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Attention au retour des murs !

6 mars 2016, 09:30

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L e monde tourne mal. De vilaines poussées de nationalisme, de sinistres nuages de xénophobie et des décharges puant le populisme et l’extrémisme polluent les discours et les esprits. Des discours d’un autre temps, comme ceux de Marine Le Pen et de Donald Trump, émanant pourtant du pays des droits de l’homme et de celui de la liberté, sont effrayants. Il nous faut les dénoncer.

À la State House, vendredi, l’écrivain public Tahar Ben Jelloun en a rajouté une bien belle couche. Il a été peu diplomatique, direct, et a lancé droit dans nos yeux : la peur et l’ignorance sont les deux mamelles du fléau qui nous guette tous. Il faut démonter leur mécanisme par le savoir et l’intelligence, par le débat et la fin des tabous. «L’ignorance engendre la peur, la peur engendre la haine, et la haine engendre la violence.»

Si on ne dénonce pas systématiquement tous les Le Pen et les Trump de la terre entière, ce sera le triste triomphe de l’ère des murs, la banalisation de la xénophobie, des frontières fermées en Europe, une crise migratoire internationale, des dérives racistes, et un monde encore plus fragmenté et violent.

Au contraire, pour que tout ne soit pas perdu, voilà ce qu’il faut enseigner à nos enfants : profitez, regardez, observez, rencontrez, critiquez, aimez, ressentez, vagabondez, traînez, analysez, plaisantez, commentez, racontez… bref, vivez pleinement votre vie dans ce monde que nous ne faisons que traverser.

Comme notre compatriote Rattan Gujadhur, qui vit en Californie, et qui vient de publier Dark Blue Mauritius afin de venir en aide aux réfugiés syriens, c’est précieux de tout quitter, ou presque, pour s’enrichir du monde et, surtout, ne pas rester enfermé dans le sien, à écouter des discours réducteurs et trompeurs. Ben Jelloun le dit bien mieux que moi : «La liberté n’est rien si elle ne respire pas dans le corps et l’esprit de l’homme, de tous les hommes, sans distinction ethnique, religieuse ou géographique.»

Pour la deuxième semaine consécutive, donc, indignons-nous et insistons sur la menace Donald Trump qui plane sur la première puissance économique du monde. Le magnat de l’immobilier a été, cette semaine, le grand triomphateur du «Super Tuesday» ! J’ai pris le temps et la peine de l’écouter jeudi soir. Il faisait campagne dans le Maine, et répondait, en passant, au réquisitoire du Républicain Mitt Romney, candidat battu par Barack Obama la fois dernière, et qui réalise les dégâts que peut causer un personnage comme Trump sur les États-Unis (à la fois sur le plan domestique que sur la scène mondiale). Selon Romney, «les politiques intérieures de Trump mèneraient les States à la récession. Ses politiques étrangères rendraient les États-Unis moins sûrs. Il n’a ni le tempérament ni le jugement pour être président. Et ses qualités personnelles feraient en sorte que les États-Unis cesseraient d’être une cité qui brille sur la colline».

Et, en effet, en écoutant Trump, je me suis tout de suite dit que cela faisait bien longtemps que je n’avais pas entendu de discours aussi vide, aussi démagogique, aussi perturbant – (outre peut-être celui d’un Showkutally Soodhun, qui, heureusement, est bien moins nocif, car sévissant à l’échelle mauricienne). Alors que le monde devrait s’ouvrir davantage, Trump n’a eu de cesse de parler de son mur avec le Mexique (que les Mexicains s’empresseraient de payer, dit-il, pour «préserver» leur balance commerciale favorable de quelques milliards de dollars !) L’on présume que la menace, c’est que s’ils ne le font pas, il taxerait leurs exportations vers les USA. Outre son côté xénophobe, son arrogance par rapport à sa fortune personnelle de 10 milliards de dollars – un seul bâtiment lui appartenant, situé à New York, vaut plus que toute la fortune de Romney – dérange !

La «valeur» d’un homme, c’est à travers sa fortune qu’elle se mesure chez Trump. Ce qui le «libère» des lobbys financiers, du fait qu’il est tellement plus «smart» (tiens !) que tout le leadership politique des États-Unis !

Le discours de Romney, tout dur qu’il fut, accusant Trump d’être un menteur et un faux-cul, fut plutôt faible en faits avérés ou en questions embarrassantes. En voici deux :

1)      En utilisant son propre argent, il n’est certes pas redevable envers aucun lobby financier. Sauf le sien ! Cela ne vous rappelle personne ? Moi si : Berlusconi ! Un président «normal» peut encore prendre des décisions pour son pays, même si cela déplaît à un bailleur de fonds, mais pourra-t-il jamais prendre des décisions contre… ses propres intérêts ?

 

2)      En traitant les politiciens de stupides, Washington, DC de corrompue, comment va-t-il gouverner ? Si Obama, qui a systématiquement invité à l’unité de la nation, à sortir de la politique manichéenne, c’est-à-dire surmonter les clivages entre Républicains et Démocrates, n’a pas réussi, comment va-t-il, lui, pouvoir travailler avec un congrès et un sénat qu’il s’est mis à dos ? Vous faites confiance à Trump pour gouverner par décrets présidentiels, vous ?