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2016: la grande désillusion
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2016: la grande désillusion
C’est en fanfare qu’elle s’est installée à l’Hôtel du gouvernement en décembre 2014, portée par la promesse de diriger autrement. Deux ans après, L’alliance Lepep peine toujours à traduire dans les faits cet engagement, pourtant présenté comme le fil conducteur de son action.
Cette incapacité de passer de la parole aux actes a fini par entamer la popularité de la nouvelle administration. Les baromètres d’opinion réalisés auprès des opérateurs économiques et des consommateurs en témoignent. Le moral est en berne.
Il n’est pas nécessaire d’aller chercher loin pour mieux comprendre cet état d’esprit. D’abord, il a fallu
composer avec un environnement international hautement volatil et imprévisible. C’est le cas de le dire avec le vote de 52 % des Britanniques pour le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne. Une véritable douche froide. Du coup, les institutions internationales qui ont pris position ouvertement pour le Bremain, à l’instar du Fonds monétaire international, ont dû revoir leurs copies.
Dans son rapport d’octobre sur les Perspectives de l’économie mondiale, le FMI corrige à la baisse ses estimations de croissance pour 2016 à 3,1 %. Un atterrissage difficile pour les analystes de l’institution qui, en janvier, tablaient sur une expansion du produit intérieur brut (PIB) mondial de l’ordre de 3,4 % pour cette année. À peine ont-ils eu le temps de mettre en garde contre l’impact d’une stagnation persistante sur le protectionnisme que Donald Trump accédait à la Maison-Blanche exacerbant ainsi le vent d’incertitude qui souffle déjà sur la planète.
Face à ces soubresauts sur le plan international, il est malheureux de constater que l’on ait manqué de discernement dans différentes sphères du pouvoir durant l’année écoulée. D’emblée, le pays a placé la barre très haut dès le début de 2016, le ministre des Finances de l’époque, Vishnu Lutchmeenaraidoo, annonçant que cette année serait celle «du commencement de la récolte après que 2015 a été celle des semences». Cette déclaration faite à l’ouverture de la MauBank durant les premiers jours de 2016 est à mettre dans le même registre que celle prévoyant une croissance de l’ordre de 5,3 % pour l’année fiscale 2015-16. Une projection très ambitieuse qui avait fait sourciller plus d’un, mais nous étions en mars 2015, date de la présentation du premier Budget et le pays était encore sous le charme de L’alliance Lepep.
Entre-temps, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et Vishnu Lutchmeenaraidoo s’est retrouvé dans la tourmente pour un emprunt en euros auprès de la SBM. Au point de perdre son portefeuille des Finances au profit de Pravind Jugnauth après que ce dernier a été réhabilité par la Cour suprême dans l’affaire Medpoint.
Coup de tonnerre en juillet lors de la présentation du Budget 2016-17. Le successeur de celui qui a été présenté à la population comme le faiseur de miracle déclare que la croissance pour l’année financière 2015-16 est de 3,4 %. Une estimation nettement inférieure, soit de 1,9 %, à celle du précédent exercice financier. De quoi tomber des nues.
Nombre d’observateurs ayant à un moment donné considéré l’arrivée de Jugnauth fils au Trésor public comme un gage de stabilité ont vite déchanté. Son retour au Conseil des ministres après un passage à vide comme simple député a été accompagné de profonds tiraillements au sein du gouvernement. Les tergiversations sur le projet Heritage City et le bras de fer entre son conseiller principal Gérard Sanspeur et le ministre de la Bonne gouvernance, Roshi Bhadain, en disent long sur l’ambiance à l’Hôtel du gouvernement.
Avec l’économie reléguée au second plan, la politique s’est installée durablement dans l’actualité. Le chef du gouvernement a aussi contribué à cette situation en évoquant son intention de se retirer pour céder la place à son fils. Il a provoqué ainsi une levée de boucliers autour de ce qui est désormais connu comme le deal papa-piti.
Analysée sous tous les angles pendant des semaines, cette annonce de sir Anerood Jugnauth a fini par instaurer un climat d’attentisme dans le pays. L’enquête trimestrielle de conjoncture de la Chambre de Commerce et d’Industrie est d’ailleurs très révélatrice à ce sujet.
«Nous constatons une détérioration du niveau de confiance des entrepreneurs pour le troisième trimestre de cette année», écrit la Chambre dans son rapport.
Pour couronner le tout, L’alliance Lepep vole en éclats à la veille de Noël. Le PMSD claque la porte du gouvernement accusant le MSM de vouloir introduire un texte de loi, le Prosecution Commission Bill, pour lequel il n’est pas mandaté. Cette nouvelle configuration parlementaire donne lieu actuellement à des tractations diverses. Le gouvernement cherchant notamment à retrouver la majorité de trois quarts nécessaire pour envisager des amendements à la Constitution. L’Opposition n’est pas en reste avec un nouveau leader à sa tête.
C’est Statistics Mauritius qui, à travers les comptes nationaux, nous a rappelé aux bons souvenirs de l’économie, alors que le soleil s’apprête à se lever sur 2017. Désillusionné comme ces nombreux analystes qui s’attendaient à un rebond cette année, l’institut des statistiques annonce que la croissance sera finalement de 3,6 %. Loin de ses calculs de mars dernier où il indiquait que l’expansion du PIB serait de l’ordre de 3,9 %.
Les retards enregistrés dans la mise en chantier de projets majeurs – d’où l’absence de reprise dans le secteur de la construction – expliquent en partie pourquoi la croissance ne s’est pas rapprochée de la barre psychologique de 4 %.
Même l’outil monétaire déployé par la Banque de Maurice n’a pas permis de renverser la vapeur dans la présente conjoncture. Car, malgré l’assouplissement – le taux directeur a été ramené à 4 % durant l’année –, la communauté des affaires continue d’afficher la prudence. Les banques regorgent toujours de liquidités.
S’il y a une leçon à tirer de l’année écoulée, c’est qu’il n’y a pas de baguette magique. En revanche, il y a des choix stratégiques à faire. Afin de mieux s’y préparer, il est impératif que l’économie redevienne la principale préoccupation du gouvernement.
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