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#18: qui va gagner…

16 décembre 2017, 07:55

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Adressons-nous aux Quatre-Bornais directement. Si vous êtes l’un des 42 052 électeurs dûment enregistrés et que vous n’êtes pas parmi les quelque 30 % qui prôneraient l’abstentionnisme, pour qui iriez-vous voter demain ?

Depuis ces cinq, six derniers mois, nonobstant le fait que le vote doit demeurer un exercice secret, j’ai dû poser cette question à pratiquement tous les habitants du no18 que j’ai croisés. Par déformation journalistique, je suppose. Et les réponses obtenues, loin d’être une photographie précise, peuvent, néanmoins, permettre de mieux comprendre pourquoi cette partielle a du bon et du moins bon. Expliquons-nous.

Si les Quatre-Bornais nous donnent l’impression de se soucier, plus ou moins, de l’élection de remplacement (?) de Roshi Bhadain, c’est surtout parce que celle-ci se déroule dans leur arrière-cour et que les candidats, tour à tour, viennent taper à leur porte. Sans plus. L’enjeu aux yeux des habitants de la circonscription n’est pas clair. Ils disent avoir déjà deux députés dans l’opposition qui siègent dans un Parlement le plus souvent en vacances ; donc à quoi servira un troisième, si ce n’est de grossir les rangs d’une opposition encore plus divisée avec cette partielle.

Pratiquement le même raisonnement, mais un peu plus poussé : au Parlement, nous disent les habitants, il y a déjà, outre les indépendants, le MMM, le PTr, le PMSD et le MP qui sont représentés. Pensez-vous donc que Juddoo, Boolell, Maraye ou Diolle pourront mieux faire que les parlementaires Bérenger, Mohamed, Duval et Ganoo ? Quant à Roshi Bhadain, il aurait envoyé des signaux contradictoires par rapport au Metro Express : il a démissionné pour «stopper» le projet, puis il s’est ravisé en cours de route et maintenant il affirme qu’il pourra négocier avec les autorités indiennes s’il est réélu. Sauf que la partielle ne sera pas, comme l’a souhaité le député sortant, un référendum sur le métro. Ce serait intéressant, donc, de voir, parmi les 17 257 qui ont voté pour lui en 2014, combien vont lui accorder une seconde chance – maintenant qu’il n’a plus la machinerie du Sun Trust derrière lui…

À un moment où plus d’un crie son ras-le-bol des pratiques politiciennes, quid des partis qui ne sont pas du «mainstream» comme, disons, Rezistans ek Alternativ ? Le candidat Kugan Parapen est sorti 7e en 2014, avec 2 093 votes, soit environ 6,5 % des suffrages. Le macro-économiste de l’extrême gauche avait devancé Roshni Mooneeram (1 344 votes, 4,1 % des voix) et Ram Seegobin de Lalit (682 votes, soit 2,1 % des suffrages). Le problème des candidats comme Parapen, Bizlall, Joganah c’est qu’ils ne vont pas forcément bénéficier cette fois-ci de vote de sympathie. «Mo ti pou koup enn sa ki dan blok ek donn enn lot enn ti lankourazma.» Mais, cette fois-ci, c’est une croix seulement, pas trois. Selon un observateur averti du no18 : “The big gaps between the leading candidates highlight the fact that a lot of people voting for the mainstream parties did not vote bloc and some voted for smaller parties.” Est-ce à dire que ces partis sont condamnés à être des partis marginaux ? Le Reform Party de Bhadain, à la faveur d’un laborieux travail de terrain et des moyens conséquents, pourra-t-il changer la donne ?

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En fait, à voir les débats qui s’enchaînent et le nombre d’articles consacrés à la partielle (dont plusieurs sur ce thème dans cette édition), c’est clair que l’élection  passionne davantage les journalistes et les politiciens que le grand public. Les analystes misent sur les résultats de lundi (pour une fois, chaque parti sera jugé sur sa force ou faiblesse, et non sur celle de son alliance) pour mieux appréhender les rapports de force qui détermineront les alliances électorales (qui vont immanquablement se profiler avant 2019). Fait notable : aucun des six candidats qui sont arrivés en tête en 2014 ne fait partie de l’assemblage hétéroclite de Lepep. Duval, Chetty et Bhadain ont tous pris leur distance des Jugnauth. Kavi Ramano a, lui, démissionné du MMM, alors que Patrick Assirvaden et Nita Deerpalsing sont restés PTr. Pour les observateurs passionnés, une victoire de Boolell signifierait que le peuple aura (déjà ?) pardonné à Navin Ramgoolam et que les travaillistes peuvent sérieusement envisager la reconquête du pouvoir après leur débâcle de 2014.

Une victoire des mauves mettra fin à la longue série de défaites électorales et viendra crédibiliser le slogan de Bérenger : «MMM pli for ki zamé.» Si Bhadain gagne, cela voudrait dire que le MSM n’a aucune base au no18. Si Bhadain perd, il va mettre du temps avant de se relever politiquement. Quant au PMSD, son candidat semble être coupé de l’électorat de base des bleus malgré tous ses efforts, d’autant que, pour cette fois-ci, les bleus ne pourront pas compter sur des partenaires. Et puis, celle qui peut déjouer pas mal de choses : Tania Diolle, qui a conquis bien des coeurs de par sa fraîcheur et son parler vrai, pourrait, elle, être victime du faible poids électoral du MP, même si elle n’aurait, sans doute, pas pu faire mieux en étant indépendante, comme Nitish Joganah…

Au final, les 40 candidats, dont plusieurs sont de nouveaux visages (certains plus prometteurs que d’autres) prouvent que la démocratie reste vibrante chez nous. Et c’est assez réconfortant de noter qu’il règne une relativement bonne ambiance parmi les candidats et leurs agents. Serions-nous en train de progresser, même si les réflexes des votants semblent les mêmes, malgré tout…