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Patatras !
D’abord, un peu de contexte. La vidéo qui a valu tant de désagréments à Showkutally Soodhun et tant de soucis à Pravind Jugnauth ces jours-ci, date de… juillet 2017. Si elle était jugée aussi explosive, on pourrait se demander pourquoi elle ne fait surface que maintenant. Car on ne peut même pas tenter de dire que c’est électoralement «utile» à la partielle au n° 18, puisque le parti de Soodhun n’y est même pas… Pourquoi donc maintenant ?
Je n’ai pas voulu la regarder, cette vidéo, parce que j’en ai, pour le moment, ma claque de médiocrité en tous genres. Ce qui est sûr, c’est que ceux qui l’on vue, y compris le PM et Mgr Piat, sont choqués et que, depuis, la police enquête. Le fait que ces propos aient été tenus dans le «boardroom» du ministère du Logement atténue sans doute un peu les risques que Soodhun soit accusé d’incitation à la haine raciale, mais ne les élimine probablement pas. En effet, quand un ministre de la République s’aligne sur les propos racistes de ses visiteurs du jour, que ce soit par opportunisme ou avec sincérité, il accorde, en tant que ministre de TOUS les citoyens de la République, du crédit et une caution aux préjugés et aux propos séparatistes de ses visiteurs. Et ça, ce n’est pas responsable et c’est grave ! Tout autant que sont irresponsables ceux qui répandent et diffusent ces propos potentiellement incendiaires – que leur motivation relève du sensationnalisme ou du règlement de comptes.
Le 23 juillet dernier, ce mouvement de Bassin prônant son opposition à la construction de maisons de la National Housing Development Company (NHDC) dans «son» quartier, faisait l’objet de la chronique dominicale, ici-même.
«De quoi s’agit-il ?» demandions-nous alors. «En fait, de préjugés vieux comme le monde !» écrivions-nous. «Ce n’est pas du tout que ces habitants de Bassin sont contre des individus particuliers ou qui ont un parcours avéré de citoyen filou. Non ! Ils ne connaissent même pas l’identité des nouveaux voisins qu’on leur annonce… Ils ne connaissent que quatre lettres : NHDC, qui leur semblent rimer avec bandits, voleurs, misérables, vauriens… Ils ne cachent pas leurs idées préconçues : «Clash des cultures», disent-ils, «partout les logements NHDC posent problème», « (nous) sommes issus d’une classe sociale plus élevée», affirment-ils… «Nous sommes déjà entourés des résidences Kennedy et Bassin.» Et étonnamment : «Nous ne voulons pas que notre quartier devienne un ghetto !»
Et nous ajoutions alors: «Une société adulte et mûre permet à ses citoyens de vivre ensemble, les uns à côté des autres, en bonne harmonie, les uns et les autres étant conscients que dans leur nécessité de vivre ensemble, il y a des concessions à faire, des efforts d’ouverture à prolonger», d’autant que l’alternative c’est le ghetto, le vrai, regroupant des personnes aux moeurs semblables, complètement coupées les uns des autres. Pas de pont, mais que des murs. Vous imaginez cette île Maurice, vous ? Parsemée de ghettos style Bassin avec sa «classe sociale plus élevée» et son «meditation garden» , eux-mêmes séparés de ghettos de métèques drogués, eux-mêmes à l’abri de ghettos constitués de couples où l’on peut battre sa femme, eux-mêmes séparés de ghettos où l’on aime le bomli, eux-mêmes gardés à l’écart de ghettos où les muezzins ne dérangent personne à l’aurore, eux-mêmes isolés des ghettos où l’on apprend à jouer du violon, eux-mêmes à l’abri des ghettos où tout le monde est soûlard, eux-mêmes protégés des ghettos regroupant tous les bordels de la nation… ?
Au vu de l’absurdité de cette vision de séparatisme primaire, j’ai été ravi de lire, dans l’express de ce vendredi, que la construction de maisons de la NHDC n’a pas été stoppée, mais procède bien. Contrairement aux clichés bien établis, les maçons nous viennent non pas de résidence Kennedy, mais du… Bangladesh et, en passant, ils ne comprennent pas l’opposition que ces appartements génèrent. J’espère, pour ma part et pour mon pays, que ces appartements seront alloués selon des critères établis, non sectaires et sur une base de mérite pur. Tous les citoyens SONT égaux et doivent être traités comme tel. Les ministres qui renient cette norme de base ne sont pas dignes de notre confiance. Le PM, prenant pourtant la précaution de s'en remettre à l’enquête, l’aura compris aussi ! C’est tout à son honneur.
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Qu’en est-il de l’alignement des planètes ces jours-ci ? Le prince Mohammad bin Salman, d’Arabie saoudite, vient d’enclencher une petite révolution dans son pays qui n’est pas sans rappeler le «De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace !» de Danton. Comme Danton, il déclenche la révolution et autour de lui des têtes tombent. Il a trois objectifs : centraliser le pouvoir, déclencher une réforme sociale et économique pour revigorer un peuple plutôt indolent et dépendant du pétrole par une société moderne, engagée et qui valorise mieux les femmes et finalement, le plus difficile, confronter l’Iran et arrêter la montée des chiites, au Yémen et au Liban. Ce qui est sûr, c’est que le Moyen Orient ne va plus jamais être pareil ! Ajoutez à cela les trois premières inculpations de Mueller pour certains des hommes de Trump dans le face-à-face avec la Russie et le jeu extrêmement dangereux de «poker menteur» entre Kim et le Donald et le Brexit devient, tout d’un coup, de la petite bière, alors que la révolution «démocratique» de Xi Jinping en Chine prend des allures de… révélation d’octobre !
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Un gros scoop, c’est le graal pour un journaliste. Dans le sillage du dernier épisode de «Menteur Menteur», où le décompte des valises de Soodhun avait déjà fait sensation, Axcel Chenney détenait, en ce lundi 6 novembre, encore un gros scoop – la vidéo de Soodhun en pleine extase divisionniste. L’excitation à dû être à son comble. Pourtant, résistant à la tentation, il eut, avec son directeur des publications, l’instinct responsable. Il était, en effet, plus important de penser à la sérénité de la nation plutôt qu’à l’audimat. Ainsi la remise de cette vidéo au PM et le refus de l’exploiter, même charcutée… Cet épisode fera sans doute son entrée dans la légende du journalisme responsable, dont se félicitent nos équipes à «l’express» depuis déjà plus de 50 ans.
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