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TOUT N’EST PAS (encore) PERDU !
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TOUT N’EST PAS (encore) PERDU !
Tout n’est pas perdu, car nous ne sommes pas (encore) les Philippines !
Là-bas, devant une situation sociétale très dégradée sur plusieurs décades, les électeurs, désespérés, ont élu, il y a sept mois, un président flingueur qui s’appelle Rodrigo Duterte et qui, dès son arrivée au pouvoir, avait donné carte blanche à la police pour tuer «les trafiquants de drogue», promettant qu’aucun policier ne serait jamais poursuivi, ce faisant !
Le résultat ? Une police de plus en plus dévergondée qui, sous le couvert de l’immunité, a pratiqué l’extorsion, l’arnaque mais aussi le meurtre. Dernier cas en date, un ressortissant sud-coréen, Jee Ik Joo, arrêté par des policiers véreux sur un faux mandat d’arrêt, étranglé en prison dès le premier jour de son arrestation et dont la «libération» subséquente a fait l’objet d’une …demande de rançon par les meurtriers eux-mêmes ! Sur ce coup-là, Duterte a dû reculer, même suspendre les actions de la police, le temps que son chef, Ronald de la Rosa, aille à la messe pour faire son examen de conscience et en ressorte, apparemment, prêt à purger ses troupes. Duterte lui-même pense désormais que 40 % des policiers sont «corrompus jusqu’à l’os».
Signalons qu’en sept mois, Human Rights Watch a répertorié plus de 7 000 assassinats, dont 2 250 à travers des opérations de la police, les autres étant le fait d’«assassins de l’ombre», enhardis par l’atmosphère de Far West qui règne aux Philippines. Soulignons aussi que le dévergondage d’une police libérée de toute contrainte aura été alimenté par des primes payées pour chaque «confrontation» mortelle. Par contre, rien pour une arrestation ! Point d’orgue ultime : cela a même mené à des primes de «porteurs d’affaire» payées à certains policiers par des… maisons de pompes funèbres !
Tout n’est pas perdu car nous ne sommes pas encore les États-Unis !
Depuis le 20 janvier, on y construit le mur sur la frontière sud, on a invité le voisin mexicain à ne pas venir rendre visite, sauf s’il est prêt à emmener (et à ouvrir) son porte-monnaie, on a signé un décret pour interdire l’accès aux États-Unis à des musulmans, même s’ils sont en règle avec l’immigration grâce à leur visa et on a intronisé le concept de «faits alternatifs», comme si une foule de 100 000 personnes pouvait, tout bonnement, être métamorphosée en un million de personnes si ce premier «fait» ne convenait pas tout à fait au pouvoir en place !
Ajoutez à cela le site web de la Maison-Blanche qui a effacé toute référence aux dangers du réchauffement de la planète ou à la cause LGBT et la conversation téléphonique écourtée entre Trump et Turnbull quand la politique d’«America first» se retrouva, pense-t-on, opposée à celle d’«Australia first and foremost» et vous aurez une idée de ce qui pourrait nous pendre au bout du nez, mondialement, pour les années à venir !
En effet, dans un univers de confrontation où la plus forte puissance du monde veut assurer ses seuls intérêts et avantages d’abord, soit les autres s’écrasent, soit ce sera la guerre ! La dévalorisation des négociations , des compromis, des concessions judicieuses, des accords commerciaux donnant-donnant pour favoriser «un plus grand bien», quand remplacés par «The Art of the Deal» façon Trump, ne peuvent que nous retourner à l’époque pré-Woodrow Wilson, d’avant la Ligue des Nations… Ça promet ! Si quand un «deal» en affaires ne marche pas avec la compagnie «X», on peut toujours essayer avec «Y», c’est bien loin d’être pareil entre Etats ; les Etats étant bien moins nombreux et n’étant pas, de toute façon, interchangeables ! Quand on joue les gros bras et qu’on n’a pas fait de «deal» avec la Chine sur la mer de Chine, avec qui fait-on alors un «deal» alternatif ? Taïwan ?
Tout n’est pas perdu car nous n’avons pas, nous, encore signé de Brexit et que nous n’avons pas non plus des députés capables, comme Marine Le Pen ou François Fillon, de traiter les fausses factures de convenance comme autant d’occasions de régler de petits problèmes personnels avec l’argent public ! Au pire, ici, oublie-t-on de payer sa note de clinique…aux dépens de l’argent privé !
On m’aurait dit que les pays à l’étranger, en particulier les pays dits «développés» qui ont été, longtemps durant, nos pays références en ce qui concernait des normes et des standards auraient pu, par contraste, aider à rendre nos propres gouvernements plus potables – que je ne l’aurais tout simplement pas cru ! Et pourtant ! C’est arrivé !
* * *
Cela nous laisse quoi exactement comme choix localement ?
Soit nous prenons ces cas comme des exemples qu’il serait à propos de copier et nous laissons couler nos propres standards en conséquence, afin de conserver (ou d’augmenter, tiens !) la tête de retard que nous avions déjà (en espérant ne pas, nous aussi, générer un Duterte en aval), soit, dans ce monde qui semble plonger vers la désespérance, nous choisissons ce moment-là, justement, pour nous secouer les puces, et, entre autres, bonifier notre démocratie, rechercher plus de méritocratie, améliorer notre éthique de travail et notre productivité nationale, pour stimuler investissements et emplois durables !
Évidemment que nous devons tous agir à notre niveau, mais Pravind Jugnauth, le nouveau PM, est le seul qui peut véritablement impacter la nation, en la circonstance. Le seul qui a le pouvoir de donner le ton et de réorienter le pays. Le seul qui a la discrétion de prendre des décisions fortes, qui ne seront sûrement pas toujours populaires, mais qui se verront sans doute éventuellement être respectées –voire admirées, si judicieuses !
Que la cuisine s’en mêle ou pas, que ses casseroles à lui se cristallisent ou pas, que les appréhensions de certains à propos de la «mafia» qui l’entoure se matérialisent ou pas, cet homme, qui a, jusqu’ici favorisé la discrétion et le réalisme, mais qui a , par ailleurs, pris l’énorme risque d’être à la fois chef de parti, chef du pays, chef des finances nationales et chef de la police et de la sécurité intérieure du pays, va jouer sa réputation (et, en passant, l’avenir de NOTRE pays !) au cours des mois qui arrivent.
Je n’ai pas l’intention de jouer au matamore ou de m’imposer la violence toute particulière de l’autoflagellation ou du masochisme. Du moins, pas à ce stade. Je vais donc croire qu’il est possible que cet homme aux cheveux déjà blancs qui a pris en charge notre destin le 23 janvier pourra nous étonner et vais lui donner sa chance de nous convaincre. Comme tout démocrate qui se respecte, on ne lui fera donc pas un procès d’intention à ce stade. On le jugera sur pièces, en espérant, fortement, qu’il nous surprendra !
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