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Passions et passations

22 janvier 2017, 07:29

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Double passation des pouvoirs. L’une chez nous, contestée et contestable, entre un père usé et son fils unique et au destin dynastique ; l’autre à Washington, DC, contestée mais incontestable, car selon les règles de la démocratie électorale, entre un président démocrate et ouvert sur le monde et son successeur républicain, adepte du repli et du protectionnisme.

À écouter sir Anerood Jugnauth hier, tel un monarque tiers-mondiste, à la tête d’une République bananière, on dirait que c’est le peuple qui devrait le remercier pour tout ce qu’il a fait ou n’a pas fait depuis son entrée en politique en 1963 ! Pourtant, sans gêne aucune, il vient nous mettre devant un fait accompli – un fait nullement mentionné dans le manifeste électoral de Lepep ou durant la campagne : il n’est plus PM, mais reste au gouvernement, sous les ordres du nouveau PM, son fils. «Je lui dis bonne chance pour le 2e miracle économique !»

Les Jugnauth n’en ont cure que la majorité des Mauriciens sont contre cette transition «papa-piti». Le dernier sondage Synthèses- La Sentinelle, publié dans notre hors-série de fin d’année 2016, indique que plus de sept sondés sur dix estiment que Pravind Jugnauth devrait passer par les urnes avant d’accéder au poste de Premier ministre ! Un sondage rappelé hier par nombre de politiciens de l’opposition.

Et si Pravind Jugnauth avait été présenté comme PM en novembre 2014, les résultats auraient-ils été les mêmes ? Certainement pas.

Alors que nous nous approchons des 50 ans d’Indépendance, nous vivons un tournant politique inédit. Jamais dans notre histoire un Premier ministre ne s’est hissé, de cette façon, au poste suprême. C’est un recul démocratique certain. C’est un pas de plus vers une culture dynastique qui a pris en otage la plupart de nos partis politiques – qui fait fi du concept de l’égalité des chances et des principes démocratiques. Ce n’est certainement pas une transition entre Cameron et May, mais c’est une ruse familiale pour arracher et conserver le pouvoir. Le monde entier nous observe – et nous allons perdre non pas un, mais plusieurs points dans les classements démocratiques ou dans l’imaginaire populaire.

Dans les prochains jours, chacun ira de son couplet sur cette passation entre les Jugnauth, notamment sur les aspects moraux, politiques, légaux, sociaux et économiques. Y aura-t-il des démissions en bloc du Parlement des rangs de l’opposition ? Le peuple va-t-il descendre dans la rue ? Pravind Jugnauth pourra-t-il nous convaincre qu’il n’a pas volé son nouveau titre ?

En attendant, depuis l’annonce de SAJ, en date du 12 septembre 2016, selon laquelle il n’irait pas au bout de son mandat, l’économie a été victime d’un climat malsain et instable. La passation d’hier risque de ne pas calmer les choses. Au contraire, les passions sont déchaînées. Les politiciens sont en ébullition. Hélas pour nous, l’économie sera encore oubliée au mieux, ou malmenée au pire !

***

À des milliers de kilomètres de chez nous, l’impensable est devenue réalité. Le 45e président des États-Unis, Donald Trump, fait peur dans sa tentative de «make America great again». Entre autres à cause de son penchant pour le protectionnisme, les baisses d’impôts et la dérégulation financière.

Certes, Trump a été élu avec moins de voix que son adversaire (Hillary Clinton était présente vendredi pour l’investiture de Trump !), certes il est le président le moins populaire, probablement le moins intelligent, mais on ne peut pas douter de la légitimité de Trump, comme aujourd’hui on doute de celle de Pravind Jugnauth…