujourd’hui sous Jugnauth, est avare en commentaires...

 

Dans chaque crise, il y en a qui souffrent car ils risquent de perdre gros, et d’autres, généralement des politiciens de l’opposition, qui s’en nourrissent pour reprendre des forces...