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Les nouveaux arrogants de la république
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Les nouveaux arrogants de la république

Le cynisme pourrait dicter le rire. Tant la scène est du déjà-vu. À une exception près. Si la toile de fond reste la même, les personnages ont changé. Et les protestations ont viré de camp. Ainsi, il a fallu une impensable chute sonore à Ramgoolam pour qu’il découvre, aujourd’hui, que «nous sommes dans un pays démocratique» (…) «que le rôle du National Security Service n’est pas de surveiller l’opposition» (…). Mieux – ou pire –, l’ancien chef du gouvernement a été surpris par le rôle de la MBC et condamne sa «manipulation infecte».
À part le fait que Ramgoolam soit devenu amnésique, oubliant les abus de son gouvernement pendant ces neuf dernières années, que ce soit à la MBC, ailleurs ou dans la force policière – n’hésitant pas jusqu’à la dernière minute, soit le jour même des dernières législatives, à faire transférer de manière punitive un policier –, l’ancien Premier ministre n’a pas tort. Il fait juste l’amère expérience du vécu de tous ceux qui se retrouvent dans l’opposition à Maurice. Car c’est ainsi que vivent nos hommes politiques ici. Les opposants d’hier prennent la place des anciens pouvoiristes et reproduisent le même schéma du cercle vicieux qui veut que le pouvoir justifie tout, même les scénarios les plus dégoûtants.
On croyait avoir tout vu avec la télévision de Callikan, on découvre – et il n’a pas fallu longtemps – que celle de Lepep peut s’enfoncer encore plus loin dans son rôle de propriétaire de la MBC et sa mission de propagande. De la manipulation d’images dans le reportage de Kewal Nagar du PTr dimanche dernier au commentaire de Badhain qui semble se prendre pour le propriétaire de la MBC quand il lance lors d’une séance parlementaire à Bérenger : «les li lot kou pou invit twa, pas fatig twa», en passant par la première émission de juin dernier sur la BAI quand le même ministre Badhain ainsi que Lutchmeenaraidoo étaient les seuls invités sans un souci d’équilibre envers ceux mis en cause, on aura tout vu de la part d’un gouvernement qui critiquait la station nationale du précédent régime pour faire pire aujourd’hui.
Ce n’est pas tout. Quand le journal l’express, après enquête, dénonce, avec raison, cette manipulation d’images dans sa livraison de mardi dernier, voilà qu’un communiqué de la MBC accuse ce titre d’avoir viré au rouge… sur la base du logo de l’express dimanche qui a toujours été de cette couleur ! Oui, oui, on peut rire.
Cette scène burlesque témoigne en fait de la sensibilité à fleur de peau des dirigeants qui, imbus de leur nouveau pouvoir (quelques mois ont suffi) et de leur arrogance, ne tolèrent aucune critique. Encore moins de la presse libre.
Les exemples ne manquent pas ces jours-ci : Le député Rutnah qui, après son accrochage avec Bérenger (autre exemple de la petitesse d’esprit de nos parlementaires incapables de prendre de la hauteur, préférant se donner en un piteux spectacle), s’en prend à une journaliste de Radio Plus, le ministre Gayan, qui, ne voulant pas rendre des comptes sur le recrutement de Mme Sumputh, déclare la guerre aux médias et nous donne une curieuse lecture de la politique d’une alliance qui promettait bonne gouvernance et transparence: «Government is government. And goverrnment decides…» Et dire que ce même Gayan prenait la plume naguère, usant de l’hospitalité des colonnes de l’express pour dénoncer les travers de l’ancien régime.
Dans toute cette histoire, ce sont les citoyens, que tous les dirigeants prennent pour des imbéciles, qui sont les plus à plaindre. Ceux-là qui, après neuf ans de suffisance du régime travailliste, avaient foi en une autre manière de faire la politique et qui croyaient en un regard neuf de la part d’un nouveau gouvernement découvrent aujourd’hui que rien n’a changé. Si ce n’est uniquement les personnages qui ont cédé leur place à d’autres arrogants…
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