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Quand Nandanee s’habille en Prada

15 avril 2017, 08:04

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Milan n’est pas la capitale de l’Italie, mais elle est reconnue, depuis la Renaissance, comme la capitale de la mode et du design. Avec sa gare géante – construite par Mussolini – Milan se révèle un véritable carrefour pour visiteurs, créateurs, commerces luxueux, cultures ou musées d’antan et catwalks du présent. Dans la rue, les hommes sont aussi attentifs à leur tenue et à leur maquillage que les femmes. On y voit, souvent, se déhancher sur les trottoirs, entre les touristes et les Milanais, des mannequins du monde entier, venus tenter leur maigre chance auprès des enseignes de luxe telles Armani, Prada, Valentino, Versace, Giuseppe Zanotti, Zagliani. Il y a aussi des photographes talentueux qui tentent d’immortaliser les créatures de rêve, drapées dans des tenues sophistiquées. En quelques clichés bien réussis, de parfaits inconnus peuvent devenir des étoiles mondiales. L’ascenseur social est phénoménal pour certains…

C’est là-bas, dans ce décor de luxe, de paillettes et de défilés de mode qu’une Nandanee Soornack complètement relookée conviera, ce 19 avril, à 14 heures, la presse. Nandanee, devenue aujourd’hui une star mauricienne, est sortie de l’ombre, lors d’un scrutin municipal, un certain 10 décembre 2012, au collège Maurice Curé, après une photo faite par Yogida Sawmynaden, aujourd’hui ministre du gouvernement Lepep. Depuis, Nandanee occupe la Une des journaux chez nous et se métamorphose de selfie en selfie.

Jusqu’ici, Nandanee fuyait la presse et avait même initié contre deux titres indépendants, l’express et le mauricien, un Gagging Order, du temps du juge Bhushan Domah. Gagging Order que la Cour suprême, par l’intermédiaire du juge Eddy Balancy, a, par la suite, fait voler en éclats, au nom de l’intérêt public et de la liberté d’expression. De par ces événements, tout le monde «koné ki sanla Nandanee été»…

 

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 L’invitation ayant été lancée bien en avance, des journalistes mauriciens se préparent pour aller rencontrer notre star. Nandanee n’est pas une personne qu’on approche facilement. Elle donnait souvent espoir aux journalistes, des fois fantaisistes, qui se font pratiquement toujours avoir, en se heurtant, malgré des rendez-vous donnés, à des portes fermées ou à des téléphones éteints… Depuis la publication, le 16 août 2014, par l’express des photos d’elle en train de danser avec son homme, lors d’une fête privée et bien animée, Nandanee ne veut plus que sa vie soit dictée par des journalistes. C’est elle qui imposera son agenda, désormais. D’où cette conférence de presse milanaise…

À l’évidence, Nandanee soigne, encore plus, son image depuis qu’elle a été reniée sur la place publique par son ami intime, Navin. «J’ai fait une erreur et je demande pardon», avait déclaré l’ancien Premier ministre, qui disait vouloir tourner la page, après sa lourde défaite électorale. Une défaite que certains de ses partisans attribuent largement à Nandanee.

Mais, dans l’entourage de celle-ci, avec les déboires d’Airway Coffee et la trahison de Rakesh Gooljaury, la coupe était pleine. Il fallait renverser la vapeur et reprendre le dessus, maintenant que les ardeurs se sont calmées.

Si elle s’est réfugiée dans le silence, malgré ses victoires contre l’État mauricien (l’extradition refusée) et contre la police (récent jugement de la magistrate Hamuth) pour les abus de procédures contre sa personne, désormais, elle veut que la donne change. Elle ne se défendra plus, elle attaquera. Elle n’a plus rien à perdre. Tout à gagner, ou à conquérir.

Loin de ses ennemis de Lepep, du traître Gooljaury et de celui qui l’a rejetée comme une vieille chaussette, Nandanee s’est bien ressourcée, en profitant de la qualité de vie de Bologne et de Milan, dont la position géographique en fait un lieu privilégié en Europe. Pour les loisirs et pour échapper aux pressions de l’existence, Nandanee a le choix : les grands lacs ne sont seulement qu’à une heure de voiture, les montagnes et les stations de ski du Val d’Aoste à une heure et demie, la côte ligure ou la Côte d’Azur à deux heures, Venise à deux heures et demie…

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 La vie sexuelle débridée des Rois de France, dont le pouvoir absolu leur permettait de mettre dans leur lit toutes celles (et des fois tous ceux) qu’ils convoitaient, est archiconnue et documentée. On connaît moins bien celle des hommes politiques aux commandes dans les démocraties modernes. Est-ce parce qu’ils ont des comptes à rendre aux citoyens ? Toujours est-il qu’il existe une littérature foisonnante sur les frasques des John Kennedy, Clinton, Berlusconi et, plus récemment, DSK – que certains chercheurs tentent de comparer aux dirigeants des siècles passés…

À Maurice, on tend à passer sous silence la vie privée de nos élus – et ce, jusqu’à ce que leurs dulciné(e)s ne commencent à régner en maîtresse des lieux et à s’accaparer de l’argent public et à traiter tout le monde de haut : comme avant-hier Soornack à l’aéroport SSR ou, hier, Sumputh, à un degré moindre, au centre cardiaque. Malgré les largesses notées, on constate néanmoins que la loi s’avère souvent impuissante, et que des esprits étriqués avancent qu’on attaque des femmes (comme si le fait d’être femme donnerait le droit de piller l’argent public)…

Prenons le cas de Nandanee. Elle a toutes les raisons de jubiler aujourd’hui. La Cour suprême d’Italie lui a accordé une belle victoire, alors que notre Attorney General, qui avait fait de la condamnation de l’amie de Ramgoolam une promesse de campagne, n’a qu’à s’en prendre à lui-même. Ravi Yerrigadoo a mal géré les procédures d’extradition : le dossier à charge a été rempli par des amateurs de son bureau et des Casernes centrales dans un anglais approximatif – imagine-t-on seulement ce que cela a donné quand traduit en italien.

Après le traitement infligé aux investisseurs de Dufry, entre les murs de son appartement quatre-bornais, traitement qui a été largement commenté sur le web, Yerrigadoo pensait-il vraiment que la justice italienne allait le croire quand il jurait que Maurice est un État de droit et que la police ne va pas politiquement harceler Nandanee Soornack ?

Et puis, avec l’affaire Roches-Noires, il est devenu évident que le gouvernement voulait avoir Nandanee comme témoin (au même titre que Gooljaury) afin d’étoffer le dossier contre Ramgoolam. Mais Soornack veut faire les choses à sa façon désormais. Elle a le look, elle a le fric, elle a l’attention de la presse, elle a, aujourd’hui, toutes les cartes en main… pour devenir une vraie star qui fera trembler et Ramgoolam et Jugnauth ! En tout cas, celle qui avait pris la fuite, avec ses valises remplies, le soir des élections générales, n’est plus tout à fait la même femme qu’on croyait connaître…