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Le Seigneur des éditoriaux

26 avril 2017, 14:00

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Le Seigneur des éditoriaux

Naquit au début de l’année 1963 à la rue Brown-Séquard, Port louis, une maison d’édition pour un groupe qui se voulait sentinelle. Dans le ton des vieilles demeures port-louisiennes, une toiture en bardeaux et une devanture décorée d’arbres fruitiers et de fleurs. Un papayer, un grenadier et un plant de fruit de Cythère dont les immenses branches qui aidaient les passants à se rafraichir sous l’ombre en été étaient relayés par des  « fleurs d’oreiller »  parfumées la nuit.  La maison d’édition en bois du groupe La Sentinelle se trouvait en face de l’église l’Immaculée-Conception de l’autre côté de la rue Brown-Séquard ou trônait Henri Souchon. À plusieurs centaines de mètres, sur le flanc de la montagne des signaux, la statue de Marie-Reine-de-La-Paix. Ces trois lieux ont des points communs et ce n’est  certainement pas la religion, mais plutôt la foi.  

C’est sa foi dans la contribution positive du journalisme indépendant dans une démocratie qui menait le Dr Philippe Forget, rédacteur en chef du journal, à innover et à se battre pour que la liberté la presse soit respectée. Au tout début, l’express était dans de grandes difficultés financières et il nous a guidés sur le chemin de la discipline pour la bonne marche de l’entreprise. C’était lui l’inventeur du système 365/an et il a aussi fait revoir à la baisse, par ses éditoriaux instructifs, le très grand nombre de jours fériés qui plombaient la production du pays. Le Dr Philippe Forget disait la vérité même (surtout !) quand c’était dur.  C’est ainsi qu’après avoir lu un de ses éditoriaux un groupe de partisans très excités du Mouvement militant mauricien lançaient des pierres sur le bâtiment de l’express. Panique parmi les employés, des cris et des pleurs. Dans la confusion, Dr Philippe Forget me remettra la clé de sa voiture, une BMW de couleur jaune, pour la mettre à l’abri. Je suis allé garer la voiture très loin du bâtiment de l'express. Je ne savais pourtant pas que ces personnes excités m’avaient suivi: ils ont voulu bruler la BMW avec de l’essence ! 

Il a été pour nous et pour bien d’autres, le seigneur des éditoriaux  car ses opinions faisaient mouche, mais dans la vie, c’était pareil.  Je me rappelle très bien ces mots  envers les employés: «Si zot pas kontan sa sistem travay-la, anou ferm la boutique, nou tou  al vann  pomdéter». Nous étions soudés comme une famille. Le grand respect que nous avions pour le Dr Philippe Forget c’était dû au fait que c’est bien lui qui nous représentait  devant le board de la Sentinelle. Souvent des fois quand il était de bonne humeur, il nous donnait des leçons dans l’atelier sur comment planter du cresson et des tomates sur des macadams ou à la verticale. Le plus mauvais  souvenir fut quand ceux d’en haut ont voulu sa tête sous pression politique. Il démissionna alors tout de suite comme directeur et rédacteur en chef du journal l’express et rentra chez lui par bus. C’était notre guru qui était parti. Son attitude était de toujours travailler comme des pros: «Confidence and hardwork are the best medicine to kill the disease called failure. It will make you a successful person !»     

Feu Dr Philippe Forget, entouré de l’ancien président Karl Offmann (à g) et du photographe Bouck Pillay Vythilingum, lors des célébrations des 50 ans de l’express.


C’était le 27 Avril 1963 que l’express pénétra dans le monde des médias. Ses confrères  locaux étaient Advance, Le Mauricien, le Cernéen, L’Action, L’Epée, Le Citoyen, Mauritius Times et L’Aube ,entre autres. Le 1er Avril 1963, la direction avait réuni pour la première fois les employés qui en partie étaientt composés de jeunes qui venaient de quitter l’école pour prendre de l’emploi pour la première fois. J’y étais. Le but de cette réunion était d’informer que le nom de La Sentinelle avait été choisi pour la nouvelle publication, mais qu'il avait été refusé car ce nom était déjà enregistré. Sur ce, la direction de La Sentinelle avait choisi le titre : l’express… qui n’a jamais cessé d’être la sentinelle du pays.   

Longue vie à La Sentinelle et à l’express pour leur 54ème anniversaire.

54 ans après, La Sentinelle continue de grandir.