Publicité
Spirale infernale
Le monde et ses dirigeants ne savent plus où donner de la tête. Entre le ralentissement économique, le changement climatique et la guerre contre le terrorisme, il y a eu au fil des années une complexification des défis qui guettent la planète. Celui qui nous préoccupe le plus en cette fin d’année est d’ordre économique. Car la reprise annoncée ne sera pas, une fois de plus, au rendez-vous, comme en témoignent les derniers pronostics des grandes agences internationales.
Du Fonds monétaire international à la Banque mondiale en passant par l’Organisation de coopération et de développement économiques, les explications se rejoignent quant à l’abaissement des prévisions de croissance : un léger rebond mais toujours fragile dans les pays avancés et la perte de vitesse des économies émergentes.
Outre les risques baissiers évoqués par pratiquement tous les analystes dans le cadre de leurs scénarios respectifs, l’OCDE attire l’attention sur le ralentissement, pour ne pas dire l’effondrement des échanges internationaux. La chute du commerce mondial est d’ailleurs au cœur de la révision des projections de croissance de l’organisation.
Selon le calcul de l’OCDE, la progression des échanges mondiaux a glissé de 3,4 % à 2 % cette année. Une situation jugée préoccupante, tout comme les chiffres indiquant que 2015 sera, selon l’économiste en chef de l’organisation, l’une des plus mauvai-ses années de ces derniers cinquante ans en matière de commerce. Sous ce chapitre, la baisse en volume est un fait, pour dire le moins, assez inhabituel qui mérite d’être relevé. Car d’ordinaire, de tels replis sont visibles en période de récession. Or, les statistiques officielles démontrent que ce n’est pas le cas.
Comment alors expliquer l’affaissement des échanges mondiaux ? Plusieurs pistes ont été explorées, dont celle de la modération des prix des commodités à l’échelle internationale. Toutefois, le fait que le volume des échanges est en baisse écarte la première thèse car l’impact se fera plus sentir sur la valeur, mais pas forcément sur le volume.
La réponse se trouve ailleurs, et il suffit de remonter quelques années en arrière, soit à l’éclatement de la crise économique globale, pour mieux cerner les circonstances du déclin des échanges commerciaux. À l’époque, des voix se sont élevées pour mettre en garde contre toute velléité d’un retour au protectionnisme. Il s’avère aujourd’hui que ces appréhensions se sont matérialisées. Plusieurs pays ont, en effet, eu recours à des pratiques commerciales jugées pas très équitables par l’Organisation mondiale du commerce pour tenter de doper leurs industries respectives dans l’espoir d’engranger des points de croissance et ainsi sortir de la crise.
C’est ce que confirme le 18ème Global Trade Alert Report. Les gouvernements à travers la planète ont imposé 539 mesures de distorsions commerciales durant les dix premiers mois de l’année en cours. Rien que le G20 était responsable de 443 d’entre elles. D’ailleurs, le recours à de telles pratiques par ce bloc de pays a crû de 40 %. De par le monde, il a augmenté de plus de deux fois et demie.
Ajouté à cela, la guerre des monnaies, qui du point de vue de la Banque mondiale n’est pas très productive, à laquelle nous assistons depuis un certain temps, n’est pas pour arranger les choses. D’où la spirale infernale : les craintes sur la croissance encouragent le protectionnisme qui, par ricochet, impacte négativement sur le commerce et de facto sur l’activité. Pour s’en sortir, il n’y a pas dix mille solutions mais une réelle volonté commune. Il reste à savoir si les dirigeants politiques en ont vraiment envie !
Publicité
Les plus récents