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Vishnunomics
Nous connaissions déjà l’expression Abenomics, qui se réfère aux politiques mises en place par le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, pour dynamiser l’économie de son pays. Or, la semaine dernière, nous avons eu droit à du Vishnunomics ; l’économie selon Vishnu Lutchmeenaraidoo.
Invité par le groupe La Sentinelle, le ministre des Finances a livré sa vision de l’économie devant un parterre de journalistes. Le fait est suffisamment rare pour être souligné. C’est, en effet, la première fois depuis la présentation du Budget 2015-16 que le ministre des Finances se livre à un exercice à cœur ouvert.
À l’aise, comme d’habitude, face à la caméra, et maniant habilement l’art de la communication, le grand argentier s’est évertué pendant plus de deux heures à convaincre ceux présents du bien-fondé de sa politique économique. Justement, quelle est-elle ? Si, dans le fond, les idées n’ont pas grandement évolué par rapport à celles avancées par ses prédécesseurs, en revanche, dans la forme, le discours tranche singulièrement avec celui entendu lors de la décennie écoulée.
La stratégie qui repose sur le long terme s’appuiera sur trois principaux piliers : le développement portuaire, l’industrie océanique et un meilleur positionnement de Maurice dans cette région du monde afin de mieux saisir les opportunités entre l’Asie et l’Afrique.
Le gouvernement ayant pris le pari de l’avenir, il ne faut surtout pas être impatient ! C’est le ministre lui-même qui le dit. Il réclame du temps, égratignant au passage ceux qui sont à la recherche de «gratification instantanée». Du coup, il évite de se laisser entraîner sur le terrain glissant d’un combat chiffré. Des chiffres, dit-il, il n’en a cure… Ce sont les objectifs et leur réalisation qui comptent à ses yeux.
Pour y parvenir, Vishnu Lutchmeenaraidoo mise sur ses intui-tions. C’est d’ailleurs ce qu’il avait fait dans le passé, fait-il comprendre. Ainsi, pour rééditer sa performance, il compte sur la participation de la po-pulation. Lui-même n’étant, selon ses propres mots, que l’instrument d’une force supérieure.
À l’écouter, nous sommes tentés de croire qu’il s’est volontairement déconnecté de la réalité. Mais non, il en est pleinement conscient. D’ailleurs, il reconnaît que le ralentissement de l’économie mondiale aura une incidence sur le rythme de la reprise. Toutefois, il ne veut pas céder au pessimisme. Il faut y croire, dit-il. Le ministre des Finances nous appelle donc à rêver pour surfer sur la crise.
Venant d’un ministre des Finances, de tels propos sont déroutants, mais Vishnu Lutchmeenaraidoo maintient le cap. Il veut un développement à visage humain et a fait de son dada la lutte contre la pauvreté. D’où aussi ses visites à Rodrigues. Le but est d’investir dans l’île afin de lui permettre de rattraper son retard sur le développement.
En évoquant l’importance de l’homme, le ministre affiche la même ambition pour ceux se trouvant en marge de la société. Mieux partager les fruits du développement est une démarche positive et plus que jamais nécessaire, mais il faut pour cela s’en donner les moyens. Ce qui n’est pas le cas avec un taux de croissance économique plafonnant à 3,5 %.
Sous l’effet de la crise mondiale, le tissu socio-économique n’a cessé de se fragiliser. Les nerfs sont à vif et le ministre des Finances n’est pas dupe : il sait que le pays l’attend au tournant !
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