Publicité
Le choix gagnant
On ne répare pas une décennie d’improvisations économiques en une année. Quand on considère les atouts de ce pays, la décennie Ramgoolam a cruellement manqué d’audace et de vision, à quelques exceptions près, dont l’initiation du projet d’économie océanique. Mais il ne faut pas non plus que les nouveaux décideurs, après avoir démontré d’excellentes dispositions à réinventer le pays, tombent dans les mêmes travers politiques que leurs prédécesseurs.
Au point où nous en sommes aujourd’hui – un tassement économique, un quasi-blocage dans l’échelle sociale et des espaces économiques saturés de buildings, de véhicules et d’humains – Maurice ne peut plus se permettre de solutions bricolées et court-termistes.
Même si le tandem SAJ-Lutchmeenaraidoo a des acquis historiques et présente une vision économique audacieuse, les signaux de cette première année du gouvernement de l’alliance Lepep sont brouillés. Le dossier BAI a été si mal géré qu’il sera difficile pour le pouvoir de convaincre qu’il n’y avait point de motivation politique. C’est un très mauvais signal que nous envoie le gouvernement qui a cédé aux sirènes de l’ethno-politique. Ces hésitations à nommer un vice-président à la State House sont symptomatiques de ce mal qui continue à ronger notre classe politique. Et puis le rétropédalage sur la compensation salariale est la preuve sinon d’un dysfonctionnement, en tout cas d’une faiblesse.
Le temps de l’apprentissage est terminé. Ce gouvernement a un choix à faire entre la politique à la petite semaine et une vision socio-économique qui fera de Maurice «un pays phare» avec un «produit intérieur brut de plus 25 000 dollars par habitant» à l’horizon 2030. Un choix entre la politique de bas étage et les affaires nationales. Car Maurice a besoin d’un pouvoir sûr de lui, qui ne cède pas aux premiers hurlements surmédiatisés. Un pouvoir capable de faire avancer les grands projets et de ne pas être obsédé par sa cote de popularité. On ne gère pas les affaires nationales au gré des humeurs de l’électorat, du patronat, des syndicalistes, de l’opposition et des lobbys de tout poil.
Chacun défendra sa chapelle, les détracteurs seront dans leur rôle, l’opposition fera sa démagogie et la presse s’en fera le relais. Au pouvoir d’avoir le discernement pour résister à ce flot de pressions et la largesse d’esprit pour rectifier ses égarements. L’ancien régime a payé le prix fort son absence de courage et son obsession à s’accrocher au pouvoir à tout prix. Ce pays ne peut plus se permettre d’avoir des irresponsables aux manettes.
Pour réussir, il faut changer les règles du jeu, remettre à plat un certain nombre d’habitudes qui minent le progrès social, économique et qui polluent les mentalités. Les nominations pour plaire à une communauté ou à une caste font finalement plus de mal au tissu social qu’elles ne le consolident. Les Mauriciens sont suffisamment mûrs aujourd’hui pour comprendre que la compétence n’a pas de communauté, de classe ou de couleur.
Choisir, c’est renoncer. Ce gouvernement sera-t-il capable de transformer le pays comme promis, même si en cours de route, sa popularité devait en pâtir ? S’il réussit à amorcer un nouvel élan économique c’est la nation qui gagne. Et quand la nation gagne, c’est le pouvoir qui gagne.
Publicité
Les plus récents