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La bipolarité:Dictature déguisée ?

20 décembre 2017, 07:13

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«I have been asking myself how long will this musical chair between the Jugnauths and the Ramgoolams continue. It appears to be a conspiracy (with socio-culturals?) for the imposition of a two-family dictatorship on our country», commente cyniquement un internaute de lexpress.mu, provoquant ainsi un débat nourri par d’autres interrogations similaires. Dans le sillage de l’éclatante victoire du Parti travailliste et de la double déconfiture du MMM et du PMSD à la partielle de Belle-Rose– Quatre-Bornes, ce débat est légitime et important : sommes-nous entrés dans une ère de bipolarité politique ? C’est-à-dire entre le gouvernement aux mains du MSM de Pravind Jugnauth et l’opposition menée par le Parti travailliste de Navin Ramgoolam, avec les autres formations politiques comme forces d’appoint uniquement ?

Certes, les politologues vous diront que nous ne sommes pas dans un système de «bipartisme» (situation politique où, dans un régime démocratique, seuls deux partis sont en mesure d’obtenir la majorité au Parlement et de gouverner ainsi en alternance), encore moins de «bipartisme absolu», comme aux États-Unis, ou seuls deux partis peuvent être représentés au Parlement. Mais il est manifeste que nous sommes, plus que jamais, sur la voie de la bipolarisation (situation où les alliances électorales avec les deux grands partis s’avèrent, dans la pratique, le seul moyen pour les petits partis d’accéder au pouvoir).

Jusqu’ici, nous avions trois partis nationaux (le PTr, le MMM et le MSM) et un parti-5 sous (le PMSD) qui aspirait à se muer en un parti national (Xavier-Luc Duval ne cachait plus ses ambitions premier ministérielles). Pendant longtemps, quand deux partis nationaux s’alliaient, le troisième, souvent malgré un ramassis de petits partis, se faisait battre. C’était largement arithmétique et ce, jusqu’en 2014 quand les «deux plus grands partis de Maurice» (selon leur leader respectif) se sont fait battre à plate couture par le troisième qui, à la va-vite, avait bricolé l’assemblage hétéroclite qu’était Lepep (qui du reste n’a pas tenu la route).

Aujourd’hui, avec le faible score du MMM (14 % en 2017 au no 18 contre 46 % en 2010), le parti de Paul Bérenger, statistiquement parlant, descend d’un cran, et se place désormais parmi les partis qui ne sont pas dans le «mainstream». Si le fait que les mauves n’avaient pu enlever le moindre siège lors des municipales de 2015 était, déjà, pour beaucoup d’observateurs, une indication que l’électorat du MMM avait fui le parti dirigé par Bérenger, les résultats du no 18 viennent confirmer cette tendance baissière. Un véritable «collapse», comme le qualifie l’expert électoral Rama Sithanen. 

Quant au leader du PMSD, dont le candidat n’a même pas pu sauver sa caution, certains enquiquineurs pourraient bien lui demander si, moralement, il peut toujours endosser le costume de leader de l’opposition – même si légalement il détient le nombre de députés (9 pour le moment) face aux travaillistes qui ont le vent en poupe et qui, avec désormais cinq députés, pourraient conclure un accord, au Parlement, avec le MP et Kavy Ramano, et taquiner le poste de chef de l’opposition…

Quoi qu’il arrive, il est clair que l’électorat du no 18 (qui est assez représentatif de celui du pays) a choisi de redonner vie aux rouges. Et notre vie politique, dans cette campagne électorale qui a commencé hier, va s’articuler en fonction du MSM et du PTr. Quand l’on prend connaissance du faible score de ceux qui pouvaient aspirer à nous offrir un semblant de renouveau, la question s’impose : est-ce que cette bipolarisation accrue est une bonne chose pour notre démocratie, alors que nous nous dirigeons vers les 50 ans de notre Indépendance ?

Dans la vie, rien n’est tout blanc ou tout noir ; les nuances apportent la saveur, la diversité. Seule une réforme électorale pourrait mettre fin à cette bipolarité politique qui s’apparente à une forme de dictature déguisée… quand ce n’est pas Jugnauth, c’est Ramgoolam ? À moins que la bipolarisation PTr-MSM ne s’imagine désormais, question de renouvellement oblige, sans Ramgoolam, ni Jugnauth…