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Rêve de croissance
Nouveau coup dur à nos ambitions ! Après la Chambre de Commerce et d’Industrie de Maurice, c’est au tour de l’institut des statistiques de revoir à la baisse ses anticipations de croissance pour 2016.
Au lieu de se rapprocher de 4 % avec une croissance de 3,9 % cette année, comme l’avait estimé Statistics Mauritius en mars dernier, l’économie mauricienne va finalement croître à un rythme inférieur, soit de 3,7 %. Bien que cette nouvelle projection demeure optimiste en comparaison avec les 3,4 % de la Chambre de Commerce, son abaissement témoigne toutefois de l’état actuel de l’économie.
Prise au piège de la stagnation, la croissance demeure autour de 3,5 % depuis plusieurs années en dépit des beaux discours de ceux qui se succèdent au Trésor public. Le ministre des Finances, Pravind Jugnauth, n’est pas dupe : il sait mieux que quiconque que le rebond n’aura pas lieu. Pire, il a certainement compris, du moins nous l’espérons, que sur cette trajectoire le navire Mauritius Incorporated se dirige tout droit vers les récifs.
D’où ses appels. En deux occasions, la semaine dernière, lors de l’ouverture officielle de la Bank of China et d’un atelier de travail sur le concept de construction-exploitation-transfert, Pravind Jugnauth a tenté de rameuter la communauté des affaires. D’abord, il a insisté sur la nécessité de réduire le coût du capital, avant d’ajouter que face à l’urgence de créer des emplois et de relancer la croissance dans un contexte marqué par un faible engagement du privé, l’investissement dans l’infrastructure n’est plus un choix, mais un impératif.
Le hic, c’est que le gouvernement n’est pas en mesure de mobiliser les ressources financières étant contraint à la discipline fiscale. «C’est pourquoi nous avons besoin que le secteur privé investisse dans des projets en ligne avec la stratégie du gouvernement. C’est pourquoi il est important d’avoir un secteur bancaire opérant de concert avec l’État et les investisseurs afin de faciliter la levée de fonds», a insisté le ministre des Finances.
Le gouvernement entend porter l’investissement public à quelque Rs 34,5 milliards à fin 2016-17, mais le ministre reconnaît qu’il y a un obstacle majeur : le retard sur le plan de l’exécution. Certains projets font face à des dépassements de budget tandis que d’autres ne sont carrément pas mis en œuvre. Cet aveu est de taille, d’autant plus qu’il sort de la bouche d’un aspirant à la primature.
La lecture du dernier rapport du bureau des statistiques, où il est annoncé que plusieurs secteurs feront moins bien que prévu, permet de mieux comprendre la démarche de Pravind Jugnauth auprès de la communauté des affaires. En effet, selon l’analyse de l’institut, le secteur agricole non-sucre réalisera une croissance de 4,3 % au lieu de 4,7 % comme estimé précédemment. Le secteur manufacturier ne se portera pas mieux, non plus, cette année. Avec les effets du Brexit, la progression de cette industrie ne sera que de 0,6 %, plombée par une contraction dans le textile de l’ordre de 2 % alors qu’auparavant, les analystes de Statistics Mauritius tablaient sur une expansion de 0,2 %.
La construction, véritable baromètre de l’économie, n’arrive toujours pas à se remettre des années de vaches maigres. Sur la base des travaux complétés au premier semestre et les projets qui seront en chantier pendant la seconde partie de l’année, Statistics Mauritius estime à zéro pour cent la croissance dans ce secteur contre une estimation officielle de 1,6 % il y a trois mois.
Cela dit, la question est de savoir si l’appel du Grand argentier sera entendu. Le secteur privé, qui d’ordinaire manie habilement la langue de bois afin d’éviter de se prononcer sur la performance des princes du jour, s’est tout de même laissé aller à quelques confidences à Financial Times récemment. L’on a ainsi découvert qu’il y a une certaine «frustration» dans le milieu des affaires face «à la croissance terne». Une situation qui est attribuée aux politiques et à «leur manque de compétence» pour renverser la vapeur.
Un autre opérateur interrogé par la publication britannique relèvera qu’à Maurice il n’y a pas la même vision à long terme, comme c’est le cas à Singapour.
Autant dire qu’il faudra un miracle pour sortir le pays du piège du revenu intermédiaire !
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