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Ce qu’on ne nous montre pas…

17 mai 2015, 12:00

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Ce qu’on ne nous montre pas…

On aurait tort de voir dans les images choquantes de cette jeune élève tabassée par ses pairs un incident isolé. On aurait tort de traiter cet acte de violence gratuite comme un banal fait divers mettant en scène quelques jeunes filles d’une école prévocationnelle. Au-delà de cette scène qui nous révolte, on devrait se demander si ces coups-là ne sont pas la reproduction de cette violence sociale tous azimuts dans laquelle on s’enfonce petit à petit ? Qu’est-ce qui amène des filles de 15 ans à faire montre d’une telle agressivité ? Dans cette histoire, nous voyons ce qu’on nous a montré. La vidéo amateur insoutenable d’une agression. Mais qu’en est-il de ce qu’on ne voit pas ? De ce qu’on ne nous montre pas ? De ce qui se passe tous les jours, à l’école, entre camarades.

 

À écouter la version des faits des filles impliquées, il semble que ce n’est pas la première fois qu’une bagarre de cette nature éclate. À 15 ans seulement, elles en sont aux règlements de comptes, accusant la victime d’avoir commencé l’agression physique la veille. En attendant que la police enquête, à nous tous, acteurs de la société, de voir là des signes et symptômes d’une jeunesse qui nous échappe. Et parce que ces jeunes-là seront les adultes de demain, parce qu’ils seront appelés à jouer leur rôle dans la société, à pénétrer le monde professionnel, à devenir éventuellement parents, il nous importe de trouver des remparts de protection, car il semble de plus en plus difficile de gérer la nouvelle génération, voire de communiquer avec elle.

 

Dans le cas de cette jeune fille frappée par ses camarades de classe, on constate que, malgré sa souffrance, elle a gardé le silence sur ce qui s’est passé. Sans le buzz sur Facebook, les Mauriciens et ses proches n’auraient rien su de ce qu’elle a enduré. Pourtant, elle n’est pas sortie indemne de cette agression. Elle a ensuite souffert de terribles douleurs qui l’ont obligée à se rendre à l’hôpital. Mais elle n’a pipé mot sur les vraies raisons de sa peine. Selon ses dires à sa mère, c’est parce qu’elle aurait été menacée. D’autres versions font état de vidéos où on la verrait, elle cette fois, dans le rôle d’agresseur.

 

Dans tout cet imbroglio, on retient une banalisation de la violence. Comment expliquer qu’une jeune fille a préféré filmer toute la scène au lieu d’intervenir, tandis que d’autres, au lieu d’arrêter la bagarre, se sont jointes au groupe pour s’acharner sur une victime sans défense ? Quelles sont les raisons qui engendrent une telle absence de valeurs et où trouver des clés pour gérer nos jeunes ?

 

La réflexion sur les causes doit être urgente et la prévention systématique. Tout comme l’école doit retrouver sa raison d’être. Si l’on en croit la version des proches de la victime, celle-ci a manifesté sa détresse uniquement en demandant qu’on la change d’établissement scolaire. Comment se fait-il que l’école, lieu d’apprentissage, d’éducation, de transmission des savoirs  et de socialisation par excellence, devienne un endroit dangereux pour nos enfants ? S’il faut saluer la prompte attitude de la ministre de l’Égalité du genre et du développement de l’enfant qui a décidé hâtivement de se rendre sur place en envoyant ensuite les officiers de la CDU prendre en charge la jeune fille, il est urgent que son ministère et celui de l’Éducation travaillent ensemble pour trouver des solutions au climat qui se dégrade dans nos écoles.

 

D’autant qu’à la maison, les comportements de nos jeunes prennent souvent au dépourvu des parents dépassés. Quand ils ne s’enferment pas dans leur nouveau monde virtuel fait de chat, d’échanges sur les réseaux sociaux au détriment de dialogues francs et réels, évitant ainsi des sujets troublants comme la violence, la drogue et les relations sexuelles.

 

Difficile de parler de notre jeunesse sans évoquer aussi le choix de la collégienne qui a décidé de mettre fin à ses jours lundi. Un autre acte qui témoigne d’une souffrance, de l’âme cette fois, et qui n’a pu être prévenu même si l’adolescente avait donné des signes d’un mal-être dans son entourage scolaire.

 

Comment parler à nos jeunes, comment les entourer, comment les protéger ?

 

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