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ADMIRABLE !
Admirable la leçon de démocratie qui nous vient des USA, avec les auditions publiques qui s’y tiennent ces jours-ci. D’une part, pour passer au peigne fin les nominations proposées par Donald Trump et, d’autre part, pour interroger les chefs du FBI et de la NSA dans la double affaire des supposées tables d’écoute d’Obama à la Trump House et de la trop grande proximité entre les responsables de la campagne électorale de M. Trump avec les Russes. Pourquoi admirable ? Mais parce que les Américains jouent ainsi la carte de la transparence et que la transparence, pas nécessairement la nudité, c’est toujours bon pour le système ! C’est ainsi que ces souscomités constitués de sénateurs ou de membres de la Chambre des représentants assument leurs responsabilités premières vis-à-vis de leurs mandants, car ces membres doivent se documenter à fond, vérifier leur information et questionner, par la suite, directement les personnes en question, en public, pour s’assurer que la vérité soit connue et que les meilleures décisions soient prises en conséquence.
À Maurice, le pouvoir est au seul leader, un omnipotent, et les backbenchers, régulièrement choisis pour autre chose que leur capacité à s’informer et à questionner de manière libre et autonome, ne sont finalement que trop souvent des «yes-(wo)men». Un tel système d’audition publique forcerait donc les partis à choisir des candidats mieux outillés pour le travail de ces comités !
Vous imaginez ce système adapté pour Maurice ? Nous n’avons pas nécessairement besoin d’un régime de type «présidentiel», mais la première vague de nominations après des élections pourrait être pour un «Appointments Committee of the House» (les nominations partisanes à ce comité étant proportionnées aux députés élus ou, mieux encore, aux votes reçus), lequel devra d’abord passer au crible tous les ministres proposés par le leader du parti gagnant, c.à.-d. le futur PM. Le parti majoritaire va, évidemment, avoir le dernier mot, sauf si le candidat proposé est tellement mauvais ou tellement contesté par son propre parti, qu’il ne passe pas la rampe… !
Comme, cette fois aux États-Unis, où Andrew Puzder, le premier choix proposé par Trump comme secrétaire à l’Emploi, s’est révélé être un employeur souvent en infraction aux… lois du travail !
Pourraient s’ensuivre des auditions pour quelques autres postes importants où le gouvernement voudrait changer de responsable. Le secrétaire financier, peut-être ? Le directeur de l’ICAC ? Le chairman de la FSC ? Celui du CEB ? Le gouverneur de la Banque centrale ?
L’idée est lancée pour ceux qui pourraient penser que notre système démocratique est loin d’être parfait et qu’il mérite d’être dynamisé. Cette proposition a donc le mérite de réduire quelque peu le pouvoir impérial actuel de notre PM, de favoriser des députés de meilleure qualité, mais aussi de mieux éclairer le public sur la qualité des hommes à qui l’on va confier les cordons de nos bourses et la responsabilité de prises de décision en notre nom. Si seulement de telles auditions publiques pouvaient éviter ne serait-ce que quelques nominations trop hasardeuses pour la réputation de notre pays, on aurait certainement gagné au change… Les cafards, comme on le sait, ayant toujours plus de chance de foisonner dans les recoins où il y a moins de lumière ! Le défi majeur, sans doute, reste que nos PM à l’impérial ne souhaitent généralement pas du tout restreindre leur pré et leurs pouvoirs…
Admirable d’être dans un pays où la police peut encore faire des saisies de drogue alors que l’on soupçonne les trafiquants de vouloir trop s’approcher du pouvoir, et dans le passé, de s’être arrangé pour financer des partis pour s’attirer bonnes grâces et protection. Après de terribles déceptions (notamment sur l’usage des provisional charges de manière politiquement (in)correcte), nous avons, dans le cas des 135 kilos d’héroïne (Rs 2 milliards) retrouvés dans des cylindres, de quoi nous rassurer sur le travail de la police qui mérite, au-delà de ses primes, des félicitations sincères.
Admirable la volonté du Premier ministre de rendre le pays plus propre, de donner son sang volontairement, de nous aviser qu’il refuse, jusqu’à ce qu’il ait accompli sa mission, toute grandiloquente décoration nationale ; en espérant qu’il ne prenne pas ces initiatives seulement sur les conseils de son consultant en relations publiques et qu’il insistera sur ces questions. Avec assiduité !
Admirable encore cette scène stupéfiante où le directeur du FBI, James Comey, déclare en pleine audition publique du House Intel Committee que, sachant que les Russes sont intervenus fortement dans l’élection présidentielle, au détriment d’Hilary Clinton, il n’avait cependant, aucune information prouvant que ces interventions avaient changé le résultat. Ce qui déclencha immédiatement un Tweet du président Trump dans lequel il déclarait, mensongèrement, que ce qu’avait dit le directeur du FBI était que «… Russia did not influence electoral process» ! Ce Tweet fut immédiatement communiqué à Comey par Jim Himes, un des membres du comité, et Comey fut alors forcé de dénoncer gentiment la mauvaise interprétation (pour ne pas dire plus !) du président Trump ! Admirable donc de voir du «fact checking» en temps réel, même à propos de l’homme le plus puissant de la planète !
Admirable ! Ça pourrait aussi être l’expression que l’on utilisera pour notre pays, dans quelques années, quand on aura appris à s’assumer et à s’affranchir des Jugnauth et des Ramgoolam, quand le mauricianisme aura fait d’autres pas de géant et quand la méritocratie se sera installée sans bavure. Admirables nous le serons quand les institutions du pays seront redevenues libres et indépendantes, quand nos lagons déborderont à nouveau de poissons multicolores, quand nous aurons intégré dans notre quotidien, au-delà du culte religieux, celui de l’efficience et de la productivité. Admirables nous le deviendrons si nous cessons d’être des adolescents même après 50 ans, si nous retrouvons Diego, si notre chaleur humaine naturelle, enrobée de plus de discipline et de connaissance, nous mène à être une destination de service rayonnante et jalousée et si nous évoluons vers une société où les valeurs, le partage et les principes remplacent les intérêts, le tout-argent et l’égoïsme.
Admirable !
C’est bien de le souhaiter pour notre pays, mais il faudra tout de même y travailler un peu plus !
N’est-ce pas !
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