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Garde-fous

27 octobre 2015, 06:52

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C’est une loi potentiellement dangereuse. Une fois adoptée, elle peut être utilisée à mauvais escient par un pouvoir abusif. Il faut être vigilant et doter «The Good Governance and Integrity Reporting Bill» de garde-fous. Elle doit être verrouillée pour que jamais elle ne puisse devenir un instrument entre les mains de politiciens sans scrupules.

 

Ce projet de loi, qui est présenté en première lecture ce matin à l’Assemblée nationale, part d’une bonne intention. Celle de pallier une carence de la loi anticorruption, le POCA. Dans l’état actuel du droit, l’enrichissement illicite ne constitue pas un délit. Donc l’ICAC ne peut ouvrir une enquête sur un individu qui étale une richesse disproportionnée à ses revenus. C’est seulement quand la commission a des indices de preuve liés à la corruption qu’elle peut agir.

 

De même pour les trafiquants de drogue. Ils auront beau afficher des signes extérieurs de richesse, tels que des villas somptueuses et des limousines luxueuses, personne ne peut leur demander la source de leurs revenus tant qu’ils ne sont pas condamnés pour délit de drogue.

 

La nouvelle loi vient corriger une injustice en procédant à la saisie de biens dont la source n’est pas justifiée. Il n’y avait pas de punition pour les corrompus et les trafiquants assez rusés pour échapper aux mailles de la justice pénale – ou qui profitaient de la lenteur de la procédure pénale.

 

Pour autant, il est normal que l’opposition et les observateurs expriment des réserves. Certains points avancés sont de nature légaliste, par exemple l’argument concernant l’atteinte à la présomption d’innocence. Dans la mesure où la saisie de richesses inexpliquées est une action in rem (contre une chose) et pas in personam (contre un individu), cette objection ne pèse pas lourd. Les doutes sur la rétroactivité de la loi ne sont pas fondés non plus. Elle remonte à sept ans pour la simple raison que le Banking Act impose ce délai aux banques avant de détruire les données des comptes.

 

En revanche, il est possible que la loi laisse la porte ouverte à une exploitation politicienne par un gouvernement mal intentionné. La réflexion doit porter sur les moyens d’empêcher tout abus de pouvoir.